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Luisa Piccarreta
mystique italienne
(23 Avril 1865 -  4 Mars 1947)
Luisa Piccarreta
par Rozenn et JM.com

Le Royaume du Divin Fiat chez les créatures
Le Livre du Ciel
Tome 3
 
Appel des créatures à revenir à la place, au rang et au but
pour lesquels elles ont été créées par Dieu
Luisa Piccarreta
La Petite Fille de la Divine Volonté
 
1er novembre 1899
Alors que j'étais dans mon état habituel, je me suis soudainement trouvée hors de mon corps, à l'intérieur d'une église. Là, il y avait un prêtre qui célébrait le Sacrifice divin. Il pleurait amèrement et disait: «La colonne de mon Église n'a pas d'endroit où se reposer!»
Pendant qu'il disait cela, j'ai vu une colonne dont le sommet touchait le ciel. À la base de cette colonne, se trouvaient des prêtres, des évêques, des cardinaux et d'autres dignitaires. Ils soutenaient la colonne. J'observais de très près. À ma surprise, j'ai vu que, parmi ces personnes, l'une était très faible, une autre à moitié putréfiée, une autre infirme, une autre couverte de boue. Très peu étaient en condition pour soutenir la colonne. En conséquence, cette pauvre colonne vacillait. Elle ne pouvait rester ferme à cause des coups qu'elle recevait au bas.
À son sommet se tenait le Saint-Père qui, avec des chaînes d'or et des rayons émanant de toute sa personne, faisait tout ce qu'il pouvait pour stabiliser la colonne et pour attacher et éclairer les personnes qui se trouvaient plus bas (bien que quelques-unes s'échappaient pour être plus libres de pourrir ou de devenir plus boueuses). Il s'efforçait aussi d'attacher et d'éclairer le monde entier.
Comme je regardais tout cela, le prêtre qui célébrait la messe (je pense que c'était Notre-Seigneur, mais je n'en suis pas sûre) m'appela près de lui et me dit:
«Ma fille, regarde dans quel piteux état se trouve mon Église! Ces personnes mêmes qui devraient la soutenir, la démolissent. Ils la frappent et vont jusqu'à la diffamer. Le seul remède pour moi est de faire couler beaucoup de Sang pour en former comme un bain afin de pouvoir laver cette boue putride et guérir ces blessures profondes. Lorsque, par ce Sang, ces personnes seront guéries, fortifiées et belles, elles pourront être des instruments capables de maintenir mon Église stable et ferme.» Et il ajouta: «Je t'ai appelée pour te demander si tu veux être une victime et, ainsi, être une tutrice pour supporter cette colonne en ces temps si incorrigibles.»
En premier lieu, j'ai senti un frisson me traverser, car j'avais peur de ne pas avoir la force. Ensuite, je me suis offerte et je me suis vue entourée de plusieurs saints, anges et âmes du purgatoire qui, avec des fouets et d'autres instruments, me tourmentaient. Au début, j'ai eu peur. Par la suite, plus je souffrais, plus mon désir de souffrir augmentait, et je goûtais la souffrance comme un très doux nectar. Et il me vint cette pensée: «Qui sait? Peut-être que ces douleurs seront un moyen de consumer ma vie et de m'amener à prendre mon dernier envol vers mon unique Bien!»
Mais après avoir subi de dures souffrances, j'ai vu, à mon grand regret, que ces souffrances ne consumaient pas ma vie. Ô Dieu, quelle douleur de constater que cette fragile chair m'empêche de m'unir à mon éternel Bien!
Puis j'ai vu un massacre sanglant sur les gens qui étaient au bas de la colonne. Quelle horrible catastrophe! Ceux qui ne furent pas victimes étaient très peu nombreux. L'audace des ennemis alla aussi loin que de tenter de tuer le Saint-Père!
Ensuite, il me sembla que ce sang versé et ces victimes constituaient le moyen de rendre forts ceux qui restaient, de telle manière qu'ils devinrent aptes à soutenir la colonne sans qu'elle vacille. Ah! que d'heureux jours se levèrent par la suite! Des jours de triomphe et de paix. La face de la terre sembla renouvelée. La colonne acquit son lustre et sa splendeur première. À distance, je salue ces heureux jours qui vont donner tant de gloire à l'Église et tant d'honneur à ce Dieu qui en est la tête!
3 novembre 1899
Ce matin, mon aimable Jésus vint et me transporta hors de mon corps à l'intérieur d'une église, puis il me laissa là, seule. Me trouvant en présence du Très Saint Sacrement, je fis mon adoration coutumière. Ce faisant, j'étais tout yeux pour voir si je n'apercevrais pas mon doux Jésus. Justement, je l'ai vu sur l'autel sous la forme d'un enfant qui m'appelait de ses gracieuses petites Mains. Qui aurait pu décrire mon contentement? J'ai volé vers lui et, sans autre pensée, je l'ai serré dans mes bras et je l'ai embrassé.
Mais pendant ces simples gestes, il prit un aspect sérieux, me montra qu'il n'appréciait pas mes baisers et commença à me repousser. Cependant, ne prêtant pas attention à cela, je continuai et lui dis: «Mon cher Amour, l'autre jour tu voulus te manifester à moi avec des baisers et des embrassades et je t'ai accordé toute liberté. Aujourd'hui, c'est moi qui veux me manifester à toi. Ah! accorde-moi la liberté de le faire!»
Cependant, il continuait de me repousser. Voyant que je ne cessais pas, il disparut. Qui pourrait dire combien je fus mortifiée et anxieuse quand je me suis retrouvée en mon corps? Un peu plus tard, il revint. Comme je désirais lui demander pardon pour mes impertinences, il me pardonna en me manifestant sa tendresse. Il me dit en m'embrassant: «Délice de mon coeur, ma Divinité habite en toi continuellement. Comme tu inventes de nouvelles choses pour faire mes délices, ainsi je veux faire envers toi.» Ainsi, j'ai compris que c'était une blague qu'il m'avait faite.
4 novembre 1899
Mon Jésus ne s'étant pas présenté ce matin, le démon a essayé de se montrer à moi en prenant l'aspect de Jésus. N'ayant pas perçu les effets habituels, j'ai commencé à avoir des doutes. Je me suis signée, puis j'ai tracé le signe de la croix sur lui. Se voyant signé, le démon trembla. Je l'ai immédiatement repoussé, sans le regarder.
Un peu plus tard, mon cher Jésus vint. Mais, ayant peur que ce soit encore l'esprit malin, j'ai essayé de le repousser en invoquant l'aide de Jésus et de Marie. Pour me rassurer, Jésus me dit: «Ma fille, pour détecter si c'est moi ou non, ton attention doit se porter sur les effets intérieurs que tu ressens, en te demandant s'ils te poussent à la vertu ou au vice car, étant vertu, ma Nature ne peut communiquer à mes enfants rien d'autre que des choses vertueuses.»
6 novembre 1899
Mon adorable Jésus me transporta hors de mon corps et me montra des rues remplies de chair humaine. Quel carnage! Je suis horrifiée rien que d'y penser. Il me montra quelque chose qui était arrivé dans les airs; beaucoup moururent soudainement. Cela se passait dans le mois de mars.
Selon mon habitude, je l'ai prié de garder son calme et de protéger ses propres images de tourments si cruels et de guerres si sanglantes. Comme il portait sa couronne d'épines, je la lui ai prise et l'ai placée sur ma propre tête, dans le but de l'apaiser. Mais, à mon grand chagrin, j'ai vu que presque toutes les épines étaient restées cassées sur sa Tête très sainte, de sorte qu'il n'en restait que très peu pour me faire souffrir.
Jésus se montra sévère, sans presque m'accorder d'attention. Il me ramena dans mon lit, et je me suis vue les bras étendus et souffrant les douleurs de la crucifixion. Il prit mes bras, les croisa et les attacha avec une petite corde dorée. Sans chercher à comprendre la signification de cela, et pour briser son air sévère, je lui dis: «Mon très doux Amour, je t'offre les gestes de mon corps, gestes que toi-même as faits, et tous les autres gestes que je pourrai faire dans le seul but de te plaire et de te glorifier. Ah oui! je désire que les mouvements de mes paupières, de mes lèvres et de tout mon être soient faits uniquement pour te plaire! Accorde, ô bon Jésus, que tous mes os et mes nerfs témoignent continuellement de mon amour pour toi!»
Il me dit: «Tout ce qui est fait dans le but de me plaire uniquement brille tellement devant moi qu'il attire mon divin Regard. J'aime tant ces actes, même si ce n'est que de bouger une paupière, que je leur donne la valeur qu'ils auraient si je les faisais moi-même. Au contraire, les actes bons en eux-mêmes, et même grands, qui ne sont pas faits pour moi seul, sont comme des ors rouillés, éclaboussés, qui ne brillent pas; je ne leur accorde même pas un regard!»
Alors je dis: «Ah! Seigneur! Comme il est facile à la poussière de souiller nos actions!» Et Jésus reprit: «On ne doit pas remarquer la poussière car elle sera secouée. Ce qu'on doit remarquer, c'est l'intention.»
Pendant qu'il disait cela, Jésus attacha mes bras. Je lui dis: «Ô Seigneur, que fais-tu?» Il répondit: «Je fais cela parce que, lorsque tu es dans la position de la crucifixion, tu m'apaises. Et comme je veux châtier les personnes, je t'attache ainsi les bras.» Ayant dit cela, il disparut.
10 novembre 1899
Pendant plusieurs jours, je fus en opposition avec Jésus parce que je lui demandais d'être libérée et qu'il ne le voulait pas. Tantôt il se montrait endormi, tantôt il m'imposait le silence. Ce matin, mon confesseur me commanda plus d'une fois de demander à Jésus de me libérer. Mais Jésus ne faisait pas attention.
Contrainte par l'obéissance, je dis à Jésus: «Mon aimable Jésus, quand as-tu contrevenu à l'obéissance? Ce n'est pas moi qui veux être libérée, c'est le confesseur qui veut que tu cesses de me faire souffrir la crucifixion. Condescends donc à cette vertu d'obéissance si prédominante chez toi, cette vertu qui tissa ta Vie toute entière et qui te conduisit à ton Sacrifice sur la Croix.»
Jésus répondit: «Tu veux vraiment me faire violence en te prévalant de l'anneau de l'obéissance, celui qui a uni mon Humanité à ma Divinité!» Comme il disait cela, il prit l'aspect du Crucifié et il partagea avec moi les douleurs de la crucifixion. Que le Seigneur soit toujours béni et que tout soit fait pour sa Gloire!
Puis je me sentis comme libérée.
11 novembre 1899
Alors que j'étais dans mon état habituel, je me trouvai subitement hors de mon corps et il me sembla que je circulais partout sur la terre. Oh! comme elle était inondée d'iniquités. C'était horrible à voir!
À un endroit, je trouvai un prêtre menant une vie sainte et, à un autre, une vierge dont la vie était sainte et sans faute. Tous les trois avons échangé sur les nombreux châtiments que le Seigneur inflige et sur les nombreux autres qu'il s'apprête à infliger. Je leur dis: «Que faites-vous? Êtes-vous ajustés à la Justice divine?»
Ils me répondirent: «Nous sommes conscients de toute la gravité de ces tristes temps et de ce que l'homme ne se rendra pas, même si un apôtre était suscité ou si le Seigneur envoyait un autre saint Vincent Ferrier qui, par des miracles et de grands signes, essayait de l'amener à la conversion. L'homme a atteint une telle obstination et un tel degré d'insanité que même des miracles ne le feraient pas bouger de son incrédulité. Ainsi, par stricte nécessité, pour le bien de l'homme, pour endiguer cette mer pourrie qui inonde la terre, et pour la gloire de notre Dieu si outragé, l'humanité est confrontée à la Justice. Nous ne pouvons que prier et nous offrir comme victimes pour que ces châtiments amènent la conversion des peuples.»
Et ils ajoutèrent: «Et toi, que fais-tu? N'es-tu pas ajustée à la Justice divine comme nous?» Ce à quoi je répondis: «Ah non! je ne le peux pas. L'obéissance m'en empêche, bien que Jésus l'aimerait bien. Et comme l'obéissance doit prévaloir par-dessus tout, il est nécessaire pour moi d'être en opposition avec Jésus béni, ce qui m'afflige beaucoup.» Ils reprirent: «Il faut se conformer à l'obéissance.»
Après cela, je revins en mon corps alors même que je n'avais pas encore vu mon très cher Jésus. Je voulus savoir de quelle partie du monde ce prêtre et cette vierge étaient. Jésus me dit qu'ils étaient du Pérou.
12 novembre 1899
Ce matin, mon aimable Jésus vint et me transporta hors de mon corps. Et j'ai vu quelque chose qui allait être déplacé du ciel pour toucher la terre. J'étais si effrayée que j'ai crié en disant: «Ah! que fais-tu Seigneur? Quelle destruction surviendra si cela arrive! Tu dis que tu m'aimes et tu veux m'effrayer? Ne fais pas cela! Non, non! Tu ne peux pas faire cela! Je ne le veux pas!»
Compatissant, Jésus me dit: «Ma fille, n'aie pas peur! Quand donc accepteras-tu que je fasse quelque chose? Faudrait-il que je ne te laisse rien voir quand je châtie les gens? Je vais fortifier ton coeur comme un tronc d'arbre afin que tu sois capable de supporter ce que tu vois.»
À ce moment, il sortit de mon coeur comme un tronc d'arbre. Au sommet, il y avait deux branches qui formaient comme une fourche. L'une des branches s'éleva dans les airs et s'empara de ce qui se déplaçait. Ainsi, la chose fut arrêtée. L'autre branche semblait toucher le sol.
Ensuite, je revins en mon corps. J'ai prié Jésus de s'apaiser. Il me sembla s'être si bien rendu à ma demande qu'il me partagea les douleurs de la Croix. Puis il disparut.
13 novembre 1899
Ce matin, mon adorable Jésus semblait agité. Il ne faisait qu'aller et venir. À un moment, il restait avec moi. Au moment d'après, comme attiré par son ardent Amour envers les créatures, il allait voir ce qu'elles faisaient. Il sympathisait beaucoup avec elles sur ce qu'elles souffraient, à tel point qu'il était pris par leurs souffrances plus qu'elles-mêmes.
Plusieurs fois, par ses pouvoirs sacerdotaux, mon confesseur contraignit Jésus à me faire souffrir ses douleurs afin qu'il soit apaisé par mes souffrances. Quoique Jésus semblait ne pas vouloir être apaisé, il devenait reconnaissant par la suite et, de bon coeur, remerciait le prêtre de s'être occupé d'arrêter son Bras vengeur. Il me faisait partager une souffrance, puis une autre. Oh! qu'il était émouvant de le voir dans cet état! Cela brisait mon coeur de compassion. Plusieurs fois il me dit:
«Conforme-toi à ma Justice, car je ne peux plus la retenir. Ah! l'homme est trop ingrat! De tous côtés, il me contraint à le châtier; il m'arrache lui-même les châtiments des mains. Si tu savais comme je souffre quand je déploie ma Justice. Mais c'est l'homme lui-même qui me force. Par le fait que j'ai acheté sa liberté au prix de mon Sang, il devrait m'être reconnaissant. Mais, au contraire, pour me faire un plus grand mal, il invente de nouvelles manières de rendre mon Sang inutile.»
Pendant qu'il disait cela, il pleurait amèrement. Pour le consoler, je lui dis: «Mon doux Bien, ne t'afflige pas. Je vois que ton affliction est davantage reliée à la nécessité que tu ressens de châtier les gens. Ah non! Puisse-t-il n'en jamais être ainsi. Puisque tu es tout pour moi, je veux être tout pour toi. En conséquence, envoie tes châtiments sur moi. Je suis une victime toujours à ta disposition. Tu peux me faire souffrir tout ce que tu voudras. Ainsi, ta Justice sera apaisée de quelques degrés et tu seras réconforté dans les afflictions que tu ressens en voyant souffrir les créatures. J'ai toujours été contre l'application de ta Justice car, lorsque l'homme souffre, tu souffres plus que lui.»
17 novembre 1899
Mon aimable Jésus continuait à se montrer affligé. Ce matin, notre Reine Maman vint avec lui. Il me sembla qu'elle m'amenait Jésus pour que je l'apaise et qu'avec elle je le prie de me faire souffrir pour sauver les gens. Il me dit que ces jours derniers, si je ne m'étais pas interposée pour empêcher l'application de sa Justice, et si le confesseur n'avait pas usé de ses pouvoirs sacerdotaux pour lui demander de me faire souffrir, conformément à ses intentions, plusieurs catastrophes seraient arrivées.
À cet instant, j'ai vu le confesseur et j'ai immédiatement prié Jésus et la Reine Mère pour lui. Tout tendre, Jésus dit: «Dans la mesure où il prendra soin de mes intérêts en me priant et en s'engageant à renouveler les autorisations pour que je puisse te faire souffrir dans le but d'épargner les gens, alors je prendrai soin de lui et je l'épargnerai. Je suis prêt à faire cet arrangement avec lui.»
Après cela, je regardai mon doux Bien. J'ai vu qu'il tenait deux éclairs dans ses Mains. L'une représentait un grand tremblement de terre et l'autre, une guerre accompagnée de beaucoup de morts subites et de maladies contagieuses. Je l'ai prié pour qu'il verse sur moi ces éclairs; je voulais presque les prendre de ses Mains. Mais, pour m'empêcher de les prendre, il s'éloigna de moi. J'ai essayé de le suivre et, ainsi, je me suis retrouvée hors de mon corps. Jésus disparut et je restai seule.
Alors, je suis allée faire un tour et je me suis retrouvée dans des endroits où c'était la saison des récoltes. Il semblait qu'il y avait là des bruits de guerre. Je voulais m'y rendre pour aider les personnes, mais les démons m'empêchaient d'aller où ces choses étaient sur le point d'arriver. Ils me frappaient pour m'empêcher d'aider les gens. Il usèrent de tant de violence qu'ils me forcèrent à reculer.
19 novembre 1899
Mon adorable Jésus vint. Avant son arrivée, mon esprit pensait à certaines choses qu'il m'avait dites dans les années passées (et dont je ne me souvenais plus très bien). Un peu pour me les rappeler, il me dit: «Ma fille, l'orgueil ronge la grâce. Dans le coeur des orgueilleux, il n'y a que le vide rempli de fumée, ce qui produit l'aveuglement. L'orgueil fait d'une personne sa propre idole. L'orgueilleux n'a pas son Dieu en lui-même; par le péché, il le détruit dans son coeur. En érigeant un autel dans son coeur, il se place au-dessus de Dieu et il s'adore.»
Ô Dieu, quel abominable monstre est ce vice! Il me semble que si l'âme était attentive à ne pas le laisser entrer en elle, elle serait libre de tout autre vice. Mais si, pour sa plus grande infortune, elle se laisse dominer par cette monstrueuse mère, celle-ci donne naissance à tous ses enfants ingouvernables que sont les autres péchés. Ô Seigneur, préserve-moi de l'orgueil!
21 novembre 1899
Ce matin, mon très aimable Jésus venait tout juste d'arriver quand il m'a dit: «Ma fille, tout ton plaisir doit être de te regarder en moi. Si tu fais toujours cela, tu attireras en toi toutes mes qualités, ma physionomie et mes traits. En échange, mon plaisir et mon plus grand contentement seront de me regarder en toi.»
Ayant dit cela, il disparut. Alors que je réfléchissais à ce qu'il venait de me dire, il revint soudain. Mettant sa sainte Main sur ma tête, il tourna ma face vers la sienne et ajouta: «Aujourd'hui, je veux me réjouir un peu en me regardant en toi.»
Ainsi, dans un grand frisson, je revis toute ma vie. Une telle terreur s'empara de moi que je me sentis mourir, car je vis qu'il me regardait très intensément, se regardant en moi, désirant se réjouir dans mes pensées, mes regards, mes paroles et tout le reste. Je me suis dit en mon intérieur: «Ô Dieu, est-ce que je te réjouis ou est-ce que je t'aigris?».
À ce moment, notre chère Reine Maman vint à mon aide. Tenant une robe très blanche dans ses Mains, elle me dit avec beaucoup d'amabilité: «Ma fille n'aie pas peur. Je veux t'habiller de mon Innocence. De cette manière, se regardant en toi, mon cher Fils trouvera en toi les plus grandes délices que l'on puisse trouver chez une créature humaine.»
Elle m'habilla avec cette robe et me présenta à mon cher Bien en lui disant: «Mon cher Fils, accepte-la à cause de moi, et réjouis-toi en elle.» Toutes mes peurs me laissèrent et Jésus se réjouit en moi et moi en lui.
24 novembre 1899
Ce matin, mon doux Jésus vint et me transporta hors de mon corps. Le voyant rempli d'amertume, je l'ai supplié de verser cette amertume en moi. Mais, même si je l'ai beaucoup prié, je n'arrivais pas à obtenir qu'il le fasse. Cependant, ma respiration devint amère, puisque je m'étais approchée de sa Bouche pour recevoir son amertume.
Pendant ce temps, j'ai vu un prêtre qui mourait. Je n'étais par sûre de son identité, compte tenu de ce que j'avais une intention de prière pour un prêtre malade. Je ne pouvais pas savoir si c'était lui ou un autre. Et j'ai dit à Jésus: «Seigneur, que fais-tu? Ne vois-tu pas le manque de prêtres qu'il y a dans Corato pour que tu veuilles nous en prendre un autre!»
Sans faire attention à moi et avec une main menaçante, Jésus dit: «Je les détruirai! J'en détruirai encore plus!»
26 novembre 1899
Pendant que j'étais très souffrante, mon aimable Jésus vint. Il mit son Bras derrière mon cou comme pour me soutenir. Étant tout près de lui, j'ai voulu adorer ses saints Membres, en commençant par sa très sainte Tête. À ce moment, il me dit: «Ma bien-aimée, j'ai soif. Laisse-moi étancher ma soif dans ton amour, car je ne peux plus me retenir.» Alors, prenant l'aspect d'un enfant, il se plaça dans mes bras, commença à se nourrir, et sembla même prendre un très grand plaisir à cela. Il en fut complètement rafraîchi et désaltéré.
Ensuite, voulant presque jouer avec moi, il traversa mon coeur de part en part avec une lance qu'il tenait dans sa Main. J'en ai ressenti une douleur très grande, mais j'étais très contente de souffrir, spécialement parce que c'était par les Mains de mon seul et unique Bien! Je l'ai invité à me faire souffrir par de plus grandes déchirures encore car, de là, provenait le plaisir et la douceur que je goûtais.
Pour me rendre plus heureuse, Jésus déchira mon coeur, le prit dans ses Mains et, avec la même lance, le coupa au milieu et y trouva une croix très blanche et resplendissante. La prenant dans ses Mains, il se réjouit grandement et me dit: «L'amour et la pureté avec lesquels tu as souffert ont produit cette croix. Je me réjouis beaucoup de la manière dont tu souffres; non seulement moi, mais aussi le Père et le Saint-Esprit.»
En un instant, j'ai vu les trois Personnes divines qui, m'entourant, se réjouissaient en regardant cette croix. Mais je me suis plainte en disant: «Grand Dieu, ma souffrance est trop petite; je ne suis pas contente avec seulement la croix, je veux aussi les épines et les clous; et si je ne les mérite pas parce que je suis indigne et pécheresse, vous pouvez certainement me donner les dispositions pour que je les mérite.»
M'envoyant un rayon de lumière intellectuelle, Jésus me fit comprendre qu'il voulait que je confesse mes péchés. Je me suis sentie presque anéantie devant les trois Personnes divines, mais l'Humanité de Notre-Seigneur infusa en moi la confiance. Me tournant vers lui, j'ai dit le confiteor puis j'ai commencé à confesser de mes péchés. Comme je me trouvais toute plongée dans mes misères, une voix vint du milieu d'eux et me dit: «Nous te pardonnons. Ne pèche plus.»
J'ai cru que j'allais recevoir l'absolution de Notre-Seigneur mais, le moment venu, il disparut. Un peu plus tard, il revint sous la forme du Crucifié et partagea avec moi les douleurs de la Croix.
27 novembre 1899
Ce matin, mon cher Jésus n'est pas venu. Après beaucoup de difficultés, je l'ai à peine entrevu. Pour me plaindre de son retard, je lui ai dit: «Seigneur béni, pourquoi as-tu tant tardé? Peut-être as-tu oublié que je ne peux être sans toi? Aurais-je perdu ta grâce, pour que tu ne viennes plus?»
Interrompant mon discours plaintif, il me dit: «Ma fille, sais-tu ce que fait ma grâce? Ma grâce rend heureux les âmes qui ont la vision béatifique de même que les voyageurs sur la terre, avec cette différence: les âmes qui ont la vision béatifique jouissent et se réjouissent elles-mêmes et les voyageurs sur la terre travaillent à ma promotion. Celui qui possède la grâce porte en lui le Paradis, car posséder la grâce n'est rien d'autre que de me posséder. Et puisque moi seul suis l'objet enchanteur qui enchante tout le Paradis et qui forme tout le bonheur des bienheureux, en possédant la grâce, l'âme possède son Paradis où qu'elle soit.»
28 novembre 1899
Mon délicieux Jésus vint, plein d'affabilité. Il était comme un ami intime qui fait beaucoup de compliments à son ami et lui témoigne son amour. Les premiers mots qu'il me dit furent: «Ma bien-aimée, si tu savais seulement combien je t'aime! Je me sens puissamment attiré à t'aimer. Mes simples délais à venir me demandent beaucoup d'efforts et sont de nouvelles raisons qui me font venir te remplir de grâces nouvelles et de charismes célestes. Si tu pouvais comprendre combien je t'aime, ton propre amour te paraîtrait comme imperceptible comparativement au mien.»
Je lui dis: «Mon doux Jésus, ce que tu dis est vrai, mais moi aussi je t'aime beaucoup. Et si tu dis que mon amour comparé au tien est à peine perceptible, c'est parce que ta Puissance est sans limite et la mienne très limitée. Je ne peux faire que ce qui m'est donné par toi. Ceci est tellement vrai que lorsque me vient le désir de souffrir davantage pour mieux te témoigner le grand amour que j'ai pour toi, si tu ne me concèdes pas de souffrir, cela n'est pas en mon pouvoir et je suis contrainte à me résigner à être inutile, comme je l'ai toujours été par moi-même. La souffrance est en ton Pouvoir. Quelle que soit la manière que tu veuilles utiliser pour me manifester ton Amour, tu peux le faire quand tu le veux. Mon Bien-aimé, donne-moi le même pouvoir que toi et je te montrerai ce que je sais faire pour te manifester mon amour. Dans la mesure où tu me donnes ton Amour, dans la même mesure je te donnerai le mien.»
Il écoutait avec grand plaisir mes paroles insensées et, presque pour me mettre à l'épreuve, il me transporta hors de mon corps à l'entrée d'un endroit profond, noir et plein de feu liquide (la simple vue de cet endroit me causait horreur et frayeur). Il me dit: «Voici le purgatoire où sont rassemblées de nombreuses âmes. Tu iras dans cet endroit pour souffrir et libérer ces âmes qui me plaisent; tu le feras par amour pour moi.»
Un peu en tremblant, je lui dis: «Pour ton Amour, je suis prête à tout; mais tu dois venir avec moi parce que, si tu me laisses, je ne serai pas capable de te trouver et tu me feras beaucoup pleurer.» Il répondit: «Si je vais avec toi, que sera ton purgatoire? Avec ma présence, tes douleurs seront changées en joies et en contentements.» Je lui dis: «Je ne veux pas y aller seule. Nous irons dans ce feu ensemble, tu seras derrière moi; ainsi je ne te verrai pas et j'accepterai cette souffrance.»
J'allai donc dans ce lieu rempli de denses ténèbres. Il se mit derrière moi. Effrayée qu'il puisse me laisser, je pris ses Mains et je les tenais pressées dans mon dos. Qui pourrait décrire les douleurs que ces âmes souffrent? Elles sont certainement inexplicables à des personnes vêtues de chair humaine. Par ma présence dans ce feu, ces douleurs furent amoindries et les ténèbres furent dissipées. Beaucoup d'âmes sortirent, et les autres furent soulagées. Après avoir été là pendant environ un quart d'heure, nous quittâmes.
Cependant, Jésus gémissait beaucoup. Je lui dis: «Dis-moi, mon Bien, pourquoi gémis-tu? Ma chère Vie, j'en suis peut-être la cause; c'est peut-être parce que je ne voulais pas aller dans cet endroit de douleurs? Dis-moi, dis-moi, as-tu beaucoup souffert en voyant souffrir ces âmes? Que ressens-tu?»
Il me répondit: «Ma bien-aimée, je me sens tout rempli d'amertume, si bien que je ne peux plus les contenir; je suis près de les verser sur la terre.» Je lui dis: «Non, non, mon doux Amour, tu les verseras sur moi, ne veux-tu pas?» Je me suis donc approchée près de sa Bouche et il versa dans la mienne une liqueur très amère et en telle abondance que je ne pouvais la contenir. Je le priai pour qu'il me donne la force de la garder. Autrement, j'aurais fait ce que je ne voulais pas qu'il fasse, c'est-à-dire que je l'aurais versée sur la terre et j'aurais beaucoup regretté d'avoir fait cela.
Il semble qu'il me donna la force, même si les souffrances étaient si grandes que je me sentais faiblir. Me prenant dans ses Bras, Jésus me soutint et me dit: «Avec toi, on doit nécessairement se soumettre. Tu deviens si importune que je me sens obligé de te contenter.»
30 novembre 1899
Mon adorable Jésus vint comme à l'accoutumée. Cette fois, je l'ai vu quand il était à la colonne. Se détachant par lui-même, il se jeta dans mes bras pour être pris en pitié. Je l'ai pressé sur moi et j'ai commencé à sécher et à placer ses Cheveux tout encroûtés de Sang. Je les baisais, de même que ses Yeux et sa Face, et je faisais des actes variés de réparation. Quand j'arrivai à ses Mains et que je lui enlevai la chaîne, avec grand étonnement, j'ai remarqué que, même si la Tête était celle de Jésus, les membres étaient de beaucoup d'autres personnes, religieuses spécialement. Oh! combien étaient nombreux les membres infectés donnant plus de ténèbres que de lumière!
Sur la gauche étaient ceux qui faisaient souffrir le plus Jésus. Il y avait là des membres malades, pleins de blessures profondes remplies de vers, et d'autres qui étaient rattachés à ce corps à peine par un nerf. Ah! comme cette Tête divine souffrait et vacillait au-dessus de ces membres! Sur le côté droit se tenaient ceux qui étaient mieux, c'est-à-dire, les membres sains, resplendissants, couverts de fleurs et de rosée céleste, et dégageant de délicieuses odeurs.
La Tête divine, au-dessus des membres, souffrait beaucoup. C'est vrai qu'il y avait des membres resplendissants qui étaient comme de la lumière pour la Tête, qui la ravivaient et lui donnaient une très grande gloire, mais le plus grand nombre étaient des membres infectés.
Ouvrant sa très douce Bouche, Jésus me dit: «Ma fille, combien de douleurs ces membres me donnent! Ce corps que tu vois est le corps mystique de mon Église, duquel je me glorifie d'être la Tête. Mais quelles déchirures cruelles ces membres font dans le corps. Il semble qu'ils se stimulent l'un l'autre à me tourmenter davantage.»
Il m'a dit d'autres choses sur ce corps, mais je ne me souviens plus très bien. Aussi, je m'arrête ici.
2 décembre 1899
Pendant que j'étais très affligée à cause de certaines choses qu'il ne m'est pas permis de dire ici, mon aimable Jésus, désirant me réconforter, vint d'une manière toute nouvelle. Il me sembla habillé de bleu ciel, tout orné de petites clochettes d'or qui tintaient quand elles se frappaient entre elles et qui émettaient un son jamais encore entendu. À ce spectacle et au son charmant des clochettes, je me suis sentie enchantée et soulagée de mon affliction qui, comme une fumée, se dissipa.
Je serais restée là en silence (les puissances de mon âme étaient tellement étonnées), si Jésus béni n'avait pas brisé le silence en me disant: «Ma fille bien-aimée, ces clochettes sont autant de voix qui te parlent de mon Amour et qui t'invitent à m'aimer. Maintenant, laisse-moi voir combien de clochettes tu as qui me parlent de ton amour et qui m'appellent à t'aimer!»
En rougissant, je lui dis: «Oh! Seigneur, que dis-tu? Je n'ai rien, sinon mes défauts habituels.» Prenant pitié de ma misère, il poursuivit: «Tu n'as rien, c'est vrai, mais je veux t'orner de mes propres clochettes pour que tu aies plein de voix avec lesquelles m'appeler et me montrer ton amour.»
Ensuite, il me sembla qu'il entourait ma taille d'une bande décorée de ces petites clochettes. Puis, je restai silencieuse. Il ajouta: «Aujourd'hui, j'ai le plaisir de rester avec toi; dis-moi quelque chose.» Je lui dis: «Tu sais que tout mon contentement est d'être avec toi! Quand je t'ai, j'ai tout! Quand je te possède, il me semble que je n'ai rien d'autre à désirer ou à dire.»
Il poursuivit: «Fais-moi entendre ta voix qui réjouit mon Ouïe. Conversons ensemble un peu. Je t'ai souvent parlé de la croix. Aujourd'hui, laisse-moi t'entendre m'en parler.»
Je me suis sentie toute confuse. Je ne savais pas quoi dire. Mais lui, pour m'aider, m'envoya un rayon de lumière intellectuelle, et j'ai commencé à dire: «Mon Bien-Aimé, qui peut te dire ce qu'est la croix et ce qu'elle fait? Seulement ta Bouche peut parler dignement de la sublimité de la croix! Mais puisque tu veux que je t'en parle, je le ferai.
«La croix soufferte par toi, Jésus-Christ, me libère de l'esclavage du démon et m'unit à la Divinité par un lien indissoluble. La croix est fertile et donne naissance à la grâce en moi. La croix est légère, elle me désillusionne du temporel et me dévoile l'éternité. La croix est un feu qui réduit en cendres tout ce qui n'est pas de Dieu, jusqu'à vider le coeur de toute petite poussière qui pourrait s'y trouver.
«La croix est une monnaie d'une valeur inestimable. Si j'ai la bonne fortune de la posséder, je deviens enrichie d'une monnaie éternelle apte à faire de moi la plus riche du Paradis, car la monnaie qui circule dans le Ciel provient des croix souffertes sur la terre.
«La croix m'amène à me connaître moi-même. Elle me donne aussi la connaissance de Dieu. La croix greffe sur moi toutes les vertus. La croix est le noble siège de la Sagesse incréée qui m'enseigne les doctrines les plus hautes, les plus subtiles et les plus sublimes. Elle me dévoile les mystères les plus secrets, les choses les plus cachées, les perfections les plus parfaites, toutes choses cachées aux plus savants et aux plus sages du monde.
«La croix est cette eau bienfaisante qui me purifie et qui nourrit en moi les vertus. Elle les fait croître. Elle me quitte après m'avoir conduite à la vie éternelle.
«La croix est cette céleste rosée qui préserve et embellit en moi le beau lys de la pureté. La croix nourrit l'espérance. La croix est le flambeau de la foi agissante. La croix est ce bois solide qui préserve et maintient toujours enflammé le feu de la charité. La croix est ce bois sec qui fait s'évanouir et se disperser la fumée de l'orgueil et de la vaine gloire, et qui produit dans l'âme l'humble violette de l'humilité.
«La croix est l'arme la plus puissante pour assaillir les démons et me défendre de toutes leurs emprises. L'âme qui possède la croix fait l'envie et l'admiration de tous les anges et de tous les saints, et la rage et la colère des démons. La croix est mon paradis sur la terre, tel que si le Paradis d'en haut est jouissance, celui d'ici-bas est souffrance.
«La croix est la chaîne d'or très pur qui me relie à toi, mon plus grand Bien, et qui forme la plus intime union qui puisse être en me faisant me transmuer en toi, mon Objet bien-aimé, jusqu'à ce que je me sente perdue en toi et que je vive de ta Vie même.»
Après que j'eus dit cela -- je ne sais si c'est un non-sens --, mon aimable Jésus se réjouit grandement et, pris par un transport d'Amour, me baisa partout et me dit: «Bravo, bravo, ma bien-aimée! Tu as bien parlé! Mon Amour est feu, mais pas comme un feu de la terre qui rend stérile tout ce qu'il pénètre et réduit tout en cendres. Mon Feu est fertile et rend stérile seulement ce qui n'est pas vertu. À tout le reste, il donne vie. Il fait germer de belles fleurs, donnant des fruits très exquis et formant le jardin céleste le plus délicieux.
«La croix est si puissante et je lui ai communiqué tant de grâces qu'elle est plus efficace que les sacrements eux-mêmes. Il en est ainsi parce que lorsqu'on reçoit le sacrement de mon Corps, les dispositions et le libre concours de l'âme sont nécessaires pour qu'on en reçoive mes grâces. Ils peuvent souvent manquer, tandis que la croix a la puissance de disposer l'âme à la grâce.»
21 décembre 1899
Ce matin, brisant un long silence, mon aimable Jésus me dit: «Je suis le réceptacle des âmes pures.» En me disant cela, il me donna une lumière intellectuelle qui me fit comprendre plusieurs choses sur la pureté. Mais je ne puis traduire en mots que très peu ou rien du tout de ce que je ressens dans mon intellect. Cependant, la très honorable dame obéissance veut que j'écrive quelque chose, même si ça risque de manquer de sens. Pour la contenter, elle seule, je dirai mes sottises sur la pureté.
Il m'apparaît que la pureté est le plus noble joyau qu'une âme puisse posséder. L'âme qui possède la pureté est investie d'une lumière candide. En la regardant, Dieu y voit sa propre Image. Il se sent tellement attiré par cette âme qu'il en tombe amoureux. Son Amour pour elle est si grand qu'il lui donne son Coeur très pur comme refuge. D'ailleurs, seulement ce qui est pur et sans tache peut entrer dans son Coeur.
L'âme qui possède la pureté garde en elle la splendeur première que Dieu lui a donnée au moment de sa création. Rien en elle n'est souillé ou ignoble. Comme une reine qui aspire aux noces du Roi céleste, cette âme préserve sa noblesse jusqu'à ce que la noble fleur qu'elle est soit transplantée dans le jardin céleste.
Cette fleur virginale a un parfum distinctif! Elle s'élève au-dessus de toutes les autres fleurs, au-dessus des anges eux-mêmes. Elle se distingue par une beauté différente, tellement que tous sont pris d'estime et d'amour pour elle! Ils la laissent passer librement pour qu'elle atteigne l'Époux divin. La première place auprès de Notre-Seigneur est donnée à cette noble fleur. C'est pourquoi Notre-Seigneur se réjouit tant de marcher au milieu de ces lys qui parfument et la terre et le Ciel. Il se plaît d'autant plus à être entouré de ces lys, qu'il est lui-même le premier, le plus noble et l'exemple de tous les autres.
Oh! comme il est beau de voir une âme vierge! Son coeur ne respire aucun autre souffle que celui de la pureté et de l'innocence. Elle n'est obscurcie par aucun amour qui n'est pas de Dieu. Même son corps dégage la pureté. Tout est pur en elle. Elle est pure dans ses pas, dans ses actions, dans son discours, dans ses regards, dans ses mouvements. Simplement à la regarder, on reçoit sa fragrance.
Quels charismes, quelles grâces, quel amour réciproque, quelles amoureuses ingénuités entre l'âme pure et son Époux Jésus! Seulement celui qui la côtoie peut en dire quelque chose. Cependant tout ne peut être dit. Et je ne sens pas que je sois habilitée à parler sur ce sujet. C'est pourquoi je fais silence et je passe.
22 décembre 1899
Ce matin, mon adorable Jésus n'est pas venu. Cependant, après avoir attendu un bon moment, il se montra plusieurs fois, mais très rapidement, presque comme l'éclair. Il semblait que je voyais une lumière plutôt que Jésus. De cette lumière, la première fois qu'il est venu, j'ai entendu une voix qui m'a dit: «Je t'attire de trois manières pour que tu m'aimes: par mes bienfaits, par mon attraction et par la persuasion.»
Qui pourrait dire combien de choses j'ai alors comprises? Par exemple que, pour attirer notre amour, Jésus béni fait descendre sur nous une pluie de bienfaits. Et voyant que cette pluie bienfaisante n'arrive pas à attirer notre amour, il va aussi loin que de se rendre plaisant et charmant. Et quels sont ses moyens d'attraction? Ce sont les douleurs souffertes par amour pour nous, allant jusqu'à mourir sur la Croix en répandant un déluge de Sang, où il devint si attrayant et si agréable que ses bourreaux et ses plus féroces ennemis tombèrent en amour avec lui. Et pour nous persuader davantage et pour rendre notre amour plus fort et plus stable, il nous a laissé la lumière de ses saints exemples et de sa doctrine céleste qui dissipe les ténèbres de cette vie et nous conduit au salut éternel.
La deuxième fois qu'il est venu, il m'a dit: «Je me manifeste aux âmes à travers la Puissance, les Nouvelles, et l'Amour. La Puissance est le Père Créateur; les Nouvelles sont la Parole; l'Amour est le Saint-Esprit.»
Il me semble que, par sa Puissance, Dieu se manifeste à l'âme à travers toute la Création. La Toute-Puissance de Dieu se manifeste à travers tous les êtres. Le ciel, les étoiles et tous les autres êtres nous parlent d'un Être suprême, d'un Être incréé et de sa Toute-Puissance. Le plus savant des hommes, avec toute sa science, ne peut même pas créer un vil rat. Et cela nous dit qu'il doit y avoir un Être incréé, un Être très puissant, qui a créé, qui a donné la vie et qui soutient tous les êtres. Oh! comme tout l'univers nous manifeste, en notes claires et en lettres indélébiles, Dieu et sa Toute-Puissance! Celui qui ne le voit pas est aveugle, et aveugle volontaire. Avec ses Nouvelles, il me semblait que Jésus béni, en descendant du Ciel, vint en personne sur la terre pour nous donner des nouvelles de ce qui est invisible pour nous. Par combien de voies ne s'est-il pas manifesté!
Oh! combien d'autres choses j'ai comprises, mais mes capacités de les décrire sont trop faibles. Je crois que chacun, par lui-même, comprend le reste. Aussi, je ne prolongerai pas sur ce sujet.
25 décembre 1899
J'ai passé un bon nombre de jours dans la presque totale privation de mon plus grand et seul Bien, dans l'aridité de coeur, sans être capable de pleurer sur la grande perte que je vivais, même si j'offrais cette aridité à Dieu en lui disant: «Seigneur, reçois cela comme un sacrifice de ma part. Toi seul peux ramollir mon coeur si dur.»
Finalement, après une longue période de souffrance, ma chère Maman Reine vint, portant sur son Sein l'Enfant céleste, tout tremblant et enveloppé d'un vêtement de toile. Elle le mit dans mes bras en me disant: «Ma fille, réchauffe-le de ton affection, car mon Fils est né dans la pauvreté extrême, dans un total abandon des hommes et dans la plus grande austérité.»
Ah! comme il était mignon dans sa céleste beauté! Je l'ai pris dans mes bras et je l'ai serré pour le réchauffer, car il avait froid, n'ayant sur lui qu'une simple couverture de toile.
Après que je l'eus réchauffé autant que je le pouvais, ouvrant ses Lèvres pourpres, mon tendre petit Bébé me dit: «Me promets-tu d'être toujours une victime par amour pour moi, comme je le suis par amour pour toi?»
Je lui répondis: «Oui mon petit Trésor, je te le promets.» Il poursuivit: «Je ne suis pas satisfait de seulement ta parole, je veux un serment et une signature avec ton sang.» Alors je lui dis: «Si l'obéissance le veut, je le ferai.»
Il sembla tout content et poursuivit: «À partir du moment de ma naissance, mon Coeur a toujours été offert en sacrifice pour glorifier le Père, pour la conversion des pécheurs et pour les personnes qui m'entouraient et qui étaient mes plus fidèles compagnons dans mes douleurs. Ainsi, je veux que ton coeur soit continuellement dans cette attitude, offert en sacrifice à ces trois fins.»
Comme il disait cela, la Reine Maman voulait l'Enfant pour le rafraîchir de son très doux Lait. Je le lui remis et elle exposa son Sein pour le porter à la Bouche du divin petit Garçon. Et moi, rusée, voulant faire une blague, je commençai à sucer avec ma bouche. Dès l'instant que je fis cela, ils disparurent, me laissant à la fois contente et peinée. Que tout soit pour la gloire de Dieu et pour la confusion de la misérable pécheresse que je suis.
27 décembre 1899
Il continuait de se montrer comme une ombre ou un éclair. Ainsi, je me retrouvai dans une mer d'amertume. Dans un court instant, il m'apparut en me disant: «La charité doit être comme un manteau qui recouvre toutes tes actions, de telle façon que tout en toi brille d'une parfaite charité. Que signifie ce déplaisir que tu ressens quand tu ne souffres pas? Il signifie que ta charité n'est pas parfaite, car souffrir par amour pour moi ou ne pas souffrir par amour pour moi (sans que ta volonté n'intervienne), c'est la même chose.»
Puis il disparut, me laissant plus amère qu'auparavant. C'est un sujet pour moi trop délicat pour que j'en parle ici. Après que j'eus pleuré des larmes amères sur mon état si misérable et aussi à cause de son absence, il revint et me dit: «Avec les âmes justes, j'agis avec justice. Beaucoup plus, je les récompense doublement pour leur justice en les favorisant des plus grandes grâces et en leur donnant des grâces de justice et de sainteté.»
Je me trouvais si confuse et mauvaise que je n'ai pas osé dire un seul mot. Plutôt, j'ai continué à pleurer sur ma misère. Jésus, désirant infuser en moi la confiance, mit sa Main sous ma tête pour la tenir (car elle ne pouvait se tenir seule) et me dit: «N'aie pas peur. Je suis le bouclier des combattants et des affligés.» Puis il disparut.
30 décembre 1899
Comme ce matin l'obéissance m'avait demandé de prier pour une personne, dès que j'ai vu Jésus, je lui ai recommandé cette personne. Il me dit: «L'humiliation ne doit pas seulement être acceptée, mais on doit aussi l'aimer. On doit pour ainsi dire la mâcher comme de la nourriture. Comme c'est le cas pour la nourriture amère, plus on la mâche, plus on en goûte l'amertume. Bien mâchée, l'humiliation donne naissance à la mortification. Et ces deux moyens, l'humiliation et la mortification, sont très puissants pour surmonter certains obstacles et obtenir les grâces nécessaires.
Comme la nourriture amère, l'humiliation et la mortification semblent nuisibles à la nature humaine et semblent apporter du mal plutôt que du bien. Cependant, il n'en est pas ainsi. Plus le fer est battu sur l'enclume, plus il étincelle et devient purifié. Il en va ainsi pour l'âme qui veut vraiment marcher sur la voie du bien. Plus elle est humiliée et battue sur l'enclume de la mortification, plus il en jaillit des étincelles de feu céleste et plus elle est purifiée.»
1er janvier 1900
Je me trouvais très affligée par la privation de mon plus grand et seul Bien. Après l'avoir longuement attendu, je l'ai finalement vu venir dans l'intérieur de mon coeur. Il pleurait. Il me fit comprendre combien il souffrit et s'humilia lui-même quand il fut circoncis. Cela me causa une grande souffrance, car je me suis sentie absorbée par son amertume. Compatissant avec moi, le petit Bébé béni me dit:
«Plus l'âme est humiliée et se connaît elle-même, plus elle s'approche de la Vérité. Dans la Vérité, elle cherche à suivre le chemin des vertus, duquel elle se sent très éloignée. Et, sur ce chemin, elle perçoit la distance qu'elle a encore à parcourir parce que ce chemin est sans fin. Il est infini comme je suis infini.
L'âme qui est dans la Vérité cherche toujours à se perfectionner, mais elle n'arrive jamais à se trouver parfaite. Cela l'amène à travailler continuellement, à se perfectionner toujours davantage, sans perdre de temps dans l'oisiveté. Et moi, bénissant ce travail, petit à petit, je fais les retouches pour peindre en elle mon image. C'est pourquoi j'ai voulu être circoncis: je voulais donner l'exemple de la plus grande humilité, ce qui stupéfia même les anges du Ciel.»
3 janvier 1900
Je continuais de me voir non seulement remplie de misères, mais j'étais également inquiète. Tout mon intérieur était en effervescence à cause de la perte de Jésus. Je réfléchissais en moi-même en me disant que mes grands péchés m'avaient mérité que Jésus me laisse et que, par conséquent, je ne le verrai jamais plus. Oh! quelle mort cruelle c'était pour moi, plus cruelle que toute autre! J'étais terriblement accablée de ne plus voir Jésus, de ne plus entendre sa douce Voix, d'avoir perdu celui de qui ma vie dépendait, de qui me venait tout bien! Comment vivre sans lui? Ah! ayant perdu Jésus, tout était fini pour moi!
Noyée dans ces pensées, je me suis sentie dans une agonie mortelle et tout mon intérieur était bouleversé. Je voulais tellement Jésus! Alors, dans un éclat de lumière, il se manifesta à mon âme et me dit: «Paix, paix! Ne te trouble pas. De même qu'une fleur très odorante parfume le lieu où elle est placée, ainsi la paix de Dieu remplit l'âme qui la possède.» Puis il s'enfuit comme l'éclair.
Ah! Seigneur, comme tu es bon avec la pécheresse que je suis. Avec confiance, je te dis: «Ah! comme tu es singulier! Même si je suis en train de te perdre, tu ne veux pas que je sois troublée ou alarmée. Et, si je le suis, tu me fais comprendre que je m'éloigne ainsi de toi car, avec la paix, je me remplis de Dieu; et, dans le trouble, je me remplis de tentations diaboliques. Oh! mon doux Jésus, quelle patience est nécessaire avec toi! Car peu importe ce qui m'arrive, tu ne veux même pas que je m'alarme ou me trouble; tu me veux d'un calme et d'une paix parfaites.»
5 janvier 1900
Alors que je me trouvais dans mon état habituel, je me suis sentie quitter mon corps et j'ai trouvé mon adorable Jésus. Mais, oh! comme je me suis vue remplie de péchés en sa présence! Intérieurement, j'ai senti un désir très fort de me confesser à Notre-Seigneur. Ainsi, me tournant vers lui, j'ai commencé à lui dire mes péchés. Il m'écoutait. Quand j'eus fini, il se tourna vers moi avec un air plein d'affliction et me dit:
«Ma fille, s'il est grave, le péché est un poison et une étreinte mortelle pour l'âme; et non seulement pour l'âme, mais aussi pour toutes les vertus qui s'y trouvent. S'il est véniel, c'est une étreinte qui blesse et qui rend l'âme faible et malade ainsi que les vertus qui s'y trouvent. Quel venin mortel est le péché! Seul, il peut blesser l'âme et lui donner la mort! Rien d'autre ne peut nuire à l'âme. Rien d'autre ne peut la rendre laide et haïssable devant moi. Seulement le péché.»
Comme il disait cela, j'ai compris la laideur du péché; j'ai ressenti une telle douleur que je ne sais pas comment l'exprimer. Jésus, me voyant toute torturée par la douleur, leva sa Main droite et prononça les paroles de l'absolution.
Et il ajouta: «Alors que le péché blesse l'âme et lui donne la mort, le sacrement de la confession lui redonne vie, guérit ses blessures, redonne vigueur à ses vertus et cela, plus ou moins, selon ses dispositions. C'est ainsi que travaille ce sacrement.»
Il me semblait que mon âme recevait une vie nouvelle. Après l'absolution de Jésus, je n'ai plus ressenti le trouble d'auparavant. Puisse le Seigneur être toujours remercié et glorifié!
6 janvier 1900
Ce matin, j'ai reçu la communion. Me retrouvant avec Jésus, j'ai aussi trouvé la Reine Maman. Et quelle merveille: en regardant la Mère, j'ai vu son Coeur transformé en Jésus bébé; j'ai regardé le bébé et j'ai vu la Mère dans son Coeur. Alors je me suis souvenue que c'était la fête de l'Épiphanie. À l'exemple des saints rois mages, j'aurais voulu offrir quelque chose à Jésus bébé. Mais je n'avais rien à lui donner.
Alors, à travers ma misère, la pensée me vint de lui offrir, comme myrrhe, mon corps avec toutes les souffrances des douze années pendant lesquelles j'avais été alitée, prête à souffrir et à continuer aussi longtemps qu'il le désirerait. Comme or, je lui offris les douleurs que je ressens quand il me prive de sa présence, ce qui est pour moi la chose la plus souffrante et la plus douloureuse. Comme encens, je lui offris mes pauvres prières en les unissant à celles de la Reine Maman, afin qu'elles soient plus acceptables pour Jésus bébé.
J'ai fait mon offrande dans la confiance totale que l'Enfant allait l'accepter. Cependant, il me sembla que même si Jésus acceptait ma pauvre offrande avec grand plaisir, ce qu'il aimait le plus était la confiance avec laquelle je l'offrais.
Il me dit: «La confiance a deux bras. Avec le premier, on embrasse mon Humanité et on en use comme d'une échelle pour s'élever jusqu'à ma Divinité. Avec l'autre, on embrasse ma Divinité et on obtient d'elle des torrents de grâces célestes. Ainsi, l'âme est tout inondée par l'Être divin.
«Quand l'âme a confiance, elle est sûre d'obtenir ce quelle demande: je garde mes Bras attachés et je laisse l'âme faire ce qu'elle veut. Je la laisse pénétrer plus profondément dans mon Coeur et je la laisse y prendre ce qu'elle m'a demandé. Si je ne faisais pas ainsi, je me sentirais dans un état de violence vis-à-vis de l'âme.»
Comme il disait cela, de la Poitrine de l'Enfant (ou de la Poitrine de la Mère) venaient des courants de liqueur (mais je ne sais pas exactement comment nommer ce que j'appelle ici liqueur) qui inonda toute mon âme. Puis la Reine Maman disparut.
Par la suite, l'Enfant et moi allâmes dans la voûte des cieux. J'ai vu sa charmante Figure attristée. Je me suis dit en moi-même: «Peut-être désire-t-il les caresses de la Reine Maman.» Je l'ai pressé fortement sur mon coeur et Jésus bébé prit un aspect jubilant. Qui pourrait dire ce qui se passa alors entre Jésus et moi? Je n'ai pas la langue pour le manifester ni les expressions pour le décrire.
8 janvier 1900
Je me disais intérieurement: «Qui pourrait dire combien d'erreurs et de bévues contiennent ces choses que j'écris?» À ce moment, je me suis sentie comme si je perdais connaissance et Jésus béni vint et me dit: «Ma fille, même tes erreurs aideront à faire comprendre qu'il n'y a aucune tromperie volontaire de ta part et que tu n'es pas un docteur (car si tu en étais un, tu saurais où tu erres). Elles rendront encore plus clair que c'est moi qui te parle -- du moins pour ceux qui savent voir les choses simplement. Mais je t'assure qu'ils ne trouveront pas une ombre de vice, ni rien qui ne dise "vertu" car, quand tu écris, moi-même guide ta main. Tout au plus, ils pourront trouver quelque chose qui, au premier regard, semble erroné, mais qui, s'ils regardent de plus près, correspond à la Vérité.»
Ayant dit cela, il disparut. Quelques heures plus tard, alors que je me sentais toute perplexe et mal à l'aise relativement à ce qu'il m'avait dit, il revint et ajouta: «Mon héritage est fermeté et stabilité. Je ne suis sujet à aucun changement. Plus une âme s'approche de moi et avance sur le chemin de la vertu, plus elle se sent ferme et stable dans le bien; d'autre part, plus elle est loin de moi, plus elle est sujette à osciller entre le bien et le mal.»
Texte non daté
Alors que je me trouvais dans mon état habituel, mon aimable Jésus se montra à moi dans un état lamentable. Ses Mains étaient attachées solidement, sa Face était couverte de crachats, et il y avait plusieurs personnes qui le giflaient copieusement. Quant à lui, il était calme et tranquille, sans bouger et sans proférer une seule plainte. Il ne bougeait même pas une paupière, montrant ainsi qu'il voulait souffrir ces outrages, non seulement extérieurement, mais aussi intérieurement. Quel spectacle émouvant, capable de briser les coeurs les plus durs! Combien de choses me disait cette Face souillée de boue et de dégoûtants crachats! J'étais frappée d'horreur. Je tremblais. Je me suis vue toute remplie d'orgueil comparativement à lui.
Il me dit: «Ma fille, seuls les petits se laissent traiter comme on le veut; pas ceux qui sont petits en raison humaine, mais ceux qui sont petits et remplis de raison divine. Je peux dire que je suis humble, mais ce qui est appelé humilité chez l'homme devrait être appelé connaissance de soi. Celui qui ne se connaît pas lui-même marche dans la fausseté.»
Puis, pendant quelques minutes, il fut silencieux. Je le contemplais. Et j'ai vu une main munie d'une lumière qui cherchait en moi, dans les endroits les plus intimes et cachés, pour voir si on pouvait y trouver la connaissance de soi et l'amour des humiliations, de la confusion et de la disgrâce. La lumière trouva un vide en mon intérieur et j'ai vu que cet endroit aurait dû être rempli d'humiliations et de confusion, suivant l'exemple de mon Jésus béni.
Oh! combien de choses cette lumière et cette attitude sacrée de Jésus me firent comprendre. Je me suis dit en moi-même: «Un Dieu humilié et confus pour mon amour; et moi, une pécheresse privée de ces marques de distinction! Un Dieu stable et ferme qui, devant tant d'injustices, ne bouge même pas pour se défaire des crachats dégoûtants qui couvrent son Visage. Ah! s'il voulait rejeter ces souffrances, ces outrages, il pourrait parfaitement le faire! Je comprends que ce ne sont pas les chaînes qui le retiennent dans cette situation, mais sa Volonté stable qui veut sauver la race humaine quelqu'en soit le prix! Et moi, où sont mes humiliations? Où est ma fermeté et ma constance à travailler par amour pour Jésus et mon prochain! Oh! quels êtres dissemblables nous sommes Jésus et moi!»
Pendant que mon petit cerveau se perdait dans ces pensées, mon adorable Jésus me dit: «Mon Humanité fut submergée par la disgrâce et l'humiliation, au point de débordement. C'est pourquoi, devant mes vertus, le Ciel et la terre tremblent et les âmes qui m'aiment usent de mon Humanité comme d'une échelle pour atteindre quelques reflets de mes vertus.
«Dis-moi: comparativement à mon humilité, où est la tienne? Moi seul peux me glorifier de posséder une vraie humilité. Unie à ma Divinité, mon Humanité aurait pu faire des prodiges à chaque pas, en paroles et en actes, mais, volontairement, je me suis restreint aux bornes de mon Humanité, je me suis montré le plus pauvre, j'ai été jusqu'à me confondre avec les pécheurs.
«J'aurais pu accomplir la Rédemption dans un temps très bref, et même d'un seul mot. Mais, pendant de longues années, avec tant de privations et de souffrances, j'ai voulus faire miennes les misères de l'homme. J'ai voulu m'adonner à de nombreuses et diverses actions pour que l'homme puisse être renouvelé et divinisé, même dans ses plus petits travaux. Portés par moi qui était Dieu et homme, ces travaux humains reçurent une nouvelle splendeur et furent marqués du sceau de la Divinité.
«Dissimulée dans mon Humanité, ma Divinité descendit aussi bas que de se mettre au niveau des actes humains, alors que, d'un simple acte de ma Volonté, j'aurais pu créer un nombre infini de mondes qui auraient transcendé les misères et les faiblesses de cette humanité! Devant la Justice divine, j'ai choisi de voir mon Humanité recouverte de tous les péchés des hommes pour lesquels j'ai eu à expier par des douleurs inouïes et en versant tout mon Sang! Ainsi, j'ai accompli des actes continuels d'humilité héroïque.
«La grande différence entre mon humilité et celle des créatures qui, devant la mienne, n'est qu'une ombre -- même celle de mes saints --, c'est que les créatures sont toujours créatures et ne connaissent pas comme moi le vrai poids du péché. Bien que certaines âmes furent héroïques et que, à mon exemple, elles se soient offertes pour souffrir les peines des autres, elles ne sont pas différentes des autres: elles sont faites de la même glaise.
«La simple pensée que leurs souffrances sont la cause de nouveaux gains pour elles, et qu'elles en glorifient Dieu, est un grand honneur pour elles. De plus, les créatures sont restreintes au cercle où Dieu les a mises; elles ne peuvent aller hors des limites de ce cercle. Oh! s'il était en leur pouvoir de faire et de défaire, combien d'autres choses ne feraient-elles pas. Chacun atteindrait les étoiles! Au contraire, mon Humanité divinisée n'avait aucune limite. Cependant, elle s'est restreinte aux limites humaines afin que toutes ses Oeuvres soient tissées d'humilité héroïque.
«Le manque d'humilité de l'homme fut la cause de tous les maux qui ont inondé la terre. Et moi, par l'exercice de cette vertu, je devais attirer sur les hommes tous les biens de la Divinité. Aucune grâce ne quitte mon Trône, si ce n'est à travers l'humilité; aucune requête ne peut être reçue par moi, si elle n'a pas la signature de l'humilité. Aucune prière n'est entendue par mes Oreilles ni n'émeut mon Coeur à la compassion, si elle n'est pas parfumée d'humilité.
«Si la créature ne va pas jusqu'au bout pour détruire en elle cette recherche des honneurs et l'estime de soi (ce qu'on détruit en aimant être haï, humilié et confondu), elle sentira autour de son coeur comme une tresse d'épines, et elle aura un vide dans son coeur qui l'ennuiera toujours et la maintiendra très dissemblable de ma très sainte Humanité. Si elle n'en vient pas à aimer les humiliations, tout au plus sera-t-elle capable de se connaître un peu, mais elle ne brillera pas devant moi, vêtue du beau et charmant vêtement de l'humilité.»
Qui pourrait dire toutes les choses que j'ai comprises concernant la vertu d'humilité et la corrélation entre la connaissance de soi et l'humilité? Il me semble avoir saisi la distinction entre ces deux vertus, mais je n'ai pas les mots pour l'exprimer. Pour dire quelque chose là-dessus, je me servirai d'un exemple.
Imaginons un homme pauvre qui sait qu'il est pauvre et qui, pour les personnes qui ne le connaissent pas et qui pourraient croire qu'il possède quelque chose, manifeste clairement sa pauvreté. On peut dire de cet homme qu'il se connaît, qu'il dit la vérité et, qu'ainsi, il sera plus aimé. Il attirera les autres à la compassion sur son état misérable. Tous l'aideront. C'est ce que produit la connaissance de soi.
Mais qu'arriverait-il si cet homme, ayant honte de manifester sa pauvreté, se vantait d'être riche, alors que tous sauraient qu'il ne possède même pas les vêtements qu'il porte et qu'il meurt de faim. Tous le haïraient, personne ne l'aiderait et il deviendrait la risée de tous ceux qui le connaissent. Ce misérable homme irait de mal en pis et finirait par périr. C'est ce que l'orgueil produit devant Dieu et devant les hommes. Celui qui ne se connaît pas s'éloigne automatiquement de la Vérité et s'engage sur les chemins de la fausseté.
Il y a une autre forme d'humilité héroïque qui résulte aussi de la connaissance de soi. Imaginons un homme riche, né au milieu du confort et des richesses, et qui est bien reconnu comme tel. Cependant, considérant les humiliations profondes auxquelles Notre-Seigneur Jésus-Christ s'est soumis par Amour pour nous, il devient amoureux de la sainte humilité, abandonne ses richesses et son confort, enlève ses nobles vêtements et se couvre de guenilles. Il vit inconnu. Il ne dit à personne qui il est. Il vit avec les plus pauvres comme s'il était leur égal. Il fait sa joie des mépris et des confusions. On trouve chez cet homme ce qui arrive aux saints qui s'humilient de plus en plus et qui savent que le Seigneur les remplit ainsi de ses grâces et de ses dons.
Dans ces exemples, on voit que la connaissance de soi sans humilité n'est bonne à rien, alors que la connaissance de soi accompagnée d'humilité devient précieuse.
Ah oui! l'humilité attire la grâce, brise les plus fortes chaînes et fait surmonter chaque barrière entre l'âme et Dieu. L'humilité est la petite plante toujours verte et fleurie qui n'est pas sujette à être rongée par les vers et qui ne peut être abîmée ou flétrie par les vents, la grêle ou la chaleur. Alors même qu'elle est la plus petite plante, elle développe les plus grandes branches qui pénètrent dans le Ciel et rejoignent le Coeur de Notre-Seigneur. Seulement les branches qui proviennent de cette petite plante ont leurs entrées gratuites dans cet adorable Coeur.
L'humilité est l'ancre de paix dans la mer des tempêtes de cette vie. L'humilité est le sel qui assaisonne toutes les vertus et préserve l'âme de la corruption du péché. L'humilité est la petite herbe qui pousse près des chemins; elle disparaît quand elle est piétinée mais elle repousse ensuite plus belle qu'avant. L'humilité est cette greffe domestique qui ennoblit la plante sauvage. Elle est la monnaie de la grâce. L'humilité est la lune qui nous guide dans les ténèbres de la nuit de cette vie. L'humilité est le marchand rusé qui sait comment vendre ses biens et qui ne gaspille pas même un sou de la grâce qui lui est donnée. L'humilité est la clef du Paradis où personne ne peut entrer sans elle. L'humilité est le sourire de Dieu et de tout le Paradis et les pleurs de tout l'enfer.
17 janvier 1900
Ce matin, mon adorable Jésus est venu et reparti sans m'avoir parlé. Après, j'ai senti que je quittais mon corps. Le dos tourné, il m'a dit:
«En beaucoup, il n'y a plus de droiture. Ils disent: "Aussi longtemps que les choses continueront de cette manière, nous n'aurons pas de succès dans nos projets. Feignons donc la vertu, prétendons être droits, feignons être de vrais amis; ainsi, il sera plus facile de tisser notre filet et de les abuser. Quand nous arriverons à eux pour leur faire du mal et les dévorer, eux, croyant que nous sommes des amis, tomberont spontanément dans nos mains." Voilà à quel niveau de sournoiserie l'homme peut atteindre.»
Par la suite, désirant de moi une réparation spéciale, Jésus béni sembla m'enlever la vie en me présentant à la Justice divine. De par sa manière de faire, j'ai pensé qu'il me ferait quitter cette vie. C'est pourquoi je lui ai dit: «Seigneur, je ne veux pas entrer au Ciel sans tes marques de distinction. Crucifie-moi d'abord et, ensuite, amène-moi.»
Il transperça mes mains et mes pieds avec des clous. Et pendant qu'il le faisait, à mon plus grand regret, il disparut et je me suis retrouvée dans mon corps. Je me suis dit intérieurement: «Me voilà encore ici! Ah! combien de fois m'as-tu fait cela, mon cher Jésus. Tu as un art spécial pour me faire ce coup: tu me laisses croire que je vais mourir, ce qui m'amène à me rire du monde et des douleurs en me disant que la séparation d'avec toi est terminée, puis, quand j'ai commencé à me réjouir, je me retrouve encore enfermée dans la prison de ce corps fragile. Par suite, oubliant mes réjouissances, je reviens à mes pleurs, à mes lamentations et aux souffrances de ma séparation de toi. Ah! Seigneur, reviens vite, car je suis profondément consternée.»
22 janvier 1900
Après avoir vécu des jours très amers de privation, mon pauvre coeur se débattait entre la peur d'avoir perdu Jésus à tout jamais et l'espérance que peut-être je le reverrai encore. Ô Dieu! Quelle guerre sanglante mon coeur eut à soutenir! Sa souffrance était telle qu'à un instant il gelait et, à l'instant suivant, il était comme sous le pressoir et dégouttait le sang.
Pendant que j'étais dans cet état, j'ai senti mon doux Jésus tout près de moi. Il retira le voile qui me couvrait les yeux et, finalement, j'ai pu le voir. Immédiatement, je lui ai dit: «Ô Seigneur, tu ne m'aimes plus?» Il me répondit: «Oui, oui je t'aime! Ce que je te recommande, c'est la correspondance à ma grâce. Et, pour être fidèle, tu dois être comme l'écho qui se répercute dans l'atmosphère et qui, aussitôt que quelqu'un commence à faire entendre sa voix, immédiatement, sans le moindre retard, répète ce qu'il entend. C'est ainsi que tu dois faire. Aussitôt que tu commences à recevoir ma grâce, sans même attendre que je finisse de te la donner, tu dois immédiatement commencer à faire entendre l'écho de ta correspondance.»
27 janvier 1900
Je continuais d'être quasi totalement privée de mon doux Jésus. Ma vie s'écoulait dans la douleur. Je sentais un grand ennui, une grande lassitude de vivre! Je me disais intérieurement: «Oh! comme mon exil est prolongé! Oh! quel serait mon bonheur si je pouvais dissoudre les liens de ce corps. Ainsi, mon âme prendrait librement son envol vers mon plus grand Bien!» Une pensée m'effleura l'esprit: «Et si tu allais en enfer!» Pour empêcher que le démon ne m'attaque sur ce point, je me suis dépêchée de dire: «Alors, même en enfer, j'enverrais mes soupirs à mon doux Jésus; même là, je l'aimerais.»
Pendant que j'entretenais ces pensées et bien d'autres (il serait trop long de les mentionner toutes), mon aimable Jésus se montra pendant un court temps et, d'un ton sérieux, il me dit: «Ton temps n'est pas encore arrivé.» Dans une lumière intellectuelle, il me fit comprendre que tout doit être ordonné dans une âme. L'âme possède beaucoup de petites chambres, une pour chaque vertu, chaque vertu ayant avec elle toutes les autres, de telle manière que si l'âme semble ne posséder qu'une vertu, celle-ci est accompagnée de toutes les autres. Néanmoins, les vertus sont toutes distinctes et chacune a sa place dans l'âme. Elles proviennent toutes de la Très Sainte Trinité qui, tout en étant une, est formée de trois personnes distinctes.
J'ai aussi compris que chacune des chambres de l'âme est, ou bien remplie par une vertu, ou bien par le vice opposé, et que s'il n'y a ni vertu ni vice, elle reste vide. Il semblait que mon âme était comme une maison qui contient beaucoup de chambres, toutes vides; quelques-unes remplies de serpents, quelques-unes de boue, d'autres sombres. Ah! Seigneur, toi seul peux mettre de l'ordre dans ma pauvre âme!
28 janvier 1900
Le même état persistait. Ce matin, Jésus me transporta hors de mon corps. Après avoir attendu si longtemps, il semblait que, cette fois, je le voyais clairement. Cependant, je me suis vue si mauvaise que je n'osais pas dire un mot. Nous nous regardâmes l'un l'autre, mais en silence. À travers ces regards mutuels, j'ai compris que Jésus était rempli d'amertume, mais je n'ai pas osé lui dire: «Verse ton amertume en moi.»
Il s'approcha cependant de moi et commença à déverser son amertume. L'ayant reçue, je fus incapable de la contenir et je la rejetai sur le sol. Alors il me dit: «Que fais-tu là? Tu ne veux plus partager mon amertume? Tu ne veux plus me soulager dans mes douleurs?»
Je lui dis: «Seigneur ce n'est pas que je ne veux pas. Je ne sais ce qui m'arrive. Je me sens si remplie de ton amertume que je n'ai pas de place pour la contenir. Seulement un prodige de ta part peut agrandir mon intérieur; ainsi, je pourrai recevoir ton amertume.»
Jésus fit sur moi un grand signe de croix et il déversa encore son amertume. Cette fois, il me sembla que j'étais capable de la contenir. Il dit ensuite: «Ma fille, la mortification est comme un feu qui fait sécher toutes les mauvaises humeurs qui sont dans l'âme et qui l'inonde d'une humeur de sainteté, donnant naissance aux plus belles vertus.»
31 janvier 1900
Jésus vint plusieurs fois, mais toujours en silence. Je sentais un vide en moi et de la peine, car je n'entendais pas sa très douce Voix. Revenant pour me consoler, il me dit:
«La grâce est la vie de l'âme. Comme l'âme donne vie au corps, ainsi la grâce donne vie à l'âme. Pour le corps, il ne suffit pas qu'il ait une âme pour maintenir sa vie, il lui faut aussi de la nourriture pour qu'il puisse grandir jusqu'à sa pleine stature. Ainsi, pour l'âme, il n'est pas suffisant qu'elle ait la grâce pour la maintenir en vie, il lui faut aussi de la nourriture pour qu'elle puisse progresser vers sa pleine stature. Et cette nourriture est la correspondance à la grâce. La grâce et la correspondance à la grâce forment une chaîne qui conduit l'âme au Ciel. Dans la mesure où l'âme correspond à la grâce, les maillons de cette chaîne se forment.»
Et il ajouta: «Quel est le passeport pour entrer dans le royaume de la grâce? C'est l'humilité. L'âme qui regarde toujours son néant et qui perçoit n'être rien que poussière et vent met sa confiance dans la grâce qui devient comme son maître. Prenant les commandes, la grâce conduit l'âme sur le chemin de toutes les vertus et lui fait atteindre les sommets de la perfection. Sans la grâce, l'âme est comme le corps départi de son âme qui devient rempli de vers et de pourriture et qui horrifie le regard. Ainsi, sans la grâce, l'âme devient si abominable qu'elle horrifie le regard, non pas des hommes, mais de Dieu lui-même.»
4 février 1900
Ce matin, je me suis trouvée dans un état de grand découragement, spécialement parce que j'étais privée de la présence de Jésus, mon plus grand Bien. Il s'est montré et m'a dit:
«Le découragement est une humeur toxique qui infecte les plus belles fleurs et leurs fruits les plus plaisants. Cette humeur toxique pénètre dans les racines de l'arbre, l'imprégnant complètement, le faisant se dessécher et devenir répugnant. Si quelqu'un ne le guérit pas en l'arrosant de l'humeur contraire, l'arbre s'écroule. Il en est ainsi pour l'âme qui s'imbibe de l'humeur toxique du découragement.»
Après ces propos de Jésus, je me sentais encore découragée, toute repliée sur moi-même, et je me suis vue si méchante que je n'ai pas osé me précipiter vers lui. Mon esprit se disait: «Il est inutile pour moi d'espérer plus longtemps ses visites continuelles, ses grâces, ses charismes comme avant. Tout est fini pour moi.»
Presque en me réprimandant, Jésus ajouta: «Que fais-tu? Que fais-tu? Ne sais-tu pas que le manque de confiance rend l'âme comme moribonde? En pensant qu'elle va mourir, l'âme ne sait comment disposer de la vie, comment acquérir la grâce, comment s'en servir, comment se rendre plus belle ou comment agir pour se guérir de son affaissement.»
Ah! Seigneur, il me semble voir ce fantôme du manque de confiance, malpropre, amaigri, craintif et tout tremblant et qui, de tout son art, sans autre instrument que la peur, conduit l'âme à la fosse. Et ce qui est pire, ce fantôme ne se montre pas comme un ennemi, car alors l'âme pourrait le démasquer; il se montre plutôt comme un ami; il s'infiltre secrètement, feignant d'agoniser avec l'âme et se disant prêt à mourir avec elle. Et si l'âme n'est pas attentive, elle ne saura comment se débarrasser de cette tromperie.
5 février 1900
Alors que je continuais dans le même état, mais avec un peu plus de courage, mon très cher Jésus vint et me dit: «Ma fille, quelquefois l'âme rencontre le vice face à face. Si, rassemblant son courage, elle triomphe de cet ennemi, la vertu opposée devient plus resplendissante et plus profondément enracinée en elle. Mais l'âme doit être prudente afin de ne pas fournir la corde avec laquelle elle peut être attachée, cette corde étant le manque de confiance. Cela se fera en dilatant son coeur dans la confiance, tout en demeurant à l'intérieur du cercle de la vérité, qui est la connaissance de son néant.»
13 février 1900
Ce matin, après avoir communié, j'ai vu mon adorable Jésus, mais dans une attitude toute nouvelle. Il me semblait sérieux, réservé et sur le point de me réprimander. Quel changement dramatique. Au lieu d'être soulagé, mon pauvre coeur se sentit oppressé, transpercé par cette attitude inhabituelle de Jésus. Cependant, comme j'avais été privée de sa présence dans les jours précédents, je sentais un grand besoin de soulagement.
Il me dit: «Comme la chaux a le pouvoir de dévorer les objets qui sont plongés en elle, ainsi la mortification a le pouvoir de dévorer les imperfections et les défauts qui se trouvent dans l'âme; elle va aussi loin que de spiritualiser le corps. Elle se place près de l'âme et y scelle toutes les vertus. Jusqu'à ce qu'elle ait bien dévoré ton âme et ton corps, elle ne pourra pas sceller parfaitement en toi les marques de ma crucifixion.»
Ensuite, on perça mes mains et mes pieds (je ne suis pas sûre qui le faisait, bien qu'il me semblait que c'était un ange). Puis, avec une lance qu'il tira de son Coeur, Jésus perça mon coeur, ce qui me donna une vive douleur. Ensuite, il disparut, me laissant plus affligée qu'auparavant.
J'ai bien compris qu'il était nécessaire que la mortification soit pour moi une inséparable amie, mais que pas même l'ombre d'une amitié avec elle existait en moi! «Ah! Seigneur, attache-moi à la mortification par une amitié indissoluble car, par moi-même, mes manières sont toutes rustiques.»
Ne se voyant pas chaudement reçue par moi, la mortification devient tout respect envers moi; elle me ménage toujours, craignant qu'un jour je lui tourne le dos complètement. Jamais elle ne mènera son majestueux travail à son achèvement car, aussi longtemps que nous serons à couteaux tirés, ses mains prodigieuses ne m'atteindront pas pour travailler sur moi et me présenter devant Jésus comme un digne travail de ses saintes mains.
16 février 1900
Ce matin, après avoir renouvelé en moi les douleurs de la crucifixion, Jésus me dit: «Par le bon air ou le mauvais air qu'une personne respire, son corps est purifié ou infecté. La mortification doit être l'air de l'âme. Par l'air que l'âme respire, on reconnaît si elle est saine ou malade. Si une personne respire l'air de la mortification, chaque chose sera purifiée en elle; tous ses sens sonneront d'un même son concordant. Mais si elle ne respire pas l'air de la mortification, tout sera discordant en elle; elle aura une haleine répugnante. Pendant qu'elle domptera une passion, une autre se lèvera. Sa vie se déroulera comme un jeu d'enfant.»
Il me sembla voir la mortification comme un instrument de musique, qui, si ses cordes sont toutes bonnes et fortes, produit un son harmonieux. Mais si ses cordes ne sont pas de bonne qualité, alors on doit en ajuster une, puis une autre, et ainsi sans cesse, de sorte qu'on doit toujours ajuster l'instrument sans jamais pouvoir en jouer. Et si on essaie d'en jouer, on n'entend que des sons discordants.
19 février 1900
Ce matin, mon adorable Jésus est venu et m'a transportée hors de mon corps. J'ai vu beaucoup de personnes en action, mais je ne peux dire si c'était la guerre ou la révolution. Pour ce qui est de Notre-Seigneur, les gens ne faisaient que lui tresser des couronnes d'épines. Pendant qu'avec soin je lui en ai enlevé une, ils lui en ont fixé une autre encore plus douloureuse.
Ah! il me semble bien que notre âge sera désavoué à cause de son orgueil! La plus grande infortune, c'est de perdre le contrôle de sa tête car, une fois qu'une personne a perdu le contrôle de sa tête et de son cerveau, tous ses membres deviennent invalides, ou ils deviennent ennemis les uns des autres.
Mon patient Jésus toléra toutes ces couronnes d'épines. Et à peine les eus-je enlevées qu'il se tourna vers les gens et leur dit: «Certains dans la guerre, certains en prison, d'autres dans les tremblements de terre. Quelques-uns resteront. L'orgueil a dirigé votre vie, et l'orgueil vous donnera la mort.»
Après cela, me tirant d'au milieu de ces personnes, Jésus béni s'est changé en enfant. Je l'ai porté dans mes bras pour qu'il se repose. Il m'a dit: «Entre toi et moi, que tout soit pour moi; et que ce que tu concéderas aux créatures ne soit rien d'autre que le débordement de notre amour.»
20 février 1900
Mon Jésus béni continuait de venir. Après que j'eus communié, il renouvela en moi les douleurs de la crucifixion. J'en étais si atteinte que je ressentais le besoin d'un soulagement, mais je n'ai pas osé le demander.
Un peu plus tard, Jésus revint sous la forme d'un enfant et il m'embrassa plusieurs fois. De ses Lèvres très pures coulait un lait très doux que j'ai bu à grandes gorgées. Comme je faisais cela, il me dit: «Je suis la fleur du Paradis céleste et le parfum que j'exhale est tel que tout le Ciel en est parfumé. Je suis la Lumière qui éclaire tout le Ciel; tous sont imprégnés de cette Lumière. Mes saints tirent de moi leurs petites lampes. Il n'y a pas de lumière au Paradis qui ne soit tirée de cette Lumière.»
Ah oui! il n'y a pas de parfum de vertu sans Jésus; sans lui, il n'y a pas de lumière, même au plus haut des cieux.
21 février 1900
Mon aimable Jésus recommença ses délais habituels. Qu'il soit toujours béni! En vérité, on a besoin d'avoir la patience d'un saint pour fonctionner avec lui. Celui qui n'a pas expérimenté cela ne peut le croire. Il est presqu'impossible de ne pas avoir une petite dispute avec lui.
Après avoir été patiente en l'attendant longuement, il vint finalement et me dit: «Ma fille, le don de la pureté n'est pas un don naturel mais une grâce acquise. L'âme l'obtient en se faisant attrayante par la mortification et les souffrances. Oh! comme les âmes mortifiées et souffrantes se rendent attrayantes. J'ai un tel goût pour elles que j'en deviens fou. Tout ce qu'elles veulent, je le leur donne. Quand tu es privée de moi -- ce qui est la souffrance la plus douloureuse pour toi --, accepte cette privation par amour pour moi; j'aurai pour toi un plus grand Amour qu'auparavant et je t'accorderai de nouvelles grâces.»
23 février 1900
Ce matin, alors que j'avais presque perdu l'espérance que Jésus béni vienne, il revint soudain. Il renouvela en moi les douleurs de la crucifixion et me dit: «Le temps est arrivé. La fin se dessine, mais l'heure est incertaine.» Alors que je me demandais si ces mots avaient trait à ma crucifixion complète ou aux châtiments, je lui dis: «Seigneur, j'ai peur que mon état ne soit pas conforme à la Volonté de Dieu.» Jésus reprit: «Le signe le plus sûr pour savoir si un état est conforme à ma Volonté, c'est quand on ressent la force de vivre dans cet état.»
Je lui dis: «Si c'était ta Volonté, tu ne cesserais pas de venir comme avant!» Il répondit: «Quand une personne est devenue familière dans une famille, toutes ces cérémonies et ces respects ne sont plus utilisés comme ils l'étaient auparavant, quand elle était encore une étrangère. Et ce n'est pas là le signe que cette famille ne veut plus de la personne, ni qu'elle ne l'aime pas plus qu'avant. Il en va ainsi avec moi. Par conséquent, reste tranquille; laisse-moi faire. Ne te torture pas le cerveau ou ne perds pas la paix de ton coeur. Au temps voulu, tu comprendras mes oeuvres.»
24 février 1900
Ce matin je me suis trouvée tout apeurée. Je croyais que tout était fantaisie ou que le démon voulait m'abuser. C'est pourquoi je détestais tout ce que je voyais et j'étais mécontente. J'ai vu que le confesseur priait Jésus de renouveler en moi les douleurs de la crucifixion et j'ai essayé de résister. Au commencement, Jésus béni le toléra ainsi mais, parce que le confesseur insistait, il me dit: «Ma fille, manquerons-nous réellement à l'obéissance cette fois-ci? Ne sais-tu pas que l'obéissance doit sceller l'âme et la rendre malléable comme la cire, de telle façon que le confesseur puisse lui donner la forme qu'il veut?»
Alors, ne s'occupant pas de mes résistances, il me fit partager les douleurs de la crucifixion. Et ne pouvant plus résister au commandement de Jésus et du confesseur (car je ne voulais pas consentir de peur que ce ne soit pas de Jésus), j'ai dû m'abandonner à la souffrance. Que Jésus soit toujours béni et que toutes les créatures le glorifient en toute chose et toujours!
26 février 1900
Après avoir vécu plusieurs jours dans la privation de Jésus (au plus, il est venu quelques fois comme une ombre, puis il fuyait), je ressentais une telle peine que j'ai fondu en larmes. Compatissant à ma peine, Jésus béni vint, me regarda attentivement et me dit:
«Ma fille, n'aie pas peur, car je ne te laisserai pas. Quand tu es privée de ma présence, je ne veux pas que tu perdes coeur. Plutôt, à partir d'aujourd'hui, quand tu seras privée de moi, je veux que tu prennes ma Volonté et que tu te réjouisses en elle, m'aimant et me glorifiant en elle, en la considérant comme si elle était ma Personne même. En faisant ainsi, tu m'auras dans tes mains mêmes.
«Qu'est-ce qui forme la béatitude du Paradis? Certainement ma Divinité. Et de quoi sera formée la béatitude de mes bien-aimés sur la terre? Certainement de ma Volonté. Elle ne vous fuira jamais. Vous l'aurez toujours en votre possession. Si tu restes dans ma Volonté, là tu expérimenteras des joies ineffables et des plaisirs très purs. En ne quittant pas ma Volonté, l'âme se rend noble; elle devient riche, et tous ses travaux réfléchissent le Soleil divin, comme la surface de la terre réfléchit les rayons du soleil.
«L'âme qui fait ma Volonté est ma noble reine; elle prend sa nourriture et son breuvage uniquement dans ma Volonté. À cause de cela, il coule dans ses veines un sang très pur. Sa respiration exhale un arôme qui me rafraîchit totalement, car il provient de ma propre Respiration. Ainsi, je ne veux rien de toi, si ce n'est que tu formes ta béatitude à l'intérieur de ma Volonté, sans en sortir, même un bref instant.»
Pendant qu'il disait cela, je demeurais tout alarmée et apeurée à cause des Paroles de Jésus soutenant qu'il ne viendrait pas et que je devais me calmer dans sa Volonté. Ô Dieu, quelle peine, quelle angoisse mortelle! Mais, avec douceur, Jésus ajouta: «Comment puis-je te laisser alors que tu es une âme victime? Je cesserai de venir quand tu cesseras d'être une âme victime. Mais tant que tu seras victime, je me sentirai toujours attiré à venir à toi.»
Ainsi j'ai retrouvé mon calme. Je me suis sentie comme entourée par l'adorable Volonté de Dieu, de telle manière que je ne trouvais aucune ouverture pour m'échapper. J'espère qu'il me gardera toujours ainsi emprisonnée dans sa Volonté.
27 février 1900
Alors que j'étais toute abandonnée à l'aimable Volonté de Notre-Seigneur, je me suis vue complètement entourée par mon doux Jésus, intérieurement et extérieurement. Je me suis vue comme transparente et, partout où je regardais, je voyais mon plus grand Bien. Mais, ô merveille, pendant que je me voyais entourée en dedans et en dehors par Jésus, moi-même, avec ma propre volonté, j'entourais Jésus de la même manière, de telle façon qu'il n'avait pas d'ouverture par où s'échapper, parce que, unie à la sienne, ma volonté le tenait enchaîné. Ô admirable secret de la Volonté de mon Seigneur, indescriptible est le bonheur qui vient de toi!
Comme je me trouvais dans cet état, Jésus béni me dit: «Ma fille, dans l'âme qui est toute transformée en ma Volonté, je trouve un doux repos. Cette âme devient pour moi comme ces lits moelleux qui ne perturbent en aucune manière ceux qui s'y reposent; même si les personnes qui s'en servent sont fatiguées, courbaturées et arides, la douceur et le plaisir qu'elles y trouvent sont tels qu'en s'éveillant, elles se trouvent fortes et en santé. Telle est pour moi l'âme conforme à ma Volonté. Et comme récompense, je me laisse moi-même lier par sa volonté et j'y fais briller mon Soleil divin comme en son plein midi.»
Ayant dit cela, il disparut. Plus tard, après que j'eus reçu la sainte communion, il revint et me transporta hors de mon corps. Je vis beaucoup de gens. Il me dit: «Dis-leur qu'ils font un grand mal en murmurant l'un contre l'autre; ils attirent mon indignation. Et cela est juste car, alors qu'ils sont tous sujets aux mêmes misères et faiblesses, ils ne font que s'intenter des procès l'un contre l'autre. Si, au contraire, avec charité ils se jugent l'un l'autre avec compassion, alors je me sens attiré à user de miséricorde avec eux.»
J'ai répété ces choses à ces gens, puis nous nous sommes retirés.
2 mars 1900
Ce matin, après que j'eus reçu la sainte communion, mon doux Jésus se montra à moi crucifié. Intérieurement, je me suis sentie attirée à me regarder en lui afin de pouvoir lui ressembler. Et lui-même se regarda en moi pour m'entraîner à lui ressembler.
Comme je faisais cela, j'ai senti que les douleurs de mon Seigneur crucifié s'infusaient en moi. Plein de bonté, il me dit: «Je veux que ta nourriture soit la souffrance, mais pas la souffrance pour elle-même, mais la souffrance comme fruit de ma Volonté. Le baiser qui liera notre amitié sera l'union de nos volontés; et le lien indissoluble qui nous liera dans un enlacement continuel sera une souffrance continuelle partagée.»
Pendant qu'il disait cela, Jésus béni devint décloué. Il prit sa Croix et l'étendit à l'intérieur de mon corps. J'en devins si étirée que j'ai senti mes os se disloquer. De plus, une main (je ne sais pas de qui elle était) perça mes mains et mes pieds et Jésus, qui était assis sur la Croix étendue en moi, prit grand plaisir à me voir souffrir et à voir la personne qui perça mes mains et mes pieds.
Puis il dit: «Maintenant je peux me reposer en tranquillité. Je n'ai même pas à me donner la peine de te crucifier, car l'obéissance fera tout cela par elle-même; je te laisse libre dans les mains de dame obéissance.»
Quittant la Croix, il se plaça sur mon coeur pour se reposer. Qui pourrait dire combien j'ai souffert dans cette position! Après une longue période et alors que, contrairement aux autres fois, Jésus ne se pressait pas pour me délivrer et me faire revenir à mon état naturel, je n'ai plus vu cette main qui m'avait crucifiée. Je l'ai dit à Jésus. Il me répondit: «Qui t'a mise sur la croix? Était-ce moi? C'était l'obéissance, et l'obéissance doit te libérer!» Il semblait qu'il voulait blaguer cette fois. Et il me libéra lui-même.
7 mars 1900
Ce matin, me retrouvant hors de mon corps, j'ai dû chercher à gauche et à droite pour trouver Jésus béni. Par hasard, je suis entrée dans une église et je l'ai trouvé sur l'autel où le Sacrifice divin était offert. Immédiatement, j'ai couru à lui et je l'ai embrassé en disant: «Finalement, je t'ai trouvé! Tu m'as laissé te chercher ici et là au point de me fatiguer, et tu étais ici!»
En me regardant avec gravité, et non pas selon sa manière bienveillante habituelle, il me dit: «Ce matin, je me sens très chagriné et je sens un grand besoin de recourir aux châtiments pour m'enlever mon fardeau.» Immédiatement, j'ai répondu: «Mon Cher, ce n'est rien! Nous allons remédier à cela à l'instant! Tu vas déverser ton amertume en moi et, ainsi, tu seras soulagé, n'est-ce pas?» Alors, il déversa son amertume en moi.
Ensuite, me pressant sur lui-même, comme s'il était libéré d'un grand poids, il ajouta: «L'âme conforme à ma Volonté sait si bien comment maîtriser ma Puissance qu'elle en vient à me lier complètement; elle me désarme comme il lui plaît. Ah! toi, combien de fois tu me lies!» Pendant qu'il disait cela, il revint à son aspect doux et bienveillant habituel.
9 mars 1900
Étant un peu agitée à propos d'une certaine chose, mon esprit errait ici et là. Je cherchais à me rassurer et à retrouver ma paix, mais Jésus béni m'empêchait d'arriver à mon but. Comme j'insistais, il me dit: «Pourquoi vagabondes-tu ainsi? Ne sais-tu pas que celui qui va contre ma Volonté va hors de la lumière et s'emprisonne dans la noirceur?»
Comme pour me distraire de ce que je cherchais, il me transporta hors de mon corps et, changeant de sujet, il me dit: «Le soleil illumine toute la terre d'un bout à l'autre, de telle manière qu'il n'y a pas un endroit qui ne profite de sa lumière. Il n'y a personne qui puisse se plaindre d'être privé de ses rayons bienfaisants. Chacun peut en bénéficier comme s'il l'avait pour lui seul. Seulement ceux qui se cachent dans des lieux obscurs peuvent se plaindre de ne pas en jouir. Cependant, continuant son office charitable, il laisse quand même passer pour eux quelques rayons.
«Le soleil qui éclaire tous les peuples est une image de ma grâce. Les pauvres et les riches, les ignorants et les savants, les chrétiens et les incroyants peuvent en bénéficier. Personne ne peut dire qu'il en est privé, parce que la lumière de la Vérité inonde le monde comme le soleil en son plein midi.
«Mais quelle n'est pas ma peine de voir que les gens passent au milieu de cette lumière les yeux fermés et que, défiant ma grâce par leurs torrents d'iniquités, ils s'éloignent de cette lumière et vivent volontairement dans des régions ténébreuses au milieu de cruels ennemis. Ils sont exposés à mille dangers parce qu'ils n'ont pas la lumière; ils ne peuvent discerner s'ils sont au milieu d'amis ou d'ennemis et, ainsi, ne savent pas contourner les dangers qui les entourent.
«Ah! tous seraient horrifiés si l'homme faisait ce genre d'affront au soleil, poussant son ingratitude jusqu'à s'arracher les yeux pour le vexer et ne pas voir ses rayons, pour être ainsi plus certains de vivre dans les ténèbres. S'il pouvait raisonner, le soleil enverrait des lamentations et des pleurs plutôt que sa lumière, ce qui tournerait la nature sens dessus dessous.
«Quoiqu'il serait horrifié de voir faire cela en ce qui concerne la lumière naturelle, l'homme atteint de tels extrêmes en ce qui concerne la lumière de ma grâce. Mais, toujours bienveillante, la grâce continue d'envoyer ses rayons sur les ténèbres humaines. Ma grâce n'ignore personne! C'est plutôt l'homme qui, volontairement, la boude. Et quoiqu'il n'ait plus cette lumière en lui, celle-ci lui octroie quand même son scintillement.»
Pendant qu'il disait cela, Jésus semblait extrêmement affligé. Je fis ce que je pouvais pour le consoler, le priant de déverser son amertume en moi. Il ajouta: «J'implore ta compassion, même si je suis la cause de ton affliction car, de temps en temps, je sens la nécessité d'alléger ma douleur en parlant à mes âmes bien-aimées de l'ingratitude des hommes. Je veux émouvoir ces âmes amies pour les amener à me faire réparation pour tous ces excès, et aussi pour les amener à la compassion envers les hommes eux-mêmes.» Je lui dis: «Seigneur, j'aimerais que tu ne m'épargnes pas en me faisant participer à tes douleurs.» Et, sans que j'aie pu en dire plus, il disparut et me fit réintégrer mon corps.
10 mars 1900
Ce matin, après que j'eus reçu la sainte communion, j'ai vu mon cher Jésus sous la forme d'un enfant, avec une lance à la main, désirant transpercer mon coeur. Comme j'avais dit une certaine chose à mon confesseur, Jésus, voulant me réprimander, me dit: «Tu veux éviter de souffrir, mais je veux que tu commences une nouvelle vie de souffrance et d'obéissance!»
Comme il disait cela, il transperça mon coeur avec la lance. Puis il ajouta: «L'intensité du feu correspond à la quantité de bois qu'on y met. Plus le feu est grand, plus grande est sa capacité de brûler et de consumer les objets qu'on y dépose, et plus grandes sont la chaleur et la lumière qu'il développe. Telle est l'obéissance. Plus elle est grande, plus elle est capable de détruire dans l'âme ce qui est matériel. Comme à une cire molle, l'obéissance donne à l'âme la forme qu'elle veut.»
11 mars 1900
Tout se passait comme à l'accoutumée. Ce matin, j'ai vu Jésus plus affligé que d'habitude et il menaçait de mort des personnes. J'ai vu aussi que, dans certains pays, beaucoup mouraient.
Plus tard, j'ai passé dans le purgatoire et, y ayant reconnu une amie décédée, je l'ai questionnée sur différentes choses concernant mon état. Je voulais spécialement savoir si mon état correspondait à la Volonté de Dieu et si c'était Jésus qui venait ou le démon. Je lui ai dit: «Puisque tu te trouves devant la Vérité et que tu connais les choses clairement sans pouvoir être trompée, tu peux me dire la vérité sur mes affaires.»
Elle me répondit: «N'aie pas peur. Ton état est selon la Volonté de Dieu et Jésus t'aime beaucoup. C'est pour cette raison qu'il daigne se manifester à toi.»
Alors, lui soumettant quelques-uns de mes doutes, je la priai d'avoir la bonté d'examiner ces choses devant la lumière de la Vérité et d'être assez charitable de venir ensuite m'éclairer. J'ai ajouté que si elle faisait cela, en récompense, je ferais célébrer une messe à ses intentions.
Elle dit: «Si le Seigneur le veut! Car nous sommes si plongés en Dieu que nous ne pouvons pas même bouger nos paupières sans son consentement. Nous vivons en Dieu comme des personnes qui vivent dans un autre corps. Nous pouvons penser, parler, travailler, marcher, autant qu'il nous est donné par ce corps d'appoint. Pour nous, ce n'est pas comme pour toi, qui as le libre choix, qui dispose de ta propre volonté. Pour nous, nos volontés personnelles ont comme cessé de fonctionner. Notre volonté est uniquement celle de Dieu. Nous vivons en elle. En elle nous trouvons tout notre contentement, tout notre bien et toute notre gloire.»
Puis, dans un contentement inexprimable concernant la Volonté divine, nous nous sommes séparées.
14 mars 1900
Le confesseur m'avait demandé de prier le Seigneur pour qu'il me manifeste la manière d'attirer les âmes au catholicisme et d'éliminer l'incroyance. J'ai prié Jésus sur ce point pendant plusieurs jours et il daigna aborder cette question.
Ainsi, ce matin, je me suis trouvée hors de mon corps, transportée dans un jardin. Il me sembla que c'était le jardin de l'Église. Il y avait là beaucoup de prêtres et d'autre dignitaires qui discutaient sur la question. Un chien immense et puissant vint et laissa la plupart si effrayés et épuisés qu'ils se sont laissés mordre par la bête. Par la suite, ils se retirèrent de la réunion comme des peureux.
Cependant le chien féroce n'avait pas la force de mordre ceux qui avaient Jésus dans leur coeur comme le centre de toutes leurs actions, de toutes leurs pensées et de tous leurs désirs. Ah oui! Jésus était le bouclier de ces personnes; la bête devint si faible devant elles qu'elle n'avait pas la force de respirer. Pendant que les gens discutaient, j'ai entendu Jésus qui disait derrière mon dos:
«Toutes les autres sociétés connaissent ceux qui appartiennent à leur groupe. Seulement mon Église ne sait pas qui sont ses fils. Le premier pas est de savoir quels sont ceux qui lui appartiennent. Vous pouvez les connaître en établissant une réunion à laquelle ceux qui sont catholiques seront invités, à un endroit bien choisi pour une telle réunion. Et là, avec l'aide de laïcs catholiques, établissez ce qui doit être fait.
«Le deuxième pas est d'obliger les catholiques présents à se confesser, ceci étant la chose principale qui renouvelle l'homme et en fait un vrai catholique. Ceci n'est pas seulement pour ceux qui assistent, mais aussi pour celui qui est le supérieur. Il devra aussi obliger ses sujets à se confesser. Pour ceux qui refuseront, il devra avec courtoisie les congédier.
«Quand chaque prêtre aura formé le groupe de ses catholiques, on pourra ensuite faire d'autres pas. Et pour reconnaître les temps appropriés pour avancer, on doit faire comme pour les arbres qui ont besoin d'être émondés. Les arbres émondés produisent des fruits de qualité, mais si l'arbre n'est pas émondé, il affiche un bel étalage de branches feuillues et de fleurs, mais il n'a pas suffisamment de sève et de force pour transformer autant de fleurs en fruits. Puis, quand une grosse pluie ou un coup de vent arrive, les fleurs tombent et l'arbre devient dénudé. Il en va ainsi pour les choses de la religion.
«Premièrement, vous devez former un corps de catholiques suffisant pour se tenir debout devant les autres groupes. Ensuite, vous pouvez entrer dans les autres groupes pour n'en former plus qu'un.»
Après qu'il eut dit cela, je ne l'ai plus entendu. Sans même le revoir, je me suis retrouvée en mon corps. Qui pourrait dire ma peine de ne pas avoir vu Jésus béni pendant toute la journée et toutes les larmes que j'ai versées!
15 mars 1900
Puisque Jésus continuait d'être absent, j'étais consumée par la peine et j'ai senti en moi monter une fièvre au point d'en devenir délirante. Le confesseur vint pour célébrer le sacrifice divin et j'ai reçu la communion. Cependant, je n'ai pas vu mon cher Jésus comme d'habitude quand je communie. C'est pourquoi j'ai commencé à parler d'une manière insensée:
«Dis-moi, mon Bien, pourquoi ne te montres-tu pas? Il me semble que cette fois je n'ai pas occasionné ton évasion! Quoi? Tu me laisses tout simplement? Ah! pas même des amis de cette terre agissent de cette manière. Quand il ont à partir, au moins ils disent au revoir. Et tu ne me dis même pas au revoir! Peut-on agir de cette manière? Pardonne-moi si je parle comme cela. C'est la fièvre qui me rend délirante et qui me fait tomber dans cette folie!»
Qui pourrait dire toutes les idioties que je lui ai ainsi dites? J'étais délirante et je pleurais. À un moment, Jésus montrait une main, à un autre, un bras. J'ai vu le confesseur qui me donna l'autorisation de souffrir la crucifixion. Ainsi contraint par l'obéissance, Jésus se montra. Je lui dis: «Pourquoi ne te montrais-tu pas?»
Et lui, d'un ton sévère, me dit: «Ce n'est rien! Ce n'est rien! C'est seulement que je veux châtier la terre. Mais le fait d'être en bonne relation avec ne fût-ce qu'une seule personne me rend désarmé et je n'ai plus la force de mettre les châtiments en marche; quand tu vois que je veux envoyer des châtiments, tu commences à dire: "Verse-les sur moi. Fais-moi souffrir." Alors je me sens vaincu par toi et je ne passe jamais aux châtiments. Mais, pendant ce temps, l'homme ne fait que devenir plus provoquant.»
Le confesseur m'autorisa à souffrir la crucifixion. Mais Jésus se montra lent à procéder, contrairement aux autres fois où il passait immédiatement aux actes. Il me dit: «Que veux-tu faire?» Je lui répondis: «Seigneur, ce que tu veux.» Se tournant alors vers le confesseur, il lui dit d'un ton sérieux: «Veux-tu, toi aussi, me lier en lui donnant cette permission pour que je la fasse souffrir?»
Pendant qu'il disait cela, il commença à me faire partager les douleurs de la Croix. Par la suite, pacifié, il déversa en moi son amertume. Puis il dit: «Où est le confesseur?» Je répondis: «Je ne sais pas. Il n'est sûrement plus avec nous.» Jésus dit: «Je veux le voir car, puisqu'il m'a rafraîchi, je veux moi aussi le rafraîchir.»
17 mars 1900
Ce matin, Jésus béni me montra le Saint-Père avec des ailes étendues. Il était à la recherche de ses enfants pour les rassembler sous ses ailes. J'ai entendu ses gémissements: «Mes enfants, combien de fois j'ai essayé de vous rassembler sous mes ailes, mais vous me fuyez. Par pitié, entendez mes gémissements et compatissez à ma douleur!» Il pleurait amèrement. Il semblait que ce n'était pas seulement des laïcs qui s'écartaient du Pape, mais aussi des prêtres; et cela lui donnait des douleurs plus grandes encore. Comme il est pénible de voir le Pape dans cet état!
Après, j'ai vu Jésus faire écho aux gémissements du Saint-Père en disant: «Parmi ceux qui sont restés fidèles, quelques-uns vivent pour eux-mêmes; ils n'ont pas le zèle de s'exposer pour ma gloire et pour le bien des âmes. D'autres sont retenus par la peur. D'autres parlent, proposent et promettent, mais ne passent jamais aux actes.» Puis il disparut.
Un peu plus tard il revint et je me suis sentie toute anéantie par sa présence. Me voyant anéantie, il me dit: «Ma fille, plus tu t'abaisses, plus je me sens attiré à me courber vers toi et à te remplir de mes grâces. L'humilité attire ma lumière.»
20 mars 1900
Ayant reçu la sainte communion, j'ai vu mon doux Jésus. Il m'invita à sortir avec lui, à la condition cependant que partout où nous irions, si je voyais qu'il était contraint par les péchés d'envoyer des châtiments, je ne m'opposerais pas. Nous sommes ainsi allés de par le monde.
En premier, j'ai vu que tout était desséché en certains endroits. J'ai dit à Jésus: «Seigneur, que feront ces pauvres gens s'ils manquent de nourriture pour se nourrir? Oh! tu peux tout. Juste comme tu as fait que ces terres se dessèchent, rends-les florissantes.» Comme il portait une couronne d'épines, j'ai tendu mes mains en disant: «Mon Bien, qu'est-ce que ces personnes t'ont fait? Peut-être t'ont-elles mis cette couronne d'épines? Alors, donne-la moi. Ainsi, tu seras apaisé et tu leur donneras de la nourriture afin qu'ils ne périssent pas.»
Prenant sa couronne d'épines, je l'ai pressée sur ma tête. Comme je faisais cela, Jésus me dit: «Il est bien évident que je ne peux pas t'amener avec moi, car t'amener avec moi et ne pouvoir rien faire, c'est la même chose.» Je lui répondis: «Seigneur, je n'ai rien fait! Pardonne-moi si tu penses que j'ai mal agi. Mais, par pitié, garde-moi avec toi.» Il me dit: «Tes façons d'agir me lient complètement!» Et je poursuivis: «Ce n'est pas moi qui fais ainsi, c'est toi-même car, me trouvant avec toi, je vois que tout t'appartient et il me semble que si je ne prends pas soin de tes choses, je ne prends pas soin de toi. Par conséquent, tu dois me pardonner si j'agis de cette manière, car je le fais par amour pour toi. Tu ne dois pas m'écarter de toi pour cela!»
Ensuite, nous avons continué notre tournée. Je faisais tout ce que je pouvais pour ne rien dire afin de ne pas lui donner l'occasion de me congédier. Mais quand je ne pouvais plus me retenir, je commençais à m'opposer. Nous sommes arrivés à un point en Italie où on était à inventer un moyen de provoquer un grand écroulement, mais je ne comprenais pas ce que c'était. J'ai commencé à dire: «Seigneur, ne permets pas cela! Ces pauvres gens, que feront-ils?» Voyant que je devenais anxieuse et que je voulais l'empêcher d'agir, il me dit avec autorité: «Recule, recule!»
Prenant une ceinture pleine de clous et d'épingles qui était enfoncée dans son Corps et qui le faisait beaucoup souffrir, il ajouta: «Recule et prends cette ceinture avec toi; tu me soulageras beaucoup.» Je lui dis: «Oui, je vais la mettre à ta place, mais laisse-moi rester avec toi.» Il ajouta: «Non! Recule!» Il m'a dit cela avec une telle autorité que, incapable de résister, je suis retournée dans mon corps. Je n'ai pas pu comprendre ce qu'était cette invention.
25 mars 1900
Ce matin, en arrivant, mon adorable Jésus me dit: «Comme le soleil est la lumière du monde, ainsi le Verbe de Dieu, en s'incarnant, devint la lumière des âmes. Comme le soleil matériel donne la lumière à tous en général et à chacun en particulier (de sorte que chacun peut en jouir comme si elle lui était personnelle), ainsi le Verbe, alors qu'il donne la lumière en général, la donne à chacun en particulier; chacun peut l'avoir comme si elle était son bien personnel.»
Qui pourrait dire tout ce que j'ai compris concernant cette divine lumière et les effets bénéfiques qu'elle procure aux âmes. Il me sembla qu'en possédant cette lumière, l'âme fait fuir les ténèbres de l'esprit comme le soleil matériel fait fuir les ténèbres de la nuit. Si l'âme est froide, cette divine lumière la réchauffe; si elle est dénuée de vertus, elle la rend fertile; si elle est infectée par la tiédeur, elle la stimule à la ferveur. En un mot, le divin Soleil inonde l'âme de tous ses rayons et va jusqu'à la transformer en sa propre lumière.
Comme je me sentais épuisée, Jésus me dit: «Ce matin, je veux me réjouir en toi.» Et il commença à faire ses artifices amoureux coutumiers.
1er avril 1900
Après que je l'eus attendu beaucoup, mon doux Jésus se montra dans mon coeur. Je le vis comme un soleil qui envoyait ses rayons. Au centre de ce soleil, je percevais l'auguste Figure de Notre-Seigneur. Mais ce qui m'émerveillait le plus était que je voyais plusieurs servantes habillées de blanc avec des couronnes sur la tête; elles entouraient le divin Soleil et se nourrissaient de ses rayons. Oh! comme elles étaient belles, modestes, humbles et toutes appliquées à se réjouir en Jésus!
Ne sachant pas la signification de tout cela et ayant un peu peur, j'ai demandé à Jésus de me dire qui étaient ces demoiselles. Il me dit: «Ces demoiselles sont tes passions que moi, par ma grâce, j'ai changées en autant de vertus et qui me font un noble cortège. Elles sont toutes à ma disposition et je les nourris de mes grâces continuelles.»
Ah! Seigneur, je me sens si mauvaise que j'ai honte de moi!
2 avril 1900
Ce matin, j'ai beaucoup souffert de l'absence de mon cher Jésus. Néanmoins, il allait me récompenser de ma peine en répondant à un désir de connaître une certaine chose qui m'habitait depuis longtemps. Voici:
Je l'appelais par des prières, des larmes et des chants (qui sait, peut-être qu'il serait touché par ma voix et qu'il se laisserait trouver), mais tout cela en vain. J'ai répété mes pleurs. J'ai demandé à beaucoup où je pourrais le trouver. Finalement, au moment où je ne pouvais plus continuer et où j'ai senti mon coeur éclater, je l'ai trouvé. Mais je l'ai vu de dos. À ce moment, je me suis souvenu d'une résistance que je lui avais faite (que je dirai dans le livre du confesseur) et je lui en ai demandé pardon. Il me sembla ensuite que nous étions en bons termes. Il me demanda ce que je voulais et je lui dis:
«Aie la gentillesse de m'indiquer ce que je dois faire quand je me trouve avec très peu de souffrance ou quand tu ne viens pas et que, si tu viens, tu le fais comme une ombre. Alors, ne te voyant pas, je ne quitte pas mes sens et, dans cet état, je trouve que je fais les choses par moi-même et qu'il n'est pas nécessaire d'attendre la venue du confesseur pour sortir de mon état.
Que tu souffres ou que tu ne souffres pas, répondit Jésus, que je vienne ou que je ne vienne pas, ton état est toujours celui de victime, conformément à ma Volonté et à la tienne. Je ne juge pas suivant ce qui est fait, mais suivant la volonté avec laquelle la personne agit.
Mon Seigneur, lui dis-je, ce que tu dis est bien; mais je me sens inutile et je trouve que beaucoup de temps est perdu. Je me sens concernée par ce que tu dis et, en même temps, j'ai un peu peur. Je ne suis pas sûre que de faire venir le confesseur soit selon ta Volonté.
Penses-tu, poursuivit Jésus, que de faire venir le confesseur soit un péché?»
Non, mais je crains que ce ne soit pas ta Volonté.
Tu dois fuir l'ombre même du péché et, à tout le reste, n'accorde même pas une pensée.
Mais si ce n'est pas ta Volonté, quel bénéfice y a-t-il à ce que le confesseur vienne?
Oh! il m'apparaît que ma fille veut fuir l'état de victime, n'est-ce pas?
Non, mon Seigneur, ajoutai-je rougissante. Je dis cela pour les périodes où tu ne me fais pas souffrir et où tu ne viens pas. Fais-moi souffrir et je resterai tranquille.
Il me semble que tu veux fuir. En te distrayant de moi et en essayant de changer cette situation, tu es occupée à autre chose. Et alors, quand je viens, je te trouve non préparée et je suis porté à faire volte-face pour aller ailleurs.
Puisse cela ne jamais arriver, Seigneur, lui dis-je terrifiée. Je ne veux rien savoir d'autre que ta très sainte Volonté.
Sois calme et attends le confesseur, termina Jésus.»
Ayant dit cela, il disparut. Je me suis sentie soulagée d'un grand poids par cette conversation avec Jésus. Néanmoins, la peine douloureuse que je ressens quand Jésus me prive de sa présence n'a pas cessée.
9 avril 1900
Ce matin, après avoir reçu la sainte communion, je me suis trouvée dans une mer d'amertume parce que je n'ai pas vu Jésus, mon plus grand Bien. Alors que tout mon intérieur était en larmes, il se montra brièvement. Presqu'en me réprimandant, il me dit: «Sais-tu que ne pas t'abandonner à moi, c'est vouloir usurper les droits de ma Divinité et ainsi me faire un grand affront? Abandonne-toi à moi et apaise tout ton intérieur en moi et tu trouveras la paix. Et en trouvant la paix, tu me trouveras.»
Ayant dit cela, il disparut comme dans un éclair, sans plus se montrer. «Ô Seigneur, veux-tu, s'il te plaît, me garder toute abandonnée et serrée dans tes Bras de telle façon que je ne puisse jamais m'échapper? Autrement, j'aurai toujours ces petites fuites.»
10 avril 1900
Jésus béni ne venait pas! Ô Dieu, quelle douleur indescriptible que d'être séparée de toi! J'ai essayé de mon mieux de rester en paix et abandonnée en lui, mais sans résultat. Mon pauvre coeur ne pouvait pas résister. J'ai fait tout ce que je pouvais pour me calmer et je me suis dit: «Mon coeur, attendons encore un peu. Peut-être viendra-t-il. Utilisons quelques stratagèmes pour le faire venir.»
Je lui ai dit: «Seigneur, viens; il se fait tard et tu n'es pas encore venu! Ce matin, je fais tout ce que je peux pour rester calme, mais tu ne te laisses quand même pas trouver. Seigneur, je t'offre le martyre d'être privée de toi comme un cadeau par amour pour toi et pour que tu viennes. C'est vrai que je ne suis pas digne que tu viennes, mais ce n'est pas pour cette raison que je te cherche, mais par amour pour toi et parce que, si tu n'es pas là, je sens que ma vie est manquée.»
Comme il ne venait toujours pas, je lui ai dit: «Seigneur, ou bien tu viens, ou bien je vais te fatiguer avec mes paroles; et quand tu seras fatigué, alors tu viendras bien.» Qui pourrait dire toutes les absurdités que je lui ai ainsi dites? Ce serait trop long de toutes les mentionner.
Par la suite, il se montra subrepticement comme s'il venait d'être réveillé de son sommeil. Puis il se montra plus distinctement et me transporta hors de mon corps. Il me dit: «Tout comme l'oiseau doit battre des ailes pour prendre son envol, ainsi doit faire l'âme pour venir vers moi. Dans ses élans, elle doit battre des ailes de son humilité. Alors, par ses battements, elle déploie comme un aimant qui m'attire de telle manière que, quand elle prend son envol vers moi, je prends le mien vers elle.»
Ah! Seigneur, il est évident qu'il me manque l'aimant de l'humilité. Si, le long du chemin, je disposais partout l'aimant de l'humilité, je ne me fatiguerais pas autant quand je suis dans l'attente de ta venue!
16 avril 1900
Après plusieurs jours amers de privation et de réprimandes de la part de Jésus béni pour mes ingratitudes et mes résistances à sa Volonté et à sa grâce, ce matin il m'a dit:
«Ma fille, le passeport pour entrer dans la béatitude que l'âme peut posséder sur cette terre doit être paraphé de trois signatures: la résignation, l'humilité et l'obéissance. La résignation parfaite à ma Volonté liquéfie nos deux volontés et les fond en une seule. C'est du sucre et du miel. Mais, par la résistance à ma Volonté, le sucre devient amer et le miel se transforme en poison. Il n'est pas suffisant d'être résigné, mais l'âme doit être convaincue aussi que le plus grand bien pour elle et la meilleure manière de me glorifier est de toujours faire ma Volonté.
«Il faut aussi la signature de l'humilité, car l'humilité produit la connaissance de ma Volonté. Mais ce qui ennoblit les vertus de résignation et d'humilité, les fortifie, les rend persévérantes, les lie ensemble et les couronne, c'est l'obéissance! Ah oui! l'obéissance détruit complètement la volonté propre et tout ce qui est matériel, spiritualise tout et se pose sur la créature comme une couronne. Sans l'obéissance, la résignation et l'humilité sont sujettes à l'instabilité. D'où la stricte nécessité de la signature de l'obéissance pour que soit validé le passeport permettant de passer dans le royaume de la félicité spirituelle dont l'âme peut jouir ici-bas.
«Sans les signatures de la résignation, de l'humilité et de l'obéissance, le passeport sera sans valeur et l'âme sera toujours éloignée du royaume de la félicité; elle sera contrainte à rester dans l'inquiétude, la peur et les dangers. Pour sa propre disgrâce, elle aura comme dieu son propre ego et elle sera courtisée par l'orgueil et la rébellion.»
Puis il me transporta hors de mon corps dans un jardin qui sembla être celui de l'Église. Là, je vis cinq ou six personnes, prêtres et séculiers, qui s'étaient égarées et qui, s'unissant aux ennemis de l'Église, provoquaient une rébellion. Quelle douleur de voir Jésus béni pleurer sur le triste état de ces personnes!
Par la suite, je vis dans les airs un nuage d'eau rempli de morceaux de glace qui tombaient sur la terre.
20 avril 1900
Ces derniers temps, mon aimable Jésus venait alors qu'il faisait encore sombre et ne disait rien. Ce matin, après qu'il eut renouvelé en moi les souffrances de la croix par deux fois, il me regarda avec tendresse pendant que je souffrais les douleurs du transpercement par les clous et il me dit:
«La croix est une fenêtre où l'âme voit la Divinité. On ne doit pas seulement aimer et désirer la croix, mais aussi apprécier l'honneur et la gloire qu'elle procure. Durant ma vie terrestre, je me glorifiais dans la croix et les souffrances. J'ai tellement aimé cela que, pendant toute ma Vie, je n'ai pas voulu être un seul moment sans la croix. Il faut agir et devenir comme Dieu.»
Qui pourrait dire tout ce que j'ai compris sur la croix par ces Paroles de Jésus? Malheureusement, je n'ai pas les mots pour l'exprimer. Ô Seigneur, je te prie de me garder toujours clouée à la croix afin qu'ayant toujours cette divine fenêtre devant moi, je sois purifiée de tous mes péchés et que je devienne toujours plus semblable à toi!
21 avril 1900
Me trouvant dans mon état habituel, j'étais habitée par une certaine peur à cause d'une chose personnelle. Mon doux Jésus vint et me dit: «Les vases sacrés ont besoin d'être nettoyés de temps en temps. Vous êtes des vases sacrés en qui je demeure. Ainsi, il est nécessaire que je vous nettoie de temps en temps, c'est-à-dire que je vous visite par quelque tribulation pour que je puisse vivre en vous avec plus de dignité. Par conséquent, sois calme!»
Ensuite, après que j'eus reçu la sainte communion et qu'il eut renouvelé en moi les souffrances de la crucifixion, il ajouta: «Ma fille, comme elle est précieuse la croix! Regarde-la un peu. Par le sacrement de mon Corps, je me donne à l'âme, je l'unis à moi et je la transforme au point qu'elle devient identifiée à moi. Avec l'assimilation des saintes espèces, cette union spéciale est dissoute, mais pas la croix. Dieu la prend et l'unit à l'âme pour toujours. Et, pour une plus grande sécurité, il s'établit lui-même comme un sceau. Ainsi, Dieu scelle la croix dans l'âme afin qu'il n'y ait jamais de séparation entre Dieu et l'âme crucifiée.»
23 avril 1900
Ce matin, me trouvant hors de mon corps, j'ai vu que mon doux Jésus souffrait beaucoup et je lui ai demandé de me faire partager ses souffrances. Il me dit: «Plutôt, je vais te remplacer et tu agiras comme mon infirmière.» Ainsi, il me sembla que Jésus prenait place dans mon lit et que j'étais debout près de lui. J'ai commencé par soulever sa Tête bénie et, une à une, j'ai enlevé toutes les épines qui y étaient enfoncées. Ensuite, j'ai examiné toutes les blessures de son saint Corps; j'ai essuyé leur sang et les ai baisées, mais je n'avais rien pour les oindre et alléger sa souffrance. Alors j'ai vu que de ma poitrine coulait une huile; je l'ai prise pour oindre ses blessures, mais je le faisais avec une certaine crainte parce que je ne savais pas la signification de cette huile. Il me fit comprendre que la résignation à la divine Volonté est une huile qui, pendant qu'on en oint Jésus, allège ses douleurs et ses blessures.
Après que j'eus passé un bon moment à rendre ce service à mon cher Jésus, il disparut, et je me retrouvai dans mon corps.
25 avril 1900
Alors que j'étais hors de mon corps et que je ne voyais pas mon cher Jésus, j'ai dû le chercher longtemps avant de le trouver. Finalement, je l'ai trouvé dans les bras de la Reine Maman, mais il ne me regarda même pas. Qui pourrait dire la souffrance que j'ai ressentie en voyant que Jésus ne se souciait pas de moi! Par la suite, j'ai remarqué sur sa Poitrine une petite perle. Elle était si resplendissante qu'elle inondait de sa lumière toute sa très sainte Humanité. Je lui ai demandé ce qu'elle signifiait.
Il me dit: «La pureté dans tes souffrances, même les plus petites, que tu acceptes uniquement par amour pour moi, et ton désir de souffrir plus si je te l'accorde, voilà la cause de tant de lumière. Ma fille, la pureté d'intention est d'une telle grandeur que celui qui agit pour l'unique raison de me plaire inonde de lumière tous ses travaux. Celui qui n'agit pas avec droiture ne fait que répandre la noirceur, même dans le bien qu'il fait.»
Ensuite, j'ai vu que Notre-Seigneur portait sur sa Poitrine un miroir très brillant. Il me sembla que ceux qui marchent dans la droiture sont complètement absorbés par ce miroir et ceux qui ne marchent pas dans la droiture restent en dehors et sont inaptes à recevoir l'empreinte de l'image de Jésus béni.
27 avril 1900
Ce matin, après que j'eus reçu la sainte communion, il me sembla que le confesseur voulait que je souffre la crucifixion. Au même instant, j'ai vu mon ange gardien m'étendre sur la croix pour me faire souffrir. Par la suite, j'ai vu mon doux Jésus en grande sympathie avec moi. Il me dit: «Ta souffrance est mon réconfort.» Et il manifesta une joie indicible pour ma souffrance. Le confesseur qui, par le moyen de l'obéissance, m'avait donné de souffrir, lui avait procuré ce réconfort.
Jésus ajouta: «Puisque le sacrement de l'Eucharistie est le fruit de la croix, pour cette raison je me sens plus désireux de t'accorder de souffrir quand tu as reçu mon Corps, car, quand je te vois souffrir, il me semble que ma Passion continue en toi, pas mystiquement mais réellement, pour le bénéfice des âmes. Et cela est pour moi un grand soulagement, parce que je recueille alors les vrais fruits de ma Croix et de l'Eucharistie.»
Ensuite il dit: «Jusqu'à maintenant, c'est par l'obéissance que tu as souffert. Veux-tu que je m'amuse un peu en renouvelant en toi la crucifixion par mes propres Mains?» Même si je ressentais encore beaucoup de souffrance, vu que les douleurs de la croix étaient encore toutes fraîches en moi, je lui dis: «Va de l'avant, Seigneur, je suis entre tes Mains; fais de moi ce que tu voudras.»
Alors Jésus, très heureux, commença à enfoncer les clous dans mes mains et mes pieds. J'ai senti une telle intensité de douleur que je ne sais pas comment je suis restée en vie. Cependant, j'étais heureuse parce que je rendais Jésus heureux. Après qu'il eut fixé les clous, venant près de moi, il dit: «Comme tu es belle! Et combien ta beauté grandit à travers tes souffrances! Oh! comme tu m'es chère! Mes Yeux sont posés sur toi parce qu'ils trouvent en toi mon image.»
Il a dit bien d'autres choses qu'il m'apparaît inutile de rapporter ici; premièrement, parce que je suis mauvaise et, deuxièmement, parce que je ne saisis pas de quelle manière Jésus me parle, ce qui amène en moi de la confusion et de l'embarras. J'espère que le Seigneur me rendra bonne et belle. Ainsi, avec la diminution de ma gêne, je serai capable de tout écrire. Mais, pour le moment, je m'arrête ici.
1er mai 1900
Après que j'eus reçu la sainte communion, mon doux Jésus, plein de bonté, se montra à moi. Il me sembla que le confesseur voulait que je subisse la crucifixion, mais ma nature sentait de la répugnance à s'assujettir à cela. Mon doux Jésus, pour m'encourager, me dit:
«Ma fille, si l'Eucharistie est un gage de gloire future, la croix est la monnaie avec laquelle acheter cette gloire. L'Eucharistie est le baume qui prévient la corruption; elle est comme ces herbes aromatiques qui, lorsque les cadavres en sont oints, ils sont préservés de la corruption. Elle donne l'immortalité à l'âme et au corps. La croix, de son côté, embellit l'âme; elle est si puissante que, s'il y a eu contraction de dettes, elle est une garantie pour l'âme. Elle acquitte chaque dette et, après qu'elle a satisfait pour toutes, elle crée pour l'âme un trône magnifique en vue de la gloire future. La croix et l'Eucharistie sont pour ainsi dire complémentaires.»
Puis il ajouta: «La croix est mon lit fleuri: non pas parce que j'ai peu souffert ses douleurs terribles mais parce que, par elle, j'ai ouvert un nombre incommensurable d'âmes à la grâce. J'ai vu par elle s'élever tant de belles fleurs qui ont produit tant de délicieux fruits célestes. Ainsi, quand j'ai vu tant de bien, j'ai regardé ce lit de souffrances comme un délice; je me réjouissais dans la croix et les souffrances.
Toi aussi, ma fille, accepte les souffrances comme tes délices, prends plaisir à être crucifiée sur ma Croix. Non, non! je ne veux pas que tu craignes la souffrance comme si tu étais une personne paresseuse. Courage! Travaille comme une personne courageuse, et prépare-toi à souffrir.»
Pendant qu'il parlait, j'ai vu que mon bon ange gardien était prêt à me crucifier. De moi-même j'ai étendu les bras et l'ange me crucifia. Le bon Jésus se réjouissait de ma souffrance. J'étais bien contente qu'une âme aussi misérable que moi puisse donner de la joie à Jésus. Il me semblait que c'était un grand honneur pour moi de souffrir par amour pour lui.
3 mai 1900
Ce matin, je me suis trouvée hors de mon corps et j'ai vu les cieux parsemés de croix: des petites, des moyennes et des grandes. Les plus grandes donnaient plus de lumière. C'était très beau de voir tant de croix, plus resplendissantes que le soleil, ornant le firmament.
Après cela, il me sembla que les cieux s'ouvrirent. On y voyait et entendait la fête qui avait été préparée par les bienheureux en l'honneur de la Croix. Ceux qui avaient souffert davantage étaient les plus célébrés en ce jour. On distinguait d'une façon spéciale les martyrs ainsi que ceux qui avaient souffert secrètement (les âmes victimes). En ce séjour béni, la Croix et ceux qui avaient souffert le plus étaient particulièrement honorés.
Pendant que je voyais cela, une voix résonnait au plus haut des cieux et disait: «Si le Seigneur n'envoyait pas de croix sur la terre, il serait comme le père qui n'a pas d'amour pour ses enfants et qui, plutôt que de les vouloir honorés et riches, les veut déshonorés et pauvres.»
Le reste de ce que j'ai vu de cette fête, je n'ai pas de mots pour l'exprimer. Je le sens en moi, mais je ne sais pas comment l'exprimer. Ainsi donc, je me tais.
9 mai 1900
Après plusieurs jours de privation et de trouble, je me suis trouvée ce matin plus particulièrement troublée. Mon adorable Jésus vint et me dit: «Par ton trouble, tu as dérangé mon doux repos. Ah oui! tu m'empêches de poursuivre mon repos.» Qui pourrait dire combien je fus humiliée en entendant que j'avais perturbé le repos de Jésus! Alors, je devins calme pour un temps, mais, par la suite, je me suis retrouvée plus troublée qu'avant, car je ne savais pas où tout cela allait aboutir.
Après quelques paroles de Jésus, je me suis trouvée hors de mon corps et, regardant la voûte des cieux, j'y ai vu trois soleils. L'un semblait placé à l'est, l'autre à l'ouest et le troisième au sud. Ils rayonnaient d'un tel éclat que les rayons de l'un se fondaient avec ceux des autres. Cela donnait l'impression qu'il n'y avait qu'un seul soleil. Il me semblait percevoir le mystère de la Très Sainte Trinité ainsi que le mystère de l'homme, créé à l'image de Dieu par ces trois Puissances.
J'ai aussi compris que ceux qui étaient dans cette lumière étaient transformés: leur mémoire par le Père, leur intelligence par le Fils et leur volonté par le Saint-Esprit. Combien d'autres choses j'ai comprises que je suis incapable d'exprimer.
13 mai 1900
Le même état continuait, et peut-être pire encore, quoique je faisais tout ce que je pouvais pour ne pas me troubler, comme le demandait l'obéissance. Néanmoins, je ne cessais de sentir la pesanteur de l'abandon qui m'écrasait et même m'anéantissait. «Ô Dieu, quel terrible état! Au moins dis-moi: où t'ai-je offensé? Quelle est la cause de cela? Ah! Seigneur! si tu continues de cette manière, je pense que je n'aurai plus la force.»
Finalement, Jésus se montra. Mettant sa Main sous mon menton dans un geste de compassion, il me dit: «Pauvre fille, comme tu es exténuée!» Puis, me faisant partager ses souffrances, il disparut à la vitesse de l'éclair, me laissant plus affligée qu'auparavant. Je me sentais comme s'il n'était pas venu depuis longtemps. Je me sentais angoissée de vivre encore. Ma vie était une continuelle agonie. «Ah! Seigneur! apporte-moi de l'aide et ne me laisse pas ainsi abandonnée, même si c'est ce que je mérite.»
17 mai 1900
Le même état de privation et d'abandon continuait. Je me trouvai hors de mon corps et j'ai vu un déluge accompagné de grêle. Il semblait que plusieurs villes étaient inondées et qu'il y avait beaucoup de dommages. Cela me plongeait dans une grande consternation et je voulais contrer ce fléau; mais comme j'étais seule, sans la compagnie de Jésus, j'ai senti mes pauvres bras trop faibles pour le faire. Puis, à ma grande surprise, j'ai vu une vierge venir (il me sembla qu'elle était d'Amérique). Elle de son côté et moi de l'autre, nous réussissions à contrer en grande partie ce fléau. Par la suite, quand nous nous sommes rejointes, j'ai remarqué que cette vierge portait les signes de la Passion: elle portait une couronne d'épines comme moi.
Puis, un être ressemblant à un ange dit: «Ô puissance des âmes victimes! Ce que nous, les anges, sommes incapables de faire, elles peuvent le faire par leurs souffrances. Oh! si les hommes savaient seulement le bien qui vient de ces âmes, le bien privé autant que le bien public, ils s'affaireraient à implorer Dieu pour que ces âmes se multiplient sur la terre.»
Après cela, nous étant recommandées l'une l'autre au Seigneur, nous nous sommes quittées.
18 mai 1900
J'étais encore privée de mon adorable Jésus. Au mieux, il se montrait comme une ombre. Oh! que d'amertume cela me causait! Combien de larmes je versais!
Ce matin, après l'avoir attendu et cherché, je le trouvai près de moi, très affligé, avec la couronne d'épines transperçant sa Tête. Je la lui enlevai très doucement et la mis sur ma propre tête. Oh! combien méchante je me sentis en sa présence! Je n'avais pas la force de dire un seul mot. Avec compassion, il me dit: «Courage! Ne sois pas effrayée! Essaye de remplir ton intérieur de ma présence et de toutes les vertus. Quand je viendrai causer le débordement en toi, je t'amènerai au Ciel et toutes tes privations seront terminées.»
Puis, d'un ton affligé, il ajouta: «Prie, ma fille, parce qu'il y a trois jours de préparés, trois jours éloignés l'un de l'autre, des jours de tempêtes, de grêle, de tonnerre et d'inondations qui vont grandement ravager les hommes et les plantes.»
Ayant dit cela, il disparut, me laissant un peu soulagée, mais avec une interrogation: qui sait quand le débordement dont il a parlé arrivera? Et si jamais il arrive, peut-être que j'aurai à m'en prémunir.
20 mai 1900
Me trouvant hors de mon corps, il me sembla que nous étions dans la nuit: j'ai vu l'univers entier, l'ordre parfait de la nature, le ciel étoilé, le silence de la nuit. Il me semblait que tout avait une signification. Pendant que je contemplais cela, il me sembla voir Notre-Seigneur qui me disait:
«Toute la nature invite au repos. Mais qu'est le vrai repos? C'est le repos intérieur, le silence de tout ce qui n'est pas Dieu. Tu vois les étoiles scintiller d'une lumière modérée, pas éblouissante comme celle du soleil, le silence de toute la nature, du genre humain et des animaux. Tous cherchent une place, un refuge où être en silence et se reposer de la fatigue de la vie, chose qui est nécessaire pour le corps et beaucoup plus pour l'âme.
«Il est nécessaire de se reposer dans son propre centre qui est Dieu mais, pour pouvoir le faire, le silence intérieur est nécessaire, au même titre que, pour le corps, le silence extérieur est nécessaire afin de pouvoir dormir paisiblement. En quoi donc consiste ce silence intérieur? À faire taire ses passions en les tenant en échec, à imposer le silence à ses désirs, ses inclinations et ses sentiments, en somme, à tout ce qui n'est pas Dieu. Et quel est le moyen de parvenir à cela? Le moyen unique et indispensable est de démolir son être selon la nature en le réduisant à rien, comme c'était sa situation avant qu'il soit créé. Quand il a été réduit à rien, il faut le recouvrer en Dieu.
«Ma fille, toute chose a commencé dans le néant, même cette grande machine de l'univers que tu regardes et qui a tant d'ordre. Si, avant d'avoir été créée, elle avait été quelque chose, je n'aurais pas pu y faire intervenir ma Main créatrice pour la créer avec une telle maîtrise, si parée et splendide. J'aurais eu à défaire d'abord tout ce qui aurait existé avant, puis à tout refaire comme il m'aurait plu.
«Tous mes travaux dans l'âme débutent à partir du néant; quand il y a un mélange d'autre chose, ce n'est pas convenable pour ma Majesté d'y descendre et d'y travailler. Mais, quand l'âme est réduite à néant et qu'elle vient vers moi, plaçant son être dans le mien, alors je travaille comme le Dieu que je suis et elle trouve son vrai repos.»
Qui pourrait dire tout ce que j'ai compris à partir de ces propos de Jésus béni? Oh! que mon âme serait heureuse si je pouvais défaire mon pauvre être pour pouvoir recevoir la divine Essence de mon Dieu! Oh! comme je pourrais alors être sanctifiée! Mais quelle folie m'habite! Où est mon cerveau pour que je ne l'aie pas encore fait? Quelle est cette misère humaine qui, plutôt que de rechercher ce vrai bien et de voler très haut, se contente de ramper sur le sol et de vivre dans la saleté et la corruption?
Ensuite, mon bien-aimé Jésus m'amena à l'intérieur d'un jardin où il y avait beaucoup de gens qui se préparaient à assister à une fête. Seulement ceux qui recevaient un uniforme pourront y assister. Mais peu recevaient cet uniforme. Un grand désir de le recevoir me vint. J'insistai tant que je l'obtins. Étant arrivée à l'endroit où je devais recevoir l'uniforme, une vénérable dame m'habilla d'abord de blanc et me mit une épaulette céleste d'où pendait une médaille de la sainte Face de Jésus. Cette médaille était aussi un miroir qui, si on le regardait, permettait de distinguer les plus petits péchés de son âme, à l'aide de la lumière qui se dégageait de la sainte Face.
La dame prit un manteau d'or très fin et m'en couvrit complètement. Il me semblait qu'ainsi vêtue, je pouvais rivaliser avec toutes les vierges de la communauté. Pendant que cela se passait, Jésus me dit: «Ma fille, il suffit que tu sois ainsi habillée. Quand la fête débutera, je t'y t'amènerai. Pour l'instant, retournons voir ce que fait le genre humain.» Ainsi, après m'avoir promenée dans les environs, il me ramena à mon corps.
21 mai 1900
Ce matin, mon adorable Jésus n'est pas venu. Cependant, après que je l'eus attendu un long moment, il vint. En me caressant, il me dit: «Ma fille, sais-tu quel but je poursuis en ce qui te concerne?» Après une pause, il poursuivit: «En ce qui te concerne, mon but n'est pas d'accomplir en toi des choses éclatantes ou d'accomplir par toi des choses qui mettraient en relief mon travail. Mon but est de t'absorber dans ma Volonté et de faire que nous ne fassions qu'un, que tu sois un parfait modèle de conformité de la volonté humaine avec la Volonté divine, ce qui est l'état le plus sublime pour un humain, le plus grand prodige. C'est le miracle des miracles que je projette d'accomplir en toi.
«Ma fille, pour que nos volontés deviennent parfaitement une, ton âme doit être spiritualisée. Elle doit m'imiter. Pendant que je remplis l'âme en l'absorbant en moi, je me fais pur Esprit et je fais en sorte que personne ne puisse me voir. Cela correspond au fait qu'il n'y a en moi aucune matière, mais que tout en moi est très pur Esprit. Si, dans mon Humanité, je me suis revêtu de matière, c'était seulement pour, qu'en tout, je ressemble à un homme et que je sois pour l'homme un modèle parfait de spiritualisation de la matière. L'âme doit tout spiritualiser en elle et en venir à être comme un pur esprit, comme si la matière n'existait plus en elle. Ainsi, nos volontés peuvent parfaitement ne faire qu'un.
«Si, de deux objets, on veut n'en former qu'un, il est nécessaire que l'un renonce à sa propre forme pour épouser celle de l'autre; autrement, ils ne parviendront jamais à ne former qu'une seule entité. Oh! quelle serait ta bonne fortune si, en te détruisant toi-même pour devenir invisible, tu devenais capable de recevoir parfaitement la forme divine! En étant ainsi absorbée en moi, et moi en toi, formant tous deux un seul être, tu finirais par posséder la divine Fontaine et, comme ma Volonté contient tout bien, tu finirais par posséder tout bien, tout don, toute grâce: tu n'aurais pas à chercher ces choses ailleurs qu'en toi-même.
«Puisque les vertus n'ont pas de frontière, la créature immergée dans ma Volonté peut aller aussi loin qu'une créature puisse aller, parce que ma Volonté cause l'acquisition des vertus les plus héroïques et les plus sublimes qu'aucune créature ne peut surpasser. La hauteur de la perfection que l'âme dissoute dans ma Volonté peut atteindre est si grande qu'elle finit par agir comme Dieu. Et ceci est normal parce qu'alors l'âme ne vit plus dans sa propre volonté, mais dans celle de Dieu. Tout étonnement doit alors cesser, puisqu'en vivant dans ma Volonté, l'âme possède la Puissance, la Sagesse et la Sainteté, ainsi que toutes les autres vertus que Dieu lui-même possède.
«Ce que je te dis présentement suffit pour que tu tombes en amour avec ma Volonté et que, moyennant ma grâce, tu coopères autant que tu le peux pour parvenir à tant de biens. L'âme qui en vient à vivre uniquement dans ma Volonté est la reine de toutes les reines, et son trône est si haut qu'il atteint le Trône même de l'Éternel. Elle entre dans les secrets de la très auguste Trinité. Elle participe à l'Amour réciproque du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Oh! combien tous les anges et tous les saints l'honorent, les hommes l'admirent et les démons la craignent, voyant en elle l'Essence divine!»
«Ô Seigneur, quand me feras-tu toi-même parvenir à cet état, vu que je suis incapable de faire quoi que ce soit par moi-même!»
Qui pourrait dire toute la lumière intellectuelle que le Seigneur infusa alors en moi sur l'unité de la volonté humaine avec la Volonté divine! La profondeur des concepts est telle que ma langue n'a pas les mots pour les exprimer. J'ai péniblement été capable de dire ce petit peu, encore que mes paroles sont des non-sens comparées à ce que le Seigneur me fit comprendre très clairement par sa divine lumière.
24 mai 1900
J'étais très affligée à cause de la privation de mon adorable Jésus. Au mieux, il se montrait comme une ombre, le temps d'un éclair. J'avais le sentiment que je ne pourrais plus le voir comme avant.
Alors que je me trouvais au sommet de mon affliction, il se montra tout fatigué, comme s'il avait grand besoin de réconfort. Portant ses Bras à mon cou, il me dit: «Ma bien-aimée, apporte-moi des fleurs et entoure-moi complètement, car je languis d'Amour. Ma fille, le doux parfum de tes fleurs sera un réconfort pour moi et un remède pour mes souffrances, car je languis, je faiblis.» J'ai lui ai immédiatement répondu: «Et toi, mon bien-aimé Jésus, donne-moi quelques fruits, car mon oisiveté et l'insuffisance de mes souffrances augmentent ma propre langueur à une telle extrémité que je faiblis et me sens mourir. Ainsi, je pourrai non seulement te donner des fleurs, mais aussi des fruits pour atténuer ta langueur.»
Jésus me dit: «Oh! comme nous nous comprenons bien! Il me semble que ta volonté fait un avec la mienne.» Pour un moment, je me sentis soulagée comme si l'état dans lequel je me trouvais voulait cesser. Mais, peu de temps après, je me retrouvai plongée dans la même léthargie qu'auparavant. Je me sentais seule et abandonnée, privée de mon plus grand Bien.
27 mai 1900
Ce matin, je me sentais plus affligée que jamais à cause de la privation de mon plus grand Bien. Il se montra et me dit: «Comme un vent violent attaque les gens et pénètre dans leur intérieur de manière à secouer la personne entière, ainsi mon Amour et ma Grâce attaquent et pénètrent le coeur, l'esprit et les parties les plus intimes de l'homme. Cependant, l'homme ingrat rejette ma grâce et m'offense, me causant une peine amère.»
J'étais très confuse à propos de quelque chose et je me sentais broyée en moi-même, quoique je n'osais dire un mot. Je pensais: «Comment se fait-il qu'il ne vient pas? Et quand il vient, que je ne le vois pas clairement? Il semble que j'ai perdu sa clarté; je me demande si je verrai sa belle Figure comme avant.»
Pendant que je réfléchissais ainsi, mon doux Jésus me dit: «Ma fille, pourquoi as-tu peur, puisqu'à travers l'union de nos volontés ta destinée est au Ciel?» Et, voulant m'encourager et sympathiser avec mon chagrin, il ajouta: «Tu es ma nouvelle Oeuvre. Ne te chagrine pas à l'extrême si tu ne me vois pas clairement. Je te l'ai dit l'autre jour: je ne viens pas ici comme à l'accoutumée, parce que je veux punir les gens. Si tu me voyais clairement, tu comprendrais clairement ce que je fais. Et puisque ton coeur est greffé sur le mien, il souffrirait comme le mien. Pour t'épargner ces souffrances, je ne me montre pas clairement.»
Je répliquai: «Qui pourrait dire les tourments dans lesquels tu laisses mon pauvre coeur! Ô Seigneur, donne-moi la force d'endurer la souffrance.»
29 mai 1900
Pendant que je poursuivais dans le même état, je me sentais complètement opprimée et j'avais le plus grand besoin d'aide pour pouvoir supporter d'être privée de mon Bien suprême. Jésus béni, compatissant avec moi, me montra pendant quelques instants sa Face dans l'intérieur de mon coeur, mais pas clairement cette fois encore. Me faisant entendre sa Voix très douce, il me dit: «Courage, ma fille! Laisse-moi terminer de punir et, plus tard, je viendrai comme avant.»
Pendant qu'il parlait ainsi, je lui demandai en mon esprit: «Quelles sont les punitions que tu as commencé d'envoyer?» Il répondit: «La pluie continuelle qui tombe est pire que la grêle et elle aura de tristes conséquences sur les gens.»
Après avoir dit cela, il disparut et je me trouvai hors de mon corps dans un jardin. Là, j'ai vu les récoltes desséchées sur les vignes. Je me suis dit: «Pauvres gens, pauvres gens, que vont-ils faire?» Pendant que je disais cela, j'ai vu à l'intérieur du jardin un petit garçon qui pleurait si fort qu'il assourdissait ciel et terre, mais personne n'avait pitié de lui. Quoique tous l'entendaient pleurer, ils ne faisaient pas attention à lui et ils le laissaient seul et abandonné. Une pensée me vint à l'esprit: «Qui sait, c'est peut-être Jésus.» Mais je n'en étais pas sûre. Venant près de l'enfant, j'ai dit: «Quelle est la raison de tes pleurs, bel enfant? Puisque tous t'ont laissé abandonné à tes larmes et aux souffrances qui t'oppriment et qui te font pleurer si fort, veux-tu venir avec moi?»
Mais qui aurait pu le calmer? À peine arriva-t-il à répondre oui à travers ses pleurs. Il voulait venir. Je l'ai pris par la main pour l'amener avec moi. Mais, à ce moment même, je me retrouvai dans mon corps.
3 juin 1900
Ce matin, alors que je poursuivais dans le même état, j'ai vu mon adorable Jésus dans mon coeur. Il dormait. Son sommeil amena mon âme à tomber endormie comme lui, si bien que je ressentais toutes mes puissances internes engourdies et que je ne pouvais rien faire d'autre. Parfois, j'essayais de ne pas dormir, mais je n'y arrivais pas. Jésus béni se réveilla et envoya trois fois son haleine en moi. Ces respirations semblèrent complètement absorbées en moi. Puis, il sembla que Jésus ramena en lui-même ces trois mêmes respirations. Alors je me suis sentie complètement transformée en lui. Qui pourrait dire ce qui m'arriva par la suite? Oh! l'union inséparable entre Jésus et moi! Je n'ai pas les mots pour l'exprimer. Après cela, il me sembla que je pus me réveiller. Brisant le silence, Jésus me dit:
«Ma fille, j'ai regardé et regardé; j'ai cherché et cherché, parcourant le monde entier. Puis, j'ai porté mes Yeux sur toi, j'ai trouvé ma satisfaction en toi et je t'ai choisie parmi un millier.» Puis, se tournant vers certaines personnes qu'il voyait, il leur dit: «Le manque de respect pour les autres est un manque de vraie humilité chrétienne et de douceur, parce qu'un esprit humble et tendre sait comment respecter chacun et toujours interpréter positivement les actions des autres.»
Ayant dit cela, il disparut sans que j'aie pu lui dire un seul mot. Puisse mon bien-aimé Jésus être toujours béni! Que tout soit pour sa gloire!
3 juin 1900
Mon adorable Jésus continuait de ne pas se laisser voir clairement. Ce matin, après que j'eus reçu la sainte communion, le confesseur me proposa la crucifixion. Pendant que je me trouvais dans ces souffrances, Jésus béni, comme attiré par elles, se montra clairement. Ô Dieu! qui pourrait dire les souffrances qu'il supportait et l'état pénible dans lequel il se trouvait pendant qu'il était forcé d'envoyer des punitions sur la terre. J'éprouvai une très grande compassion pour lui. Si les gens avaient vu cela! Même si leurs coeurs avaient été durs comme le diamant, ils se seraient brisés comme du verre fragile. Je l'ai supplié de se calmer, d'être heureux, et de me faire souffrir pour que les gens soient épargnés. Ensuite, je lui ai dit:
«Seigneur, si tu ne veux pas écouter mes prières, je sais que c'est ce que je mérite. Si tu ne veux pas avoir pitié des gens, tu as raison, parce que nos iniquités sont très grandes. Mais je te demande une faveur: que tu aies pitié pendant que tu punis tes images. Par l'Amour que tu as pour toi-même, je te demande de ne pas envoyer de punitions dès maintenant. Tu enlèves le pain de tes enfants et tu les fais mourir! Oh non! ce n'est pas dans la nature de ton Coeur d'agir de cette manière! Je vois que la souffrance que tu ressens est telle que si c'était en son pouvoir, elle te donnerait la mort!»
Tout affligé, il me dit: «Ma fille, c'est la Justice qui me fait violence. Cependant, l'Amour que j'ai pour le genre humain me fait violence plus encore. Ainsi, d'avoir à punir les créatures plonge mon Coeur dans une angoisse mortelle.» Je lui dis: «Seigneur, décharge ta Justice sur moi et ton Amour ne sera plus tenaillé par elle. Je t'en supplie, laisse-moi souffrir et épargne-les, au moins en partie!»
Comme s'il s'était senti obligé par ma prière, il vint près de ma bouche et y versa de la sienne un peu de l'amertume épaisse et dégoûtante qu'il portait. À peine avalée, elle produisit en moi de telles souffrances que je me sentis près de mourir. Jésus béni me soutint dans ma souffrance, faute de quoi je serais morte. (Cependant, ce ne fut qu'un peu de son amertume qu'il versa. Que serait devenu son Coeur adorable qui en contenait tant!) Après, il soupira comme s'il avait été soulagé d'un poids et il me dit:
«Ma fille, ma Justice avait décidé de détruire toute la nourriture des hommes mais, maintenant, vu que par amour tu as pris sur toi un peu de mon amertume, elle consent à en laisser le tiers.
Oh! Seigneur! c'est très peu, lui dis-je. Laisse-en au moins la moitié.
Non, ma fille, sois contente.
Mon Seigneur, si tu ne veux pas me rendre heureuse pour tout, rends-moi au moins heureuse pour Corato et pour ceux qui m'appartiennent.
Aujourd'hui, la grêle qui devait causer de grands dommages est préparée. Pendant que tu es dans les souffrances de la croix, va à cet endroit hors de ton corps sous la forme d'une crucifiée et mets en fuite les démons d'au-dessus de Corato, car ils ne seront pas capables de supporter la vue d'une personne crucifiée et ils iront ailleurs.»
Ainsi, j'allai hors de mon corps sous la forme d'une crucifiée et j'ai vu la grêle et les éclairs qui étaient près de commencer à tomber au-dessus de Corato. Qui peut dire la peur des démons à la vue de ma forme de crucifiée, comment ils prirent la fuite, comment dans leur rage ils se mordaient les doigts. Puisqu'ils ne pouvaient pas s'en prendre à moi, ils allèrent jusqu'à s'attaquer à mon confesseur qui, ce matin, m'avait accordé la permission de souffrir la crucifixion. Ils furent forcés de s'enfuir de moi devant le signe de la Rédemption. Après qu'ils eurent fui, je revins en mon corps, demeurant avec une bonne dose de souffrances. Que tout soit pour la gloire de Dieu!
7 juin 1900
Mes souffrances formaient une douce chaîne me liant à mon doux Jésus, le faisant venir presque continuellement et le stimulant à me verser d'autres amertumes. Quand il vint, il me prit dans ses Bras pour me donner de la force et versa en moi d'autres amertumes. Je lui dis: «Seigneur, alors que tu déverses en moi une partie de tes souffrances, je te prie de me rendre heureuse en m'accordant ce que je t'ai déjà demandé, c'est-à-dire que les humains reçoivent au moins la moitié de la nourriture dont ils ont besoin pour se nourrir (cf. texte du 3 juin, 3 juin 1900).»
Il me dit: «Ma fille, pour te plaire, je te remets les clefs de la Justice avec la connaissance de ce qui est absolument nécessaire pour punir le genre humain. Avec cela, tu feras ce que tu veux. Ainsi, n'es-tu pas contente?» En entendant cela, je fus consolée et je me suis dit en moi-même: «Si c'est à moi de décider, je ne punirai personne.» Mais quel ne fut pas mon désenchantement quand Jésus béni me donna une clef et me plaça au centre d'une lumière d'où je vis tous les attributs de Dieu, y compris celui de la Justice. Oh! comme tout est ordonné en Dieu! Si la Justice punit, c'est dans l'ordre des choses. Si elle ne punissait pas, elle ne serait pas en harmonie avec les autres attributs divins. Je me suis vue comme un misérable ver au centre de cette lumière, voyant que, si je le voulais, je pouvais contrer le cours de la Justice. Mais alors je détruirais l'ordre et j'irais contre l'homme lui-même, car même la Justice est pur Amour envers les hommes. Ainsi, je me trouvai totalement confuse et embarrassée.
Pour me dégager, je dis à Notre-Seigneur: «Dans cette lumière, je comprends les choses différemment. Si tu me laisses faire, je ferai pire que toi. En conséquence, je n'accepte pas les clefs de la Justice. Ce que j'accepte et je veux, c'est que tu me fasses souffrir et que tu épargnes les personnes. Je ne veux rien savoir du reste!» Souriant à ce que je venais de dire, Jésus ajouta: «Tu veux te libérer des clefs de la Justice, mais tu me fais encore plus violence en me laissant avec ces mots: laisse-moi souffrir et épargne-les!»
Je répliquai: «Seigneur, ce n'est pas que je ne veux pas me montrer raisonnable, c'est parce que ce n'est pas ma besogne, mais la tienne; la mienne c'est d'être victime. Par conséquent, fais ta besogne et je ferai la mienne. N'est-ce pas bien ainsi, mon cher Jésus?»
Me manifestant son accord, il disparut.
10 juin 1900
Il me semble que mon adorable Jésus continue d'appliquer sa Justice en déversant un peu de ses punitions sur moi et le reste sur les gens. Ce matin, quand je me suis retrouvée avec Jésus, mon âme se déchira en voyant la torture que son très doux Coeur éprouvait quand il punissait les créatures! Son état de souffrance était si grand qu'il ne pouvait s'empêcher de gémir continuellement. Il portait sur sa divine Tête une cruelle couronne d'épines qui transperçait sa Chair à une telle profondeur que sa Tête apparaissait n'être qu'une masse d'épines. Alors, pour le soulager, je lui dis: «Dis-moi, mon Dieu, ce qui t'arrive? Permets-moi d'enlever ces épines qui te font tant souffrir!»
Mais Jésus ne répondit rien. Il n'écouta même pas ce que je disais. Je commencai donc à enlever ses épines une à une, puis la couronne elle-même que je plaçai sur ma tête. Pendant que je faisais cela, j'ai vu que, dans un endroit éloigné, il y avait un tremblement de terre qui détruisait les gens. Alors Jésus disparut et je suis revenue à mon corps, mais avec une très grande affliction à la pensée de l'état de souffrance de Jésus et des désastres qui affectaient la pauvre humanité.
12 juin 1900
Ce matin, quand mon aimable Jésus vint, je lui ai dit: «Seigneur que fais-tu? Il me semble que tu vas trop fort avec ta Justice.» Comme je voulais continuer de parler pour excuser la misère humaine, Jésus m'imposa le silence en me disant: «Garde silence si tu veux que je reste avec toi! Viens, embrasse-moi et honore tous mes Membres souffrants par tes actes d'adoration habituels.» J'ai commencé par sa Tête et, ensuite, un à un, j'ai passé à chacun de ses autres Membres. Oh! combien de blessures profondes et horribles couvraient son très saint Corps! À peine eus-je fini qu'il disparut, me laissant avec très peu de souffrances et avec la frayeur qu'il allait déverser son amertume sur les gens, cette amertume qu'il n'avait pas eu la bonté de déverser sur moi.
Après quelque temps, le confesseur vint et je lui racontai ce que je venais de vivre. Il me dit: «Aujourd'hui, quand tu feras ta méditation, tu lui demanderas de te faire souffrir la crucifixion afin qu'il arrête d'envoyer des punitions.»
Pendant ma méditation, Jésus m'apparût et je le priai de faire comme mon confesseur avait proposé. Sans m'accorder la moindre attention, il sembla me tourner le dos et s'endormir afin que je ne le dérange pas. Je me sentis mourir de peine parce qu'il ne donnait pas suite à la demande de mon confesseur. Ramassant mon courage, je le pris par le bras pour le réveiller et je lui dis: «Seigneur, que fais-tu? Est-ce là tout le respect que tu as pour ta vertu favorite d'obéissance? Où sont toutes les louanges que tu as dites concernant cette vertu? Où sont les honneurs que tu lui as prodigués, au point de dire que tu es secoué par elle, que tu ne peux lui résister et que tu te sens subjugué par l'âme qui la pratique. Et maintenant, il semble que tu ne te soucies plus d'elle?»
Pendant que je disais cela (et bien d'autres choses qui demanderaient beaucoup de temps si je voulais les écrire), Jésus béni fut secoué comme par une très vive douleur. Il poussa un cri et, sanglotant, me dit: «Moi non plus je ne veux pas envoyer de punitions, mais c'est la Justice qui me force à le faire. Cependant, toi, par tes paroles, tu me piques au vif. Tu touches à une chose très délicate pour moi, une chose que j'aime beaucoup, au point que je n'ai pas voulu d'autre honneur ou titre que celui de l'obéissance. Ce n'est donc pas parce que je ne me soucie pas de l'obéissance que je ne te fais pas partager les souffrances de la Croix, c'est la Justice qui me force à agir ainsi.»
Après qu'il eut dit cela, il disparut en me laissant contente, mais avec un déplaisir dans mon âme, comme si mes paroles avaient été la cause du cri du Seigneur! Daigne me pardonner, ô mon Jésus!
14 juin 1900
Je souffrais beaucoup. Quand il vint, mon adorable Jésus sympathisa beaucoup avec moi et me dit: «Ma fille, pourquoi souffres-tu tant? Laisse-moi te réconforter un peu.» Cependant, il souffrait plus que moi! Il baisa mon âme et m'attira hors de mon corps. Il prit mes mains dans les siennes, plaça mes pieds sur les siens et ma tête contre la sienne. Comme j'étais heureuse de me trouver dans cette position! Même si les clous et les épines de Jésus me donnaient des souffrances, j'aurais voulu qu'elles augmentent. Elles me donnaient de la joie. Jésus aussi semblait content parce que, de cette manière, il me gardait près de lui. Il me semble qu'il me soulageait et que j'étais un réconfort pour lui.
Dans cette position, nous sommes sortis. Ayant rencontré le confesseur, j'ai immédiatement prié pour lui et j'ai dit au Seigneur d'être assez bon de lui faire goûter la douceur de sa Voix. Pour me plaire, Jésus se tourna vers lui et lui parla de la croix en disant: «Par la croix, ma Divinité est absorbée dans l'âme. La croix la fait ressembler à mon Humanité et copie en elle mes Oeuvres.»
Ensuite, nous nous sommes promenés dans les environs. Oh! que de spectacles navrants nous avons vus; mon âme en était transpercée de part en part! Nous avons vu les graves iniquités des hommes, eux qui ne se conforment même pas à la Justice. Au contraire, ils se lancent contre elle avec furie, comme s'ils voulaient être blessés deux fois plus. Et nous avons vu la grande misère vers laquelle ils se dirigent.
Puis, dans un grand chagrin, nous nous sommes retirés. Jésus disparut et je réintégrai mon corps.
17 juin 1900
Ce matin, Jésus béni n'est pas venu. J'en ai ressenti de l'anxiété. Quand il vint, il me dit: «Ma fille, agir en Dieu et rester dans la paix, c'est la même chose. Si tu es affectée par quelque trouble, c'est le signe que tu t'es éloignée quelque peu de Dieu, parce que se mouvoir en lui et ne pas avoir une paix parfaite est impossible. En Dieu, tout est paix.» Puis il ajouta: «Ne sais-tu pas que les privations sont à l'âme ce que l'hiver est aux plantes: pendant l'hiver leurs racines s'enfoncent plus profondément et je les fortifie afin qu'elles puissent fleurir en mai.»
Il me transporta ensuite hors de mon corps et je lui présentai plusieurs requêtes. Ensuite, il disparut et je revins dans mon corps, habitée par un grand désir d'être toujours parfaitement unie à lui afin que je puisse toujours demeurer dans sa Paix.
18 juin 1900
Comme Jésus persistait à ne pas venir, j'ai essayé de méditer sur le mystère de la flagellation. Pendant que je le faisais, il s'est montré très blessé et tout ensanglanté. Dès que je l'ai aperçu, il me dit:
«Ma fille, le Ciel et le monde créé démontrent l'Amour de Dieu. Mon Corps blessé démontre mon Amour pour les hommes. Ma nature divine et ma nature humaine sont inséparables et ne forment qu'une seule personne. Par elles, je n'ai pas seulement satisfait à la Justice divine, mais j'ai aussi travaillé au salut des hommes. Et, pour convoquer chacun à aimer Dieu et le prochain, non seulement j'ai donné moi-même l'exemple sur ce point, mais j'en ai fait un précepte divin. Mes Plaies et mon Sang enseignent à chacun le chemin de l'amour et le devoir pour tous de se préoccuper du salut des autres.»
Puis, d'un air attristé, il ajouta: «L'Amour est pour moi un tyran sans pitié! Pour le satisfaire, non seulement j'ai vécu toute ma vie mortelle en de continuels sacrifices, jusqu'à mourir sur la Croix, mais je me suis donné comme Victime perpétuelle dans le sacrement de l'Eucharistie. De plus, j'ai fait appel à quelques-uns de mes enfants bien-aimés, dont toi-même, pour être des victimes en souffrances continuelles pour le salut du genre humain. Ah oui! mon Coeur ne trouve ni la paix ni le repos s'il ne se livre pas aux hommes! Cependant l'homme me répond avec une ingratitude extrême!»
Ayant dit cela, il disparut.
20 juin 1900
Ce matin, alors que j'étais hors de mon corps et que je n'étais pas avec mon plus grand Bien, je suis partie à sa recherche. J'étais sur le point de m'évanouir de fatigue quand je l'ai senti dans mon dos. Il me retenait. Je l'ai tiré devant moi et lui ai dit: «Mon Bien-Aimé, ne sais-tu pas que je ne peux pas vivre sans toi? Et toi tu me fais attendre jusqu'à ce que je m'évanouisse! Dis-moi au moins pour quelle raison? En quoi t'ai-je offensé pour que je sois sujette à de si cruelles tortures, à un si douloureux martyre?»
M'interrompant, Jésus me dit: «Ma fille, ma fille, n'augmente pas la torture de mon Coeur. Elle est extrême, dans une lutte constante, parce que beaucoup me violentent sans arrêt. Les iniquités des hommes me font violence en provoquant ma Justice. Ils me forcent à les punir. Et, par le fait que ma Justice heurte mon Amour pour les hommes, mon Coeur est déchiré d'une manière tellement douloureuse que je me sens mourir.
«Tu me fais violence toi aussi à chaque fois où, ayant pris connaissance des punitions que je donne, tu me forces à ne pas les donner. Sachant que tu ne peux pas faire autrement en ma présence et pour ne pas exposer mon Coeur à des luttes plus grandes, je m'abstiens de venir. Renonce à me violenter pour que je vienne: laisse-moi donner libre cours à ma fureur et cesse d'aggraver mes souffrances par tes interventions.
«Pour ce qui est du reste, sache que la plus sublime humilité exige de fuir tout raisonnement et de s'abîmer dans son néant. Si on fait ainsi, alors, sans trop s'en rendre compte, on se fond en Dieu. Cela amène l'union la plus intime entre l'âme et Dieu, le plus parfait amour pour Dieu et le plus grand avantage pour l'âme, parce que, en quittant sa propre raison, on acquiert la Raison divine. En renonçant à tout regard sur elle-même, l'âme n'est pas intéressée à ce qui lui arrive et elle parvient à un langage complètement céleste et divin. L'humilité donne à l'âme un vêtement de sécurité. Enveloppée de ce vêtement, l'âme demeure dans la paix la plus profonde, toute ornée pour plaire à son Jésus bien-aimé.»
Qui pourrait dire combien je fus surprise par ces paroles de Jésus. Je ne savais que lui dire. Il disparut et je me retrouvai dans mon corps, calme oui, mais extrêmement affligée; d'abord à cause des afflictions et des luttes dans lesquelles était plongé mon cher Jésus et aussi parce que je craignais qu'il refuse dorénavant de venir. Qui pourrait endurer ça? «Ô Seigneur! donne-moi la force d'endurer cet insupportable martyre. Pour ce qui est du reste, dis tout ce que tu voudras, moi je ne négligerai aucun moyen, j'userai de toutes les ruses pour que tu viennes.»
24 juin 1900
Après que j'eus traversé quelques jours de privation, il se montra comme une ombre, à la vitesse de l'éclair. Et je me trouvai engourdie, comme endormie, ne comprenant pas ce qui m'arrivait. Plongée dans cette léthargie, une seule souffrance m'atteignait: il me semblait qu'il m'arrivait la même chose qu'à lui, c'est-à-dire que j'étais privée de tous mes moyens. La personne plongée dans cet état ne peut ni se plaindre, ni se défendre, ni faire appel à quelque moyen que ce soit pour se libérer de son infortune. Pauvre elle! Elle dort! Si elle était éveillée, elle saurait certainement comment se défendre contre son infortune.
Tel était mon misérable état! Il ne m'était pas permis de gémir, de soupirer, de verser une seule larme, même si j'avais perdu de vue mon Jésus, lui qui est tout mon amour, tout mon bonheur, mon plus grand Bien. Autrement dit, pour que je ne sois pas blessée par son absence, il me berça pour m'endormir et il me laissa. «Ô Seigneur, réveille-moi pour que je puisse voir mes misères et savoir au moins ce qui me manque.» Et, pendant que j'étais dans cet état, j'entendis à l'intérieur de moi Jésus béni: il gémissait sans arrêt. Ses gémissements blessèrent mes oreilles. M'éveillant un peu, je lui dis:
«Mon seul et unique Bien, à travers tes plaintes, j'ai perçu l'état très souffrant dans lequel tu es. Cela t'arrive parce que tu veux souffrir seul et que tu ne me laisses pas partager tes souffrances! Au contraire, tu m'as bercée pour m'endormir sans rien me laisser comprendre. Je comprends d'où tout cela provient: ta Justice est ainsi plus libre pour punir.
«Mais oh! aie pitié de moi, parce que sans toi je suis aveugle. Toi qui es si bon, tu as besoin d'avoir quelqu'un qui te tienne compagnie, qui te réconforte, qui, de quelque façon, amoindrisse ta colère. Quand tu verras tes images périr dans la misère, peut-être que tu te plaindras davantage et que tu me diras: "Oh! si tu avais été plus appliquée à me réconforter, si tu avais pris sur toi les souffrances de mes créatures, je ne verrais pas mes Membres si torturés." N'est-ce pas vrai, mon très patient Jésus? Par pitié, réagis un peu et laisse-moi souffrir à ta place!»
Pendant que je disais cela, il gémissait continuellement, comme s'il voulait de la pitié et du réconfort. Mais moi, voulant le soulager en partageant ses souffrances, je tirai sur lui, comme pour le forcer. Ainsi, à la suite de mes prières ferventes, il étendit dans mon intérieur ses Mains et ses Pieds cloués et me partagea un peu de ses souffrances.
Par la suite, prenant une pause dans ses gémissements, il me dit: «Ma fille, les tristes temps que nous vivons me forcent à cela, parce que les hommes sont devenus si arrogants que chacun se prend pour Dieu. Si je n'envoie pas de punitions sur eux, je ferai du mal à leur âme, parce que la croix seule est nourriture pour l'humilité. Si je ne fais pas ainsi, je finirai par leur faire manquer le moyen de devenir humbles et de sortir de leur étrange folie. Je fais comme un père qui partage le pain pour que tous ses enfants se nourrissent; mais quelques-uns ne veulent pas de ce pain; au contraire, ils le rejettent à la face de leur père. Cela n'est pourtant pas la faute du pauvre père! Je suis comme cela. Aie pitié de moi dans mes afflictions.»
Ayant ainsi parlé, il disparut, me laissant à moitié endormie, ne sachant pas si je devais complètement me réveiller ou si je devais encore dormir.
27 juin 1900
Jésus continuait de me garder endormie. Ce matin, pendant quelques minutes, je me suis trouvée complètement éveillée; j'ai compris mon misérable état et j'ai ressenti l'amertume de la privation de mon plus grand Bien. J'ai versé quelques larmes quand je lui ai dit: «Mon toujours bon Jésus, pourquoi ne viens-tu pas? Ce ne sont pas des choses à faire: blesser une de tes âmes et ensuite la laisser! Puis, pour ne pas lui laisser savoir ce que tu fais, tu la plonges dans le sommeil! Oh! viens, ne me fais pas attendre davantage.»
Pendant que je disais cela et bien d'autres idioties semblables, il vint et m'entraîna hors de mon corps. Alors que je voulais lui dire mon pauvre état, il m'imposa le silence et me dit: «Ma fille, ce que je veux de toi, c'est que tu te reconnaisses en moi, et non en toi-même. Ainsi, tu ne te souviendras plus de toi, mais de moi seul. T'ignorant toi-même, tu ne reconnaîtras que moi. Dans la mesure où tu t'oublieras et te détruiras toi-même, tu avanceras dans ma connaissance, tu te reconnaîtras uniquement en moi. Quand tu feras ainsi, tu ne penseras plus avec ton cerveau, mais avec le mien. Tu ne regarderas plus avec tes yeux, tu ne parleras plus avec ta bouche, les battements de ton coeur ne seront plus les tiens, tu ne travailleras plus avec tes mains, tu ne marcheras plus avec tes pieds. Tu regarderas avec mes Yeux, tu parleras avec ma Bouche, tes battements de coeur seront les miens, tu travailleras avec mes Mains, tu marcheras avec mes Pieds.
«Et pour que cela se produise, c'est-à-dire que l'âme ne se reconnaisse qu'en Dieu, elle doit retourner à ses origines, c'est-à-dire à Dieu, de qui elle vient. Elle doit se conformer entièrement à son Créateur; tout ce qu'elle tient d'elle-même et qui n'est pas en conformité avec ses origines, elle doit le réduire à néant. De cette manière seulement, nue et dépouillée, elle pourra retourner à ses origines, se reconnaître uniquement en Dieu et travailler en accord avec la fin pour laquelle elle a été créée. Pour se conformer complètement à moi, l'âme doit devenir invisible comme moi.»
Pendant qu'il disait cela, j'ai vu la punition terrible des plantes desséchées et comment cela doit aller encore plus loin. J'ai à peine pu lui dire: «Ô Seigneur! que fera le pauvre peuple!» Et lui, dans le but de ne pas faire attention à moi, disparut à la vitesse de l'éclair. Qui pourrait dire quelle fut l'amertume de mon âme de me retrouver en mon corps sans avoir pu lui dire un seul mot me concernant ou concernant mon prochain, ou concernant ma tendance à dormir, avec laquelle j'étais encore aux prises!
28 juin 1900
Ce matin, j'étais extrêmement affligée à cause de la privation de mon tendre Jésus. Dès que je l'ai vu, il m'a dit: «Ma fille, combien de déguisements seront démasqués en ces temps de punitions, car les punitions actuelles ne sont qu'un présage de celles que je t'ai montrées l'année dernière.»
Pendant qu'il disait cela, je pensais en moi-même: «Qui sait si le Seigneur va continuer de faire ce qu'il fait: alors qu'il souffre beaucoup en punissant, il ne vient pas partager ses souffrances avec moi et il me traite de façon inhabituelle. Qui pourrait endurer ça? Qui me donnera la force de vivre ça?» Répliquant à ma pensée, Jésus me dit piteusement: «Voudrais-tu que je suspende ton état de victime et que je te le fasse reprendre plus tard?»
À ces mots, j'expérimentai une grande confusion et une grande amertume, voyant que par la réalisation de cette proposition le Seigneur m'éloignerait de lui. Je ne savais que faire: accepter ou refuser. J'aurais bien aimé consulter mon confesseur. Quoiqu'il en soit, sans attendre ma réponse, Jésus disparut, me laissant avec un glaive dans le coeur, celui de me sentir rejetée par lui. Ma douleur était si grande que je n'ai pu rien faire d'autre que de pleurer amèrement.
29 juin 1900
Pendant que je continuais d'être triste, mon adorable Jésus eut pitié de moi: il vint et il sembla me soutenir de ses Bras. Il m'entraîna hors de mon corps et, ensemble, nous vîmes qu'il régnait partout un profond silence, une grande tristesse et le deuil. Ce spectacle fit si grande impression sur mon âme que mon coeur devint angoissé. Jésus me dit: «Ma fille, quittons ce qui nous afflige et reposons-nous ensemble.»
En disant cela, il commença à me caresser et à me réconforter par de doux baisers. Cependant, ma confusion était si grande que je n'osais pas lui rendre la pareille. Il me dit: «Alors que je te rafraîchis par de chastes baisers et des caresses, ne veux-tu pas me rafraîchir en me donnant toi aussi des baisers et des caresses?» Ces mots me mirent en confiance et je lui rendis la pareille. Puis il disparut.
2 juillet 1900
Je continuais d'être affligée et triste comme un être stupide. Ce matin, Jésus n'est pas venu du tout. Le confesseur vint et suggéra la crucifixion. En premier lieu, Jésus béni ne fut pas d'accord. Quand il se montra à moi, il me dit: «Qu'est-ce que tu veux? Pourquoi veux-tu me blesser en me forçant à te crucifier? Je t'ai déjà dit qu'il est nécessaire que je punisse le peuple!»
Je répliquai: «Seigneur, ce n'est pas moi; c'est par obéissance que je fais cette demande.» Il reprit: «Puisque c'est par obéissance, je veux que tu partages ma crucifixion. Pendant ce temps, je vais me reposer un peu.» Et il me fit partager les souffrances de la Croix. Pendant que je souffrais, il vint près de moi et sembla se reposer.
Puis je vis un nuage menaçant dont la simple vue inspirait la frayeur. Chacun disait: «Cette fois nous allons mourir!» Pendant que tous étaient effrayés, une croix rayonnante s'éleva entre Jésus et moi; elle fit disparaître la tempête (il semblait que c'était un ouragan accompagné de tonnerre qui emportait des édifices). La croix qui fit fuir la tempête me semblait être la petite souffrance que Jésus partageait avec moi. Que le Seigneur soit béni et que tout soit pour son honneur et sa gloire.
3 juillet 1900
Ce matin, après avoir reçu la sainte communion, j'ai vu mon adorable Jésus et je lui ai dit: «Mon bien-aimé Seigneur, pourquoi ne veux-tu pas être apaisé?» Interrompant mes paroles, il dit: «Pourtant les punitions que j'envoie ne sont rien en comparaison de celles qui sont préparées.»
Pendant qu'il disait cela, j'ai vu devant moi beaucoup de personnes infectées par une maladie soudaine et contagieuse dont elles mouraient (la grippe espagnole). Saisie de terreur, je dis à Jésus: «Seigneur, voudrais-tu cela pour nous aussi? Que fais-tu? Si tu veux faire cela, tire-moi de cette terre, car mon âme ne peut rester pour voir des choses si pénibles. Qui me donnera la force d'être dans cet état?»
Pendant que je donnais libre cours à mon affliction, ayant pitié de moi, Jésus me dit: «Ma fille, n'aie pas peur de ton état d'assoupissement. Cela veut dire que même si je suis avec le peuple, c'est comme si je sommeillais, comme si je ne les voyais pas et ne les entendais pas. Et je t'ai mise dans le même état que moi. Pour le reste, si tu n'aimes pas cela, je te l'ai déjà dit: veux-tu que je suspende ton état de victime?» Je lui répondis: «Seigneur, l'obéissance ne veut pas que j'accepte la suspension.» Il reprit: «Bien, alors, que veux-tu de moi? Sois silencieuse et obéis!»
Qui pourrait dire à quel point j'étais affligée et combien mes puissances internes me semblaient engourdies? Je vivais comme si je ne vivais pas. «Ô Seigneur, aie pitié de moi! Ne me laisse pas dans un état si pitoyable!»
9 juillet 1900
Le même état continuait. Il empirait même. Si parfois Jésus se montrait comme une ombre, avec la rapidité de l'éclair, c'était presque toujours dans le silence. Ce matin, j'étais au sommet de mon affliction à cause de mon sommeil continuel. Il se montra et me dit:
«L'âme qui est vraiment mienne ne doit pas seulement vivre pour Dieu, mais en Dieu. Tu dois essayer de vivre en moi car, en moi, tu trouveras la fontaine de toutes les vertus. En te maintenant au milieu des vertus, tu seras nourrie de leur parfum, si bien que tu seras remplie comme après un bon repas et que tu ne feras rien d'autre que de dégager une lumière et un parfum célestes. Établir sa résidence en moi est la vraie vertu qui a le pouvoir de donner à l'âme la forme de l'Être divin.»
Après ces paroles, il disparut. Quittant mon corps, mon âme se mit à sa poursuite, mais il s'était déjà enfui et je ne pus le retrouver. Soudain, je fus remplie d'amertume en voyant une grêle terrible causant de grandes destructions, des éclairs produisant des incendies et d'autres choses qui avaient été préparées. Alors, plus affligée que jamais, je réintégrai mon corps.
10 juillet 1900
Alors que je poursuivais dans la même confusion, Jésus béni se montra brièvement et me fit comprendre que je n'avais pas écrit tout ce qu'il m'avait dit le jour précédent au sujet de la différence entre vivre pour Dieu et vivre en Dieu. Il reprit sur le même sujet en disant:
«En vivant pour Dieu, l'âme peut être soumise à des troubles et des amertumes, se montrer instable, sentir la pesanteur de ses passions et des interférences des choses terrestres. Mais, pour l'âme qui vit en Dieu, c'est complètement différent. Comme elle vit dans une autre personne, elle laisse ses propres pensées pour épouser celles de l'autre. Elle épouse son style, ses goûts et, plus encore, elle quitte sa propre volonté pour prendre celle de l'autre. Pour qu'une âme puisse vivre dans la Divinité, elle doit laisser tout ce qui lui appartient en propre, se priver de tout et laisser ses propres passions. En un mot, tout abandonner pour tout trouver en Dieu.
«Quand l'âme a beaucoup grandi en légèreté, elle est capable d'entrer par la porte étroite de mon Coeur pour vivre en moi de ma Vie même. Même si mon Coeur est très grand, tel qu'il n'a pas de limite, sa porte d'entrée est très étroite. Seulement celui qui est dépouillé de tout peut y entrer. Cela est juste parce que je suis le Très Saint. Je ne permettrais à personne qui serait un étranger à ma Sainteté de vivre en moi. C'est pourquoi, ma fille, je te dis: essaie de vivre en moi et tu posséderas le paradis anticipé.»
Qui pourrait dire à quel point j'ai compris le sens de ce «vivre en Dieu»? Ensuite, il disparut et je me retrouvai dans le même état qu'auparavant.
11 juillet 1900
Ce matin, après avoir reçu la sainte communion, je poursuivais dans le même état de confusion. J'étais complètement repliée sur moi-même quand j'ai vu mon adorable Jésus venir à moi précipitamment. Il me dit: «Ma fille, amoindris un peu ma colère, autrement...» Tout effrayée, je lui dis: «Que veux-tu que je fasse pour diminuer ta colère?» Il me répondit: «En appelant sur toi mes souffrances.»
Alors j'ai eu l'impression qu'il interpella le confesseur à l'aide d'un rayon de lumière. Celui-ci manifesta immédiatement la volonté que je souffre la crucifixion. Le Seigneur béni agréa et je me suis trouvée dans des souffrances si grandes que j'ai eu l'impression que mon âme allait quitter mon corps. Quand je me suis sentie sur le point de mourir et que je me réjouissais parce que Jésus allait recevoir mon âme, le confesseur m'a dit: «Assez!».
Alors Jésus m'a dit: «L'obéissance t'appelle!» Je répondis: «Seigneur, je veux vraiment continuer.» Jésus reprit: «Que veux-tu de moi? L'obéissance continue de t'appeler!» Il sembla que cette nouvelle intervention de mon confesseur ne me faisait plus marcher vers la souffrance. L'obéissance se montra bien cruelle pour moi car, au moment même où je croyais avoir atteint le port, je fus repoussée pour poursuivre la navigation. En effet, bien que je souffrais, je ne sentais pas que j'allais mourir.
Mon bon Seigneur me dit: «Ma fille, aujourd'hui ma colère avait atteint ses limites, à tel point que non seulement j'aurais détruit les plantes, mais aussi le genre humain lui-même. Si tu n'avais pas amoindri ma colère, c'est ce qui serait arrivé. Et si le confesseur lui-même n'était pas intervenu en rappelant en toi mes souffrances, je n'aurais même pas eu un regard pour lui. Il est vrai que les punitions sont nécessaires, mais il est aussi nécessaire, quand ma fureur augmente trop, que quelqu'un l'apaise. Autrement, j'enverrais beaucoup de punitions!» Puis il me sembla voir Jésus bien fatigué se plaindre en disant: «Mes enfants, mes pauvres enfants, comme je vous vois appauvris!»
Puis, à ma surprise, il me fit comprendre qu'après s'être un peu calmé, il devait poursuivre avec les punitions. Mes souffrances avaient servi seulement à l'empêcher de trop s'emporter contre le peuple. Ô Seigneur, sois apaisé et aie pitié de ceux que tu appelles "tes enfants".
14 juillet 1900
Il me semble que j'ai passé plusieurs jours en compagnie de Jésus béni sans que mon être soit absorbé par la léthargie du sommeil, alors que nous nous donnions réciproquement du réconfort. Cependant, j'avais peur qu'il me replonge dans ce sommeil!
Ce matin, après qu'il m'eut rafraîchie avec du lait qui descendait de sa bouche et qu'il déversait en moi, je le réconfortai en lui enlevant sa couronne d'épines pour la fixer sur ma tête. Très affligé, il me dit: «Ma fille, le décret des punitions est signé. La seule chose qu'il reste à faire est de fixer le temps de l'exécution.»
16 juillet 1900
Ce matin mon adorable Jésus n'est pas venu. Cependant, après une longue attente, il est venu et m'a dit:
«Ma fille, le mieux est de me faire confiance puisque je suis la paix. Même si j'envisage d'envoyer des punitions, tu dois rester en paix, sans le moindre trouble.
Ah! Seigneur, tu reviens toujours à elles, les punitions. Sois apaisé une fois pour toutes et ne parle plus de punitions, car je ne peux pas me soumettre à ta Volonté à cet égard!»
Je ne peux pas être apaisé! reprit Jésus. Que dirais-tu si tu voyais une personne nue qui, au lieu de couvrir sa nudité, se préoccupait de s'orner de joyaux, omettant de se couvrir?
Ce serait horrible de la voir ainsi et, certainement, je la trouverais blâmable.
Bien! Telles sont les âmes. Dépouillées de tout, elles n'ont plus les vertus pour se couvrir. C'est pourquoi il est nécessaire de les frapper, de les fouetter, de les assujettir à des privations pour les faire entrer en elles-mêmes et les amener à prendre soin de leur nudité. Couvrir son âme avec les vêtements des vertus et de la grâce est immensément plus nécessaire que de couvrir son corps de vêtements. Si je n'éprouvais pas ces âmes, cela signifierait que j'accorderais plus d'attention aux vétilles que sont les choses concernant le corps et que je n'accorderais pas d'attention aux choses les plus essentielles, celles qui concernent l'âme.»
Ensuite, il sembla tenir une petite corde dans ses mains avec laquelle il attacha mon cou. Il attacha aussi sa Volonté à cette corde. Il fit de même pour mon coeur et mes mains. Ainsi, il sembla qu'il m'attachait toute entière à sa Volonté. Puis il disparut.
17 juillet 1900
Après avoir reçu la sainte communion, je n'ai pas vu Jésus béni comme à l'accoutumée. Après l'avoir longtemps attendu, j'ai senti que je quittais mon corps. Alors je l'ai trouvé. Il me dit aussitôt: «Ma fille, je t'attendais pour pouvoir me reposer un peu en toi, car je ne peux tenir plus longtemps! Oh! donne-moi du réconfort!» Immédiatement, je l'ai pris dans mes bras pour lui plaire. J'ai vu qu'il avait à l'épaule une blessure profonde qui éveillait la pitié et même le dégoût. Il se reposa quelques minutes. J'ai ensuite vu que sa blessure était guérie. Puis, entre l'émerveillement et la surprise, le voyant soulagé, je pris mon courage à deux mains et lui dis:
«Seigneur béni, mon pauvre coeur est tourmenté par la peur que tu ne m'aimes plus. J'ai très peur que ton indignation s'abatte sur moi. Tu ne viens plus comme avant et tu ne partages plus ton amertume avec moi. Tu ne me donnes plus ce qui est bon pour moi: la souffrance. En me privant de la souffrance, tu en viens même à me priver de toi-même. Oh! donne la paix à mon pauvre coeur. Rassure-moi, dis-moi que tu m'aimes, promets-moi que tu continueras de m'aimer?
Oui, oui, je t'aime vraiment!
Comment puis-je en être sûre? Si tu aimes vraiment une personne, tu dois lui donner tout ce qu'elle veut! Je te dis: "ne punis pas les personnes!" et tu les punis; ou "déverse ton amertume en moi" et tu ne le fais pas. Je trouve que cette fois, tu vas trop loin. Comment donc puis-je être sûre que tu m'aimes?
Ma fille, tu vois les punitions que j'envoie mais tu ne vois pas celles que je retiens. Combien d'autres punitions j'aurais envoyées et combien de sang j'aurais fait couler n'eût été des quelques personnes qui m'aiment et que j'aime d'un amour spécial!»
Après cela, il me sembla que Jésus s'était dirigé à l'endroit où la destruction de la chair humaine s'opérait. Mais moi, qui voulais le suivre, je n'en eus pas la permission et, à mon plus grand regret, je me retrouvai dans mon corps.
18 juillet 1900
J'étais dans mon état habituel. Lorsque j'ai vu mon adorable Jésus, j'ai vu en même temps de nombreuses personnes qui commettaient beaucoup de péchés. J'en suis devenue très affligée. Ces péchés prirent ma direction pour venir blesser mon bien-aimé Seigneur qui se trouvait dans mon coeur. Quand Jésus repoussa ces péchés, ils retournèrent vers les personnes d'où ils provenaient et ils créèrent beaucoup de ruines, assez pour horrifier les coeurs les plus durs. Totalement affligé, Jésus me dit: «Ma fille, vois où l'aveuglement de l'homme le conduit. Pendant qu'il essaie de me blesser, il se blesse lui-même.»
19 juillet 1900
Ce matin, après que j'eus attendu mon adorable Jésus toute la nuit et une grande partie de la matinée, il n'a pas eu la bonté de venir. Fatiguée de l'attendre et dans un moment d'impatience, j'ai entrepris de quitter mon état habituel tout en pensant que ce n'était pas là la Volonté de Dieu. Pendant que j'essayais de sortir de mon corps, mon tendre Jésus, se laissant à peine voir, entra dans mon coeur et me regarda en silence. Dans l'impatience qui m'habitait, je lui dis: «Mon bon Jésus, pourquoi es-tu si cruel? Peut-on se montrer plus cruel qu'en laissant une âme à la merci du cruel tyran de l'amour qui la maintient en agonie constante? Oh! tu as changé: de l'amant que tu étais, tu est devenu un tyran!»
Pendant que je disais cela, j'ai vu devant moi beaucoup de personnes mutilées. J'ai dit: «Oh! Seigneur! que de chair humaine mutilée! que d'amertume et de souffrance! Oh! n'y aurait-il pas moins de souffrance si j'avais satisfait pour ces personnes dans mon propre corps! N'est-ce pas un moindre mal de faire souffrir une seule personne au lieu de tant de pauvres gens!»
Pendant que je disais cela, Jésus continua de me regarder fermement. Je ne peux dire s'il était content ou mécontent. Il me dit: «Et pourtant, ce n'est que le commencement du jeu, ce n'est rien comparé à ce qui vient!» Puis il disparut, me laissant dans une mer d'amertume.
21 juillet 1900
Après avoir passé un jour absorbée par le sommeil au point que je ne me comprenais plus et après avoir reçu la sainte communion, j'ai senti que je sortais de mon corps. N'ayant pas trouvé mon seul et unique Bien, j'ai commencé à errer comme dans le délire. Pendant que je le faisais, j'ai senti une personne dans mes bras; elle était si complètement recouverte que je ne pouvais pas voir qui elle était. Incapable de résister, je déchirai la couverture et j'ai vu mon Tout si ardemment et longuement désiré. En le voyant, je commençai à me répandre en plaintes et en diverses idioties.
Mais, pour diminuer mon impatience et mon délire, Jésus baisa la misérable créature que je suis. Ce baiser divin ramena en moi la paix. Il réduisit mon impatience au point que je ne savais plus quoi dire. Oubliant toutes mes misères, je me suis alors souvenu des pauvres créatures et j'ai dit à Jésus:
«Sois apaisé, ô doux Seigneur! Épargne ces personnes de si cruelles destructions! Allons ensemble dans ces régions où ces choses arrivent pour que nous puissions encourager et consoler tous ces chrétiens dans un si triste état.
Ma fille, me répondit Jésus, je ne veux pas t'amener car ton coeur ne supporterait pas la vue d'un tel carnage.
Ah! Seigneur! comment peux-tu permettre cela?»
Il est absolument nécessaire que je nettoie ces régions parce que, dans ces champs où j'ai semé, il a poussé beaucoup de mauvaises herbes et d'épines qui sont devenues des arbres. Et ces arbres épineux ne font qu'attirer des eaux empoisonnées et pestiférées dans ces lieux. Si quelques épis sont demeurés intacts, ils ne reçoivent que piqûres et puanteur, de telle sorte qu'aucun autre épi ne peut fleurir. Ces épis ne peuvent fleurir parce que, premièrement, le sol est recouvert de toute espèce de mauvaises plantes et, deuxièmement, ils reçoivent de continuelles piqûres qui ne leur laissent aucune paix. D'où le besoin de destruction pour révéler toutes les mauvaises plantes et aussi le besoin de sang versé pour purifier ces champs de leurs eaux empoisonnées. Pour cette raison, je n'ai pas voulu t'amener. Le nettoyage est nécessaire, pas seulement aux endroits où j'ai déjà envoyé des punitions, mais aussi dans tous les autres endroits.»
Qui pourrait décrire la consternation de mon coeur en entendant ces paroles de Jésus! J'ai néanmoins insisté pour aller voir ces champs. Mais, ne faisant pas attention à moi, Jésus disparut. En essayant de le retrouver, j'ai rencontré mon ange gardien et quelques âmes du purgatoire qui me firent rebrousser chemin, ce qui me força à réintégrer mon corps.
23 juillet 1900
Ce matin, mon adorable Jésus vint et me fit voir une machine dans laquelle il semblait que beaucoup de membres humains étaient écrasés. Nous étions là comme deux témoins des terrifiants châtiments à venir. Qui pourrait dire la consternation de mon coeur à cette vue? Me voyant si consternée, Jésus béni me dit: «Ma fille, éloignons-nous de ce qui nous afflige tant et réconfortons-nous en jouant un peu ensemble.»
Qui pourrait dire ce qui se produisit alors entre Jésus et moi: les marques d'amour exquises, les ruses, les doux baisers, les caresses que nous nous donnions l'un à l'autre. Mon Jésus bien-aimé me surpassa dans ce jeu car, de mon côté, je défaillais, ne pouvant contenir tout ce qu'il me donnait. Je lui ai dit: «Mon Bien-Aimé, assez, assez! je n'en peux plus! je défaille! mon pauvre coeur n'est pas assez grand pour tant recevoir! c'est assez pour le moment!»
Voulant me réprimander pour mes paroles de l'autre jour, il me dit avec amabilité: «Fais-moi entendre tes plaintes; dis-moi: suis-je cruel? Mon Amour pour toi s'est-il changé en cruauté?» Rougissante, je lui dis: «Non, mon Seigneur, tu n'es pas cruel quand tu viens; mais quand tu ne viens pas, c'est alors que tu es cruel!»
Souriant, il répondit: «Tu continues de dire que je suis cruel quand je ne viens pas? Non, non, il ne peut pas y avoir de cruauté en moi. Tout est Amour en moi. Sache que si mon comportement est cruel, comme tu dis, c'est en fait l'expression d'un plus grand Amour.»
27 juillet 1900
Je me trouvais très inquiète à propos de mon misérable état, pensant qu'il ne correspondait pas à la Volonté de Dieu. Je considérais comme signes de cela la souffrance insuffisante que Jésus me donnait et ma continuelle privation de lui. Pendant que je fatiguais mon petit cerveau sur cet état de choses et que je luttais pour en sortir, mon toujours aimable Jésus se montra à la vitesse de l'éclair et me dit: «Ma fille, que veux-tu que je fasse? Dis-le-moi. Je ferai ce que tu veux.»
Je ne savais que répondre à une proposition si inespérée. J'expérimentai une grande confusion devant le fait que Jésus béni voulait faire ce que je voulais alors que c'était plutôt moi qui devais faire ce que lui voulait. Je restai muette. Comme je ne disais rien, il s'éloigna comme l'éclair. Courant derrière cette lumière, je me trouvai hors de mon corps. Mais je ne l'ai pas trouvé et je suis allée sur la terre, dans les cieux, dans les étoiles. À un moment, je l'appelais par mes paroles, à l'autre par une chanson, pensant en moi-même que Jésus béni serait touché d'entendre ma voix ou mon chant et que, certainement, il se montrerait.
Pendant que je me promenais, j'ai vu la terrible destruction que provoquait la guerre en Chine. Il y avait des églises de démolies et des images de Notre-Seigneur jetées par terre. Ce qui m'effrayait le plus, c'était que si les barbares font cela actuellement, les religieux hypocrites le feront plus tard. Se faisant connaître tels qu'ils sont et s'unissant aux ennemis ouverts de l'Église, ils mènent une attaque qui semble incroyable à l'esprit humain. Oh! que de tortures! Il semble qu'ils ont juré d'en finir avec l'Église. Mais le Seigneur les détruira!
Puis je me suis trouvée dans un jardin qui me semblait être l'Église. À l'intérieur de ce jardin, il y avait une foule de gens sous les apparences de dragons, de vipères et d'autres bêtes féroces. Ils dévastaient le jardin. Quand ils sortirent, ils causèrent la ruine du peuple.
Pendant que je voyais cela, je me suis trouvée dans les bras de mon Jésus bien-aimé et je lui ai dit: «Je t'ai finalement trouvé! Es-tu bien mon cher Jésus?» Il me répondit: «Oui, oui, je suis ton Jésus.» J'essayai de lui demander d'épargner toutes ces personnes, mais lui, ne faisant pas attention à moi, me dit tout affligé: «Ma fille, je suis très fatigué. Allons dans la divine Volonté si tu veux que je reste avec toi.» Effrayée qu'il puisse s'éloigner, je gardai le silence, lui permettant de dormir. Un peu plus tard, il entra encore en moi, me laissant encouragée mais très affligée.
30 juillet 1900
J'ai passé un jour et une nuit sans repos, puis j'ai senti que je quittais mon corps, sans pourtant réussir à retrouver mon adorable Jésus. Je n'ai vu que des choses qui me firent peur. J'ai vu qu'un feu brûlait en Italie et un autre en Chine et que, petit à petit, ces feux se rapprochaient pour se fondre en un seul. Dans ce feu, j'ai vu le roi d'Italie mourir soudainement dans la déception. Cela eut l'effet de faire grandir le feu. Finalement, j'ai vu une grande révolution, un tumulte des peuples, une tuerie des peuples. Après avoir vu ces choses, je me suis aperçue que j'étais revenue dans mon corps. Mon âme était torturée parce qu'elle se sentait mourir et, plus encore, parce que je ne voyais pas mon adorable Jésus.
Après une longue attente, il apparut avec une épée à la main, prêt à l'abattre sur le peuple. J'étais effrayée. Étant devenue un peu audacieuse, j'ai pris l'épée dans mes mains en lui disant: «Seigneur, que fais-tu? Ne vois-tu pas combien de destruction se produira si tu abats cette épée? Ce qui me cause le plus de chagrin c'est que tu coupes l'Italie en deux! Ah! Seigneur! sois apaisé! aie pitié de tes images! Si tu dis que tu m'aimes, épargne-moi cette douleur si amère!»
Pendant que je disais cela, avec toute la force que je pouvais rassembler, je retenais l'épée. Jésus, soupirant et tout affligé, me dit: «Ma fille, laisse-la tomber sur le peuple car je ne peux plus la porter.» Mais moi, la serrant plus fortement, je lui dis: «Je ne peux pas la laisser aller! Je n'ai pas le courage de faire cela!» Jésus reprit: «Ne t'ai-je pas dit bien des fois que je suis forcé de ne te laisser rien voir, puisqu'alors je ne suis pas libre de faire ce que je veux!»
Pendant qu'il disait cela, il baissa le bras qui avait tenu l'épée et commença à calmer sa fureur. Après quelque temps, il disparut et je fus laissée avec ma peur. Puis, sans me laisser rien voir, il me retira l'épée et l'abattit sur le peuple! Oh! Dieu! quel brisement de coeur à seulement me souvenir de cela!
1 août 1900
Mon adorable Jésus continuait de ne venir que rarement et seulement pour peu de temps. Ce matin, je me suis sentie totalement anéantie et je n'ai presque pas osé me mettre à la recherche de mon plus grand Bien. Mais lui, toujours aimable, vint et, voulant infuser la confiance en moi, me dit: «Ma fille, devant ma majesté et ma pureté, celui qui peut me faire face n'existe pas. Tous sont nécessairement effrayés et frappés par le rayonnement de ma sainteté. L'homme voudrait presque s'enfuir de moi parce que sa misère est si grande qu'il n'a pas le courage de rester debout en présence de Dieu.
«Cependant, en faisant appel à ma miséricorde, j'ai assumé une Humanité qui a partiellement voilé la lumière de ma Divinité. Ce fut là un moyen d'inspirer confiance et courage à l'homme afin qu'il vienne à moi. Il a la possibilité de se purifier, de se sanctifier et de se diviniser à travers mon Humanité déifiée.
«Ainsi, tu dois toujours te tenir devant mon Humanité, la considérant comme un miroir dans lequel tu laves tous tes péchés, un miroir dans lequel tu acquiers la beauté. Petit à petit, tu t'orneras de ma ressemblance. C'est la propriété du miroir physique de laisser apparaître l'image de celui qui se pose devant lui. Le divin miroir fait beaucoup plus: mon Humanité est pour l'homme comme un miroir lui permettant de voir ma Divinité. Toutes les bonnes choses viennent à l'homme par mon Humanité.»
Pendant qu'il disait cela, il infusa une telle confiance en moi que la pensée me vint de lui parler des punitions. Qui sait, il m'écoutera peut-être. J'avais l'intention de l'apaiser concernant tout. Pendant que je me préparais pour cela, il disparut et mon âme, courant après lui, se trouva hors de mon corps. Mais je fus incapable de le trouver et, à mon plus grand regret, j'ai vu beaucoup de personnes en prison ainsi que d'autres se préparant à attenter à la vie du roi et à d'autres leaders. J'ai vu que ces gens étaient consumés par la rage parce qu'ils manquaient de moyens pour aller au milieu du peuple pour y effectuer un massacre. Cependant, leur temps viendra. Ensuite, je me suis retrouvée dans mon corps, très oppressée et affligée.
3 août 1900
Alors que j'étais dans mon état habituel, je cherchais mon bien-aimé Jésus. Après une longue attente, il vint et me dit: «Ma fille, pourquoi me cherches-tu hors de toi-même alors que tu pourrais facilement me trouver en toi-même. Quand tu veux me trouver, entre en toi-même, atteins ton néant et là, vidée de toi-même, tu verras les fondations que l'Être divin a établies en toi et la structure qu'il y a érigée: regarde et vois!»
J'ai regardé et j'ai vu des fondations solides et une construction avec de hauts murs atteignant le Ciel. Ce qui me surprit le plus, c'était que le Seigneur avait fait ce beau travail sur mon néant et que les murs ne comportaient aucune ouverture. Une ouverture était pratiquée seulement dans la voûte: elle donnait sur le Ciel. Par cette ouverture, Notre-Seigneur pouvait être vu.
J'étais complètement éblouie par ce que je voyais et Jésus béni me dit: «Les fondations établies sur le néant signifient que la main de Dieu travaille là où il n'y a rien et que jamais il n'appuie ses travaux sur les choses matérielles. Les murs sans ouvertures signifient que l'âme ne doit accorder aucun regard aux choses du monde afin qu'aucun danger ne puisse l'atteindre, pas même un peu de poussière. Le fait que la seule ouverture donne sur le Ciel correspond au fait que la construction s'élève du néant jusqu'au Ciel. La stabilité de la colonne signifie que l'âme doit être si stable dans le bien qu'aucun vent adverse ne puisse l'ébranler. Et le fait que je sois placé tout au haut signifie que le travail doit être complètement divin.»
Qui pourrait dire ce que j'ai compris à la suite de ces propos de Jésus? Mais mon esprit se perd et ne sait s'exprimer là-dessus. Puisse le Seigneur être toujours béni! Que tout chante son Amour et sa Gloire.
9 août 1900
Ce matin, mon adorable Jésus n'est pas venu. J'ai dû l'attendre longtemps. Dès qu'il se montra, il me dit: «Tout comme le son d'un instrument de musique est plaisant à l'oreille de celui qui l'entend, tes désirs et tes larmes sont à mon oreille une musique très plaisante. Pour qu'ils soient encore plus doux et plaisants, je veux te montrer une autre façon: ne me désire pas avec ton désir mais avec mon Désir. Tout ce que tu veux et désires, veux-le et désire-le parce que je le veux, c'est-à-dire prends-le dans mon intérieur et fais-le tien. Ainsi, ta musique sera plus plaisante à mon oreille, car ce sera une musique provenant de moi-même.»
Il ajouta: «Tout ce qui sort de moi entre en moi. Quand les hommes se plaignent qu'ils ne peuvent pas obtenir ce qu'ils me demandent, c'est qu'ils demandent des choses qui ne sortent pas de moi. Alors ces choses ne sont pas très faciles à faire entrer en moi pour ensuite ressortir de moi et leur revenir. Tout ce qui est saint, pur et céleste sort de moi et entre en moi. Pourquoi donc s'étonner si je ne les écoute pas quand ils me demandent des choses qui ne sont pas de moi? Garde bien à la pensée que tout ce qui sort de Dieu entre en Dieu.»
Qui pourrait dire tout ce que j'ai compris à la suite de ces propos de Jésus? Mais je n'ai pas les mots pour l'exprimer. Ah! Seigneur! donne-moi la grâce de demander tout ce qui est saint et qui est selon ton Désir et ta Volonté. De cette manière, tu pourras communiquer avec moi plus intensément.
19 août 1900
Ce matin, après que j'eus reçu la sainte communion, mon Jésus bien-aimé se présenta dans l'attitude de quelqu'un qui s'apprête à enseigner. Il me dit: «Ma fille, supposons qu'un jeune homme veut épouser une jeune fille et que celle-ci, éprise d'amour pour lui et voulant le rendre heureux, veut toujours rester avec lui sans jamais le quitter, sans se soucier d'autre chose, y compris du travail domestique habituel pour une épouse. Que dirait le jeune homme? L'amour de la jeune fille lui plairait mais il ne serait certainement pas heureux de sa conduite parce que cette façon d'aimer serait stérile et lui apporterait du mal plutôt que des fruits. Petit à petit, cet amour étrange ferait naître chez lui de l'ennui plutôt que du plaisir parce que toute la satisfaction serait seulement pour la jeune fille. Et puisqu'un amour stérile n'a pas de bois pour alimenter sa flamme, il serait rapidement réduit en cendres. Seulement l'amour qui donne du fruit est durable.
«Ainsi se comportent les âmes qui ne se préoccupent que d'elles-mêmes, de leur propre satisfaction, de leur propre ardeur et de tout ce qui leur plaît. Elles disent que leur amour est pour moi alors qu'il est pour leur propre satisfaction. On peut voir à leurs actes qu'elles ne se préoccupent pas de mes intérêts et des choses qui m'appartiennent; elles vont même jusqu'à m'offenser. Ah! ma fille, l'amour qui porte du fruit est ce qui distingue les vrais amoureux des faux. Tout le reste est fumée.»
Pendant qu'il disait cela, j'ai aperçu des gens et j'ai voulu m'intéresser à eux. Mais Jésus me détourna d'eux en me disant: «Ne désire pas être sur le chemin des autres. Laisse-les faire parce que tout a son propre temps. Quand le temps du jugement viendra, ce sera le temps de discerner toutes choses: le bon grain sera connu de même que la menue paille et le grain stérile ou mauvais. Oh! combien de choses ayant l'apparence du bon grain seront alors jugées comme étant de la paille et de la mauvaise graine, uniquement dignes d'être jetées au feu.»
20 août 1900
Ce matin, mon adorable Jésus n'est pas venu. Après l'avoir longtemps attendu et alors que mon pauvre coeur était incapable d'endurer davantage, il se montra dans mon intérieur et me dit: «Ma fille, ne sois pas affligée parce que tu ne me vois pas: je suis en toi et, à travers toi, je regarde le monde.»
Il continua de m'apparaître de temps en temps, sans rien me dire de plus.
24 août 1900
Ayant passé une nuit sans repos, je me suis sentie toute remplie de tentations et de péchés. Oh! Dieu! quelle douleur torturante est de t'offenser. Je faisais tout ce que je pouvais pour être en Dieu, pour me résigner à sa sainte Volonté, pour lui offrir cet état pénible par amour pour lui. Je n'ai pas fait attention à l'ennemi en montrant la plus grande indifférence envers lui, dans le but de ne pas le provoquer à me tenter davantage. Mais sans grand succès.
Je n'ai même pas osé désirer mon Jésus bien-aimé. Je me voyais trop laide et misérable. Mais lui, toujours bon pour la pécheresse que je suis, et sans que je l'aie demandé, il vint comme s'il avait pitié de moi. Il me dit: «Ma fille, courage. N'aie pas peur. Sais-tu que certains cours d'eau impétueux et froids sont plus puissants à nettoyer les plus petites taches que le feu lui-même? Tout va bien pour qui m'aime vraiment.»
Ayant dit cela, il disparut, me laissant encouragée mais faible comme si j'avais souffert de la fièvre.
30 août 1900
J'ai vécu plusieurs jours d'amertume et de privation. Au plus, je l'ai vu quelques fois comme une ombre! Ce matin, non seulement j'étais au sommet de mon amertume, mais j'avais perdu l'espérance de le revoir encore. Après avoir reçu la sainte communion, il me sembla que le confesseur voulait que la crucifixion soit renouvelée en moi. Alors, dans le but de me faire obéir, Jésus béni m'apparut et partagea ses souffrances avec moi.
À ce moment, j'ai vu la Reine Mère qui, me prenant, m'offrit à lui pour l'apaiser. Ayant regardé sa Mère, Jésus accepta l'offrande et il sembla qu'il fut un peu apaisé. Ensuite, la Reine Mère me dit: «Veux-tu venir dans le purgatoire et soulager le roi (1) de l'horrible souffrance dans laquelle il se trouve?»
Je lui répondis: «Ma Mère, comme tu le désires.»
En un instant, elle me prit et me transporta à un endroit de tourments atroces où les personnes souffraient et mouraient continuellement. Il y avait là cet homme misérable qui passait d'un tourment à l'autre. Il semblait devoir subir autant de morts qu'il y avait eu d'âmes de perdues par sa faute. Après que j'eus subi plusieurs de ces tortures, il fut un peu soulagé. Puis la Très Sainte Vierge m'enleva de cet endroit de souffrance et je me suis retrouvée dans mon corps.
31 août 1900
Me trouvant dans mon état habituel et ne voyant pas mon adorable Jésus, j'étais très affligée et un peu inquiète. Après l'avoir attendu longtemps, il vint. Voyant que le Sang coulait de ses Mains, je lui demandai de verser le Sang de sa Main gauche en faveur des pécheurs qui devaient mourir et qui étaient en danger d'être perdus, et le Sang de sa Main droite en faveur des âmes du purgatoire.
M'écoutant avec bonté, il fut ému. Il versa son Sang sur une région et ensuite sur une autre. Après il me dit: «Ma fille, à l'intérieur des âmes il ne doit pas y avoir de trouble. Si le trouble entre dans une âme, il provient d'elle-même. C'est que l'âme porte en elle beaucoup de choses qui ne sont pas de Dieu et qui lui sont préjudiciables. Cela finit par l'affaiblir et par affaiblir la grâce en elle.»
Qui pourrait dire combien j'ai compris clairement le sens de ces paroles de Jésus. Ah! Seigneur! donne-moi la grâce de profiter de tes saints enseignements. Autrement, tes enseignements seront pour ma condamnation.
1er septembre 1900
Puisqu'il continuait à ne pas venir, je lui dis: «Mon bon Jésus, ne me fais pas attendre si longtemps. Ce matin, je n'ai pas le goût de te chercher jusqu'à ce que je sois lasse. Viens tout de suite, vite, vite, sans faire d'histoire.» En voyant qu'il ne venait toujours pas, j'ai poursuivi: «Il semble bien que tu veux que je m'use à t'attendre, au point d'en être fâchée. Autrement, tu ne viens pas!»
Pendant que je disais cela et d'autre non-sens, il vint et me dit: «Pourrais-tu me dire ce qui maintient la correspondance entre l'âme et Dieu?» Avec une lumière venant de lui, je lui répondis: «la prière».
Approuvant ce que j'avais dit, il poursuivit: «Mais qu'est-ce qui amène Dieu à une conversation familière avec l'âme?» Comme je ne savais que répondre, une lumière entra en moi et j'ai dit: «La prière orale sert à maintenir la correspondance avec Dieu et, bien sûr, la méditation intérieure sert de nourriture pour maintenir la conversation entre Dieu et l'âme.»
Content de ma réponse, il reprit: «Me diras-tu ce qui peut briser la colère amoureuse qui peut s'élever entre Dieu et l'âme?» Comme je ne répondais rien, il poursuivit: «Ma fille, l'obéissance seule à ce pouvoir, parce qu'elle seule décide de toutes les choses concernant l'âme et moi. Quand une querelle s'élève ou même quand on se fâche assez pour blesser, alors l'obéissance intervient, arrange les choses et restaure la paix entre Dieu et l'âme.»
Je lui dis: «Oh! Seigneur! souvent il me semble que même l'obéissance ne veut pas prendre intérêt à ces choses et que la pauvre âme est forcée de rester dans l'état de dispute.»
Jésus poursuivit: «Elle fait ainsi pendant un certain temps parce qu'elle veut s'amuser à ces querelles amoureuses mais, ensuite, elle assume son devoir et elle pacifie tout. Ainsi l'obéissance établit la paix entre l'âme et Dieu.»
4 septembre 1900
Après la communion, mon adorable Jésus me transporta hors de mon corps en se montrant extrêmement affligé et triste. Je le priai de verser son amertume en moi. Il ne m'écouta pas mais, après que j'eus beaucoup insisté, il la déversa avec joie. Ensuite, après qu'il en eut versé un peu, je lui ai dit:
«Seigneur, ne te sens-tu pas mieux maintenant?
Oui, mais ce que j'ai déversé en toi n'est pas ce qui me donne tant de souffrance. Il s'agit d'une nourriture fade et infectée qui ne me laisse pas de repos.»
Verses-en un peu en moi pour que tu sois réconforté.
Je ne peux pas la digérer et l'endurer, comment le pourrais-tu, toi?
Je sais que ma faiblesse est extrême mais tu me donneras la force et, ainsi, je réussirai à la retenir en moi.»
J'ai compris que la nourriture infectée avait trait aux actes d'impureté et la nourriture fade, aux bonnes actions faites avec négligence, sans soins, et qui sont plutôt un ennui et un fardeau pour Notre-Seigneur; il dédaigne presque de les accepter; incapable de les endurer, il veut plutôt les cracher de sa bouche. Qui sait combien des miens agissent ainsi! Forcé par moi, il me servit un peu de cette nourriture. Comme il avait raison: l'amertume est plus endurable que la nourriture fade et celle qui est infectée. Si ce n'avait été de mon amour pour lui, je ne l'aurais jamais acceptée.
Après cela, Jésus béni mit son Bras derrière mon cou et, penchant sa Tête sur mon épaule, il prit une posture comme pour se reposer. Pendant qu'il dormait, je me suis trouvée dans un lieu où il y avait beaucoup de chemins entrecroisés et, plus bas, c'était le gouffre. Effrayée d'y tomber, je le réveillai pour lui demander son aide. Il me dit: «N'aie pas peur, c'est le sentier que chacun doit fouler. Il demande une complète attention. Puisque la majorité marche sans précaution, c'est la raison pour laquelle tant de personnes tombent dans l'abîme et que ceux qui arrivent au port du salut sont peu nombreux.»
Ensuite, il disparut et je me suis retrouvée dans mon corps.
FIAT
 
1. Probablement Umberto I de Savola, assassiné à Monza le 29 juillet 1900.
 
 
 
 

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